jeudi 26 novembre 2009

DOUZE HOMMES RAPAILLÉS: Les Complices

MARCHE À L'AMOUR
Gabriel Lalonde




Ma tête est mille fois moins
que la tête d'une épingle
c'est en elle pourtant
que danse la terre

Gaston Miron
Poème dans le goût ancien (La vie s'en va)
interprétée par Pierre Flynn

Comme une étoile
qui se faufile dans le sable,
le voilà le bijou:
l'enfant voyage
sous le perron,
loin de la poésie
cramoisi chenille

Le petit déserteur
Jacques Desmarais
Poèmes cannibales
Loin dans ma campagne

Pour ne pas oublier que nous fûmes de cette assistance,
pour se souvenir de la terre et de ses mots qui la dansent,
en ses tremblements, en ses ensemencements,
la prodigieuse amitié des arrangements;
Décidément tous les 25 novembre se ressemblent...

Jack était en ville hier soir, il attendait comme moi les Douze Hommes. Pour notre premier rendez-vous, il y avait de la pluie. Jack, du loin de sa campagne, à qui je dédie ces quelques lignes, en souvenir des quelques heures passées ensemble...



Entre Miron, toi et la pluie
il y avait de la buée d’amis;
De mes Fenêtres ouvertes à l’Autel Novella
jusqu’à ton Train de Nuit en passant par l’Antre N.O.U.S,
le seuil de mes froidures, le rien de mes envapements

Et le cœur de douze hommes à l’âme amironnée

Au coin de tes lèvres un léger sourire timide,
comme celui d’un évadé épris de justice.
Nous n'avons pas encore vraiment parlé je crois,
mais ça viendra…
Les douze hommes avec le doux homme,
les très hommes

Voilà
les voix,
celles de Louis-Jean Cormier, solide performance,
Pierre Flynn, solo ou trio, avec le piano, droit,
Vincent Vallières, David Marin, sensibles et beaux,

et Yann, Ô Yann, splendide Perreau,
dans toute la splendeur de son jeune mystère,
en ouverture, tout en douceur…

La salle pleine à craquer
Le silence, entre deux toux grasses,
l'intelligence de la mise en scène de Marc Béland,
l'éclairage, le son, l'ensemble

accordés aux sons des guitares, violon et piano:
Lavoie, Lambert, Rivard, Corcoran, Séguin
harmonieux d’une simple souveraineté

Tout ça dû au génie de Gilles Bélanger,
instigateur de ce fabuleux projet

Et dans les bras du Poète toujours aussi vivant,
des fleurs pour nos serpents.

Et tes roucoulements... grrr...;-)

Et sous leurs mentons, la gorge des enchantements,
le cœur dans la fragilité de ses cinquante ans,
la fraternité,
l’engagement.

Et l’Amour, bien sûr,
avec sa longue marche
parmi tous ses beaux détours…
Puis la fin,
qui arrive toujours trop tôt
comme la mort inouïe de ce 25 novembre 2009.

Sous la pluie des battants,
nous écrivions ce soir-là,
et dans 200 ans, mon frère,
nous l'écrirons encore.
C'est aussi ça, l'espérance.

***

Merci pour autant de générosité, c’était une soirée que je qualifierais de plus-que-parfaite. La rencontre au bar Jules et Jim, la re-connaissance, l’accolade des vous et tu, l’apéro, l’ambiance. Ta chaleureuse présence, lustre illuminant les mots des non-dit. L’amabilité du geste, le cadeau de la terre dans son petit pot…de vers…Et les livres, avec leurs dos...larges, leurs mots serrés les uns contre les autres et leurs sourires d'émoi. Crois-moi, il n’y a pas de plus beau théâtre que celui-là…


Et comme nos hasards sont probablement préfabriqués par nous: Pierre Flynn qui passait par là, près de cette fresque des pas écoeurés de mourir bande de cave C'EST ASSEZ. Et toi, qui me prends en photo avec lui. Et le fantôme de Lino, celui qui a illustré quelques pages de son livre de paroles à chansons. Le plaisir de l'avoir retrouvé, un peu comme un bijou perdu…L’Admission, texte inspiré en partie par les mots de son album Mirador (et par un certain Brad), vient de prendre une toute nouvelle tournure... 

Photo: J.D.



Et pour ajouter au hasard de l'Art, Miron et Gauvreau, honorés ici-même à Québec, dans cette cité qui n'en finit plus de m'aimer. Miron, que je ne connaissais pas vraiment et Gauvreau, que je lirai jusqu'à la fin des temps, leurs fantômes flânant neuf, par ici et pour toujours. De la Marche à l'Amour à l'Asile de la Pureté, un tout petit pas pour notre humanité...

Nous avançons, nous avançons...


jeudi 19 novembre 2009

COMA UNPLUGGED: un rêve fendu en 4





La rate dans la théorie archaïque des humeurs

Les Anciens disaient qu'en automne il fallait " faire rire la rate ", en mangeant des racines (panais, radis noir, pissenlit...). Ce qui permettait de mieux supporter le froid et d'être de meilleure humeur. La rate, selon la théorie des humeurs, servait surtout à réguler les humeurs. Si on mangeait assez de racines, on évitait les dépressions liées à l'hiver. Le terme humeur vient du latin umor, qui est lui-même un mot venant du grec ancien et qui signifie liquide. Un autre mot en français qui a la même racine est le mot humour, mais son acception actuelle est plus récente (XVIIIe siècle). Il vient de l'anglo-normand humour qui vient lui-même du vieux français humor. Également, en anglais américain, humour s’orthographie humor, mais le même mot est prononcé de manières très différentes par les anglophones britanniques et américains. Dans l'induction de la pièce suivante, Every Man out of His Humour (1599), Ben Jonson élucide le procédé : " Un trait particulier domine un homme au point qu'il oriente tous ses affects, son humeur et ses facultés pour les canaliser tous dans le même sens. "

(sources: wikipedia)

***

LE CORPS DU TEXTE: SA TÊTE, SON OEIL, SES BRAS, SON SEXE.
LE COEUR DU TEXTE: SA FÊTE, SON DEUIL, SA VOIX & SES EX…

Hier soir, au Périscope, dans l’avant-dernière rangée, M. et moi. La salle est remplie. Plus tôt dans la journée, à midi plus précisément, elle était allée au guichet du théâtre se procurer les deux derniers billets et comme elle bénéficie du rabais fait aux aînés, j’y ai eu droit moi aussi. Je n’aime pas tellement ce genre de contrebande préférant payer ce que je dois payer légalement, mais en tout cas, la gentille et jolie jeune fille qui a déchiré mon ticket à l’entrée ne regardait même pas le billet, tant d’angoisse pour rien des fois…

COMA UNPLUGGED, dont j’avais entendu souvent parler en bien à travers les pages et les ondes de divers médias, m’a agréablement surprise, autant par la vivacité de ses dialomonologues que la simplicité de son décor. Mais c'est le talent fou des comédiens, via les mots de l’auteur, Pierre-Michel Tremblay, qui a le plus retenu mon attention, non pas en déficit hier soir. Un texte fort touchant par moment comme superbement ironique à d’autres, des mots de tendresse, de grinçant, de finesse, de mordant, mais jamais de larmoyant car aussi profondément humain. Trop humain.

L’humour, un bien petit mot pour y peaufiner les railleries de ce monde continuellement en bataille, ce monde de chicanes, d'amour, d'escroqueries, qui s’invective, se harcèle, se "victimise " pour quelques dollars de plus ou quelques non mal dits, mal placés dans le travers de nos petites bouches trop grandes gueules. La guerre des sexes: l'épée de l’homme, la rose de la femme. Et au cœur de celle-ci, Daniel Martin, voyageant dans son coma avec les principaux personnages qui l'enchantent, ou le hantent, dans ce quotidien qui était devenu trop ordinaire; lui, Daniel, un être exceptionnel, qui aime danser tout simplement, qui aurait tant voulu faire du stand up, de l'humour...

Steve Laplante, qui l'incarne, irradie au centre de la scène pendant une heure 45. Steve Laplante, une étoile montante que l’on a pu voir scintiller dans le Littoral de Wajdi Mouawad et que l’on peut également apercevoir à l’occasion dans le coin lumineux de nos petits écrans certains soirs, offre une performance tout à fait remarquable sur un plateau au plancher penché.

Cette voix, contenue dans le " moton " de ses émotions, retenue par un je ne sais trop quoi de passionnel, cette voix qui écorche les trente nerfs d'une gorge sèche, qui surf seule sur le flot salé de son imaginaire, noyée des millions d'images des multiples écrans qui la malmènent, cette voix qui ne fait pas assez de vagues, qui éclate au ciel de ses humeurs depuis l’œil silencieux d'un typhon clair.

***
Le chiffre 4

Popularisée par les Écrits hippocratiques, la théorie des humeurs fut l'une des bases de la médecine antique. Selon cette théorie, le corps était constitué des quatre éléments fondamentaux, air, feu, eau et terre possédant quatre qualités : chaud ou froid, sec ou humide. Ces éléments, mutuellement antagoniques (l'eau, la terre éteignent le feu, le feu fait s'évaporer l'eau), doivent coexister en équilibre pour que la personne soit en bonne santé. Tout déséquilibre mineur entraîne des " sautes d'humeur ", tout déséquilibre majeur menace la santé du sujet. (wikipedia)

***

La voix, oui, encore elle, celle plus grave qu'aigüe du chanteur/musicien, avec ses interventions maître de cérémonie, franchement hilarantes, et celle non pas moins drôle du Touareg, ont fait délicieusement dilater nos rates remplies du splénique de l'automne…L’humour, les humeurs, la rate, ce « cimetière des globules rouges »…La rate qui tient elle aussi un rôle important dans l’immunité de l'automne sec et froid, temps qui favorise la bile noire de la mélancolie, aura été vaporisée des ravissantes et nourrissantes gouttelettes d'un virus que je ne crains plus, celui du Théâtre que l'Artiste d'ici bâtit...pour Béatrice...

COMA UNPLUGGED, comme du VIA GARS, pour les cerveaux à plat. Longue vie à cette pièce.



jeudi 12 novembre 2009

MACBETT: Les Fils de la Gazelle

Dièse, solutions visuelles et design




" Au lieu de dépenser tout votre argent disponible en spiritueux, n’est-il pas préférable d’acheter des billets de théâtre d’avant-garde, dont on parle tant ? Connaissez-vous le théâtre d’avant-garde, dont on parle tant ? Avez-vous vu les pièces de Ionesco ? "

Bérenger dans Rhinocéros
d'Eugène Ionesco (Eugen Ionescu) 


Les restes d'un temps d'il n'y a pas si longtemps...

L’œuvre d'un roi, de ses suzerains via ses vassaux.
La chaleur d'un froid dur, la luminosité d'une troupe.
Le respect des conventions, la lubie des paroles.
L'introspection de l'Assistance, le bâillement de la dissidence.
L'étoile des spotlights sur la tête d'un roi déchu.
Le sang bleu royal de sa progéniture, l'ami déçu.

Macol qui regimbe, Macol qui te parle;
Macol qui sort du décor sombre des décombres,
qui se prépare pour une nouvelle guerre.

En passant par Ionesco,
du Shakespeare à la Diego;
De l'Angleterre à la Roumanie,
le Québec dans la Bolivie.

Tel un séduisant spectre,
ce bouillon d'âmes et de pennes,
cette sauce chaude de sang crème.

Boire l'Absurde du drame de la guerre froide,
se soûler du vin des masses qui la désarment;
boire le vin des masses qui se la décabane,
le vin des mess qui se le républikedebanane.

(et les CHAISES...
électrique, roulante, de plastique;
pour être bien assis, pour ne plus bouger).

À l'avant-scène des soumissions,
l'adultère des abandons;
panneaux/réclames autour des écrans vidés de charme,
radios poubelles remplies de décibels,
cages de verre empilé d'elles.

Au domaine de la Mort, le songe ailé des roupillons.
Sous la goupille d'un édredon, le leurre de l'admission.

Sorcières/Ladies, gardes de sentinelles,
Condor/Glamiss, spectres rouges du Charnel,
ils veillent au mort et à la progéniture du Fils de la Gazelle.

Le Temps qui défile dans le bleu-noir,
les mots vains qui reprennent le goût du soir...

À l’avant de l'après, le suc extrait de l’exprès.
L'opinion de la Surdité.
L'envolée de vos beaux adverbes.
Les rires jaunes alignés sur la rose de nos lèvres.

Sous le vent d'accès de la colère,
une clef pour les portes ouvertes,
un cadenas pour l'Oreille muette.

Au-dessus de la braise comme chenet,
l'humanité qui tourne en rond;
l'humanité bannie de ses foyers;
qui essaie, tant bien que mal,
de renaître pour de bon de ses cendres
dans ses vases bleues gluantes,
dans le centre de ses excès.

L'humanité qui éternue/tousse/toussote,
lave ses petites mains,
astique ses menottes enduites du purell
des plus sains que sains;
qui assouplit ses langues molles,
qui durcit ses dagues sales.
Langues molles qui mordent les bagues du vol,
langues de bois qui lèchent celles du Vassal;
l'humanité qui scrute via le blanc mort de ses yeux glauques,
les tapisseries royales de ses plus grands remords;
l'humanité qui colmate ses peines dans les craques aveugles de ses aveux,

qui recoud le voile de ses tentures déchirées,
qui décape ses portes d'armoires ébréchées,
qui graffigne les miroirs de ses parquets cirés,
qui desserrent les cordons malusés de sa bourse,
qui danse en transe sur le son des vieux records...

L'humanité qui fonde du bleu de ses yeux pers
un espace où regarder sans trop y VOIR,
qui fixe ses dents de lait dans un pays trop large,
là où hélas ! se perdent, sages, ses pairs, ses mers,
et tout l'ensemble de son territoire.

NFV/FB---Macbett et Banco
JG/VC---Glamiss et Candor
SD/GC---Lady et Roi Duncan
LC/ML/SM---sorcières et Macol

des comédiens, des citoyens,
avec ou sans truc du chapeau;
des prestidigitateurs dans le complot des trios,
des fleurs évanouies dans le quiproquo,
du venin d'ami pour les à propos

Tant de beauté, tant d'abandons, tant d'efficacité,
tant de vices serrés sur les cicatrices alambiquées,
tant de limbes dévissées,
tant d'amis amidonnés,
tant de têtes décapitées, tant d'amis bien apprêtés.


Dans le grand jeu des compromis,
l’Amitié des ABUSÉS;
Dans le grand jet bleu de l’Ennemi,
le Mot, l’Écrit, le Son du Jeu;
Autour du chant flétri des coeurs fielleux,
le sang mal nourri d'un demi-dieu. 

***

MACBETT

Texte: Eugène Ionesco
Mise en scène: Diego Aramburo


lundi 9 novembre 2009

Le vent de l'Est, comme un velours orange




La pauvreté est une maîtresse dispendieuse.

Paul Michaud
Extrait de Quelques arpents de neige


Pascal Michaud est le petit-fils de Paul Michaud, libraire-éditeur, fondateur de L'institut littéraire de Québec, maison d'édition où publièrent notamment Anne Hébert, Yves Thériault et Marie-Claire Blais. M. Michaud est l'auteur d' AU TEMPS DE L'INDEX, mémoires d'un éditeur 1949-1961, un livre sur la " face cachée " de la littérature. Pascal est par le fait même le fils de Jean-Yves Michaud, qui tient une papeterie dans mon quartier où il me plaît d'y acheter la plupart de mes articles de bureau.. en petit.


C'est dans cette atmosphère où ça bon le papier, l'encre et l'efface, comme celle de la procure du Boulevard Gouin où ma grande-tante Marie-Reine m'emmenait à chaque rentrée scolaire du primaire, que j'ai rencontré Pascal, il y travaillait en même temps qu'il poursuivait ses études en Histoire à L'Université Laval. C'est autour des crayons, des agendas, du papier collant et des cartouches d'encre que nous y tenions de courtes mais intéressantes conversations. Il était également journaliste pigiste au Soleil. Il y avait un bon moment que je n'avais pas croisé son aimable sourire, c'était il y a deux semaines environ, j'ai eu affaire à passer à la Papeterie, histoire de me procurer de ces recharges d'encre de stylo rétractable de marque Pentel, que j'affectionne particulièment pour écrire dans mes carnets, j'appris par son père qu'il était parti pour un mois en Europe afin d'y faire des reportages pour Radio-Canada au sujet de la Chute du Mur. Et c'est seulement ce matin, à la suite d'un entretien téléphonique entre Pascal et Claude Bernatchez, de l'émission Première Heure, que je pris connaissance qu'il tenait un blogue " à l'antenne de Radio-Canada ", ce depuis le 24 octobre dernier...


20 ans déjà, Pascal n'avait que 9 ans à ce moment, moi 32, et mon bébé 4 mois...Le temps a filé comme une comète. Et qu'est-ce qu'il reste de ce Mur que l'on a abattu de sang chaud au nom d'une guerre froide et d'une liberté non encore tout à fait apprivoisée par certains (de ce que j'ai pu en comprendre dans les interviews que Pascal a fait auprès des gens qui ont vécu ce moment historique) ? Une cérémonie ? Un emblème ? Une réflexion ? Quelque chose qui marquera...le temps ? Reste que ce temps a filé, ou défilé, dans le ciel gris mauve des pauvres comme dans celui plus multicoloré d'un jet-set ami-donné, un temps qui dans sa navette de métal aura été mal fondu pour l'étape brûlante de son " encensement "...Ce soir, nous regarderons les dominos tomber...en pensant à un peu à toi Pascal et à TA Liberté...

***

DE LA POLOGNE


« Notre philosophie, c’était de combattre, mais pas par la force. Nos armes, c’étaient les livres et les magazines qu’on distribuait clandestinement ».
Bogdan Olszewski
Je me rappelle juste après les élections, quand les choses commençaient à changer: soudain, tout devenait accessible! Il y avait des livres qui apparaissaient, il y avait une grande joie dans l’air!
Piotr Januszewicz
« Tous mes vêtements étaient beige, marron et gris. Quand je suis allée en France, je me suis tout de suite acheté un foulard plein de couleurs.»
Izabela Kaminska
À l’époque, j’étais adolescent et je me rappelle que, tout d’un coup, tout est devenu plus coloré. Avant, tout était gris. Je me souviens aussi du changement au niveau des vêtements des gens. Avant, on n’avait aucun choix. Tout le monde portait plus ou moins les mêmes vêtements. »
Aleksander Urban


DE LA TCHÉCOSLOVAQUIE


En 1990, il est revenu pour la première fois à Prague. « J’avais été vraiment surpris de pouvoir simplement marcher dans les rues de Prague et de voir les gens rire. C’était réjouissant de voir qu’un bon ami à moi, Vaclav Havel, était devenu président ».

« J’ai vécu plusieurs années sous le communisme et plusieurs années sous le capitalisme. Le socialisme n’est pas la solution. Le capitalisme n’est pas la solution non plus ».

Vratislav Brabenec, poète et musicien
The Plastic People of the Universe


« Dans ce pays, on ne voyait pas vraiment de lumière au bout du tunnel ».
« Même pas dans mes rêves les plus fous ».
« En deux jours, toutes nos peurs ont disparu ».

Michal Pokorny



DE LA ROUMANIE


Tout le monde criait « Liberté! ». « Ç’a été un moment très important pour moi ».
Traian Orban

« Avant, on pouvait sortir dans la rue la nuit sans avoir peur. Maintenant, c’est un peu plus dur. Il y a des problèmes de violence. Avant, la télévision, ça arrêtait à 22 h. Maintenant, les gens ont la tête comme ça parce qu’ils la regardent toute la nuit ».
Steluta


« Si tu possèdes plusieurs choses et qu’elles te rendent fou, c’est mieux de ne pas les avoir. Si tes yeux sont rivés sur la télévision 24 heures sur 24 et que tu es incapable d’arrêter de la regarder, alors c’est pire que si tu la regardais seulement deux heures par jour ».
Adriana Scripcariu
***

Le blogue de Pascal:
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/enProfondeur/international/mur_de_berlin/chroniques_web/


« On ne connaît vraiment l'amitié qu'à l'usure»

une autre citation de Paul Michaud, extraite de Quelques arpents de neige.

AU TEMPS DE L'INDEX

http://www.edlibreexpression.com/ficheProduit.aspx?codeprod=296160




jeudi 5 novembre 2009

LIMBES: l'Avènement du Souffleur

Crédit de l'image: Crucifixion 3
Sophie Jodoin
www.sophiejodoin.com


Les âmes vides sont attirées par les opinions extrémistes.
William Butler Yeats

Comme le héron, il est solitaire, absorbé en lui-même et il a besoin de cette solitude pour se réaliser pleinement.

La musique de la flûte se moque du Christ comme les cris de ceux qui ne participent pas à son sacrifice. Que cette flûte soit façonnée dans un os de héron n'est pas innocent. Les cris de la foule, assez proche de la pleine lune pour que le Calvaire n'ait pour elle aucun sens, sont subjectifs comme ceux des oiseaux. Les railleurs sont ainsi associés au héron.

Le théâtre de William Butler Yeats
Jacqueline Genest

***

Pour l'intensité de l'interprétation, l'encensement, les sacs de papier, masques envoûtants, les regards enfoncés dans l'extérieur silencieux du non-lieu. Pour la musique, la parole remixée des auteurs, les voix distorsionnées, les torses non bombés, le savoir-dire du metteur en scène, la miche, le gaz, la fumée. À l'adresse de l'enfer, du ciel et du purgatoire: les limbes, entre le cygne de Léda et le Héron blanc, sous la lune de l'Art.

***

Des bribes de LIMBES, spectacle qui flotte encore dans ma petite tête lourde ce matin. Des effluves étouffantes, de la lenteur exigeante, des gestes, des pas, des regards inscrits sous la lumière d'un lampadaire. Le fils, le père, la mère, le dieu. De trinité en trinité, s'être fait couper et les doigts, et la tête, et le coeur et les yeux. Devant les restants d'une humanité qui se cache la tête dans un sac, qui joue à l'autruche, et qui cherche encore des truffes...

La marche de l'auteur sur les eaux gazeuzes, la soif de dire avec le pouvoir de se taire, le mélange des races, l'intensité de l'efficace, les raz-de-marée rouges dans les bras des crucifiés. Le poteau électrique qui trône et connecte les ailes coupées d'un troupeau de voix ouvertes par le grand couteau. Le regard sur le pain. La faim. Le plastique entre les mains des bénis. Des bêtes à la porte, des hommes aux fenêtres: le supplice d'un bum dans le calice de l'homme. Les miettes de temps qui fermentent sous les vents. En attendant, en attendant....il n'y avait rien de plus à écrire que ce qu'il n'eut fallu nous dire...

***

Sur les feuilles que les acteurs lurent au tout début de la pièce, aucun texte. Ils jouèrent dans la mémoire vive d'un homme venu d'Irlande pour ensuite se jouer des mots venus d'ICI, devant et derrière tout ce qui avait été déjà écrit. La vitesse à laquelle se fit la transition entre les époques: un peu comme la lumière de l'étincelle du simple feu de Bengale mêlée à celle du gaz et de la poudre. Nous dormirons mieux maintenant, mais rien que sur un oeil.

***
Avant d'être de l'assistance de LIMBES, je suis passée à la librairie Saint-Jean-Baptiste... un chaton entre les mains du jeune propriétaire, un homme assis sur un vieux divan, la chaleur des livres dans les étagères, mais surtout, la douceur de l'homme qui accueille. Y ai trouvé la balance des Jacques Poulin qui me manquaient. Et au milieu du salon, son fantôme, vivant. La traduction est une histoire d'amour, c'est vrai Monsieur Waterman, j'ai pu encore une fois le constater hier soir avec les mots anglais d'un Yeats irlandais dans la bouche et le coeur français d'un Christian Lapointe québécois, un vrai travail d'orfèvre et de longue haleine, une oeuvre d'art.

***

Le Lapin, dans sa cage, me regarde taper, il attend lui aussi, il a hâte de sortir, mais avant, encore quelques mots pour parler d'un sourire libanais, celui de Hanna Abd El Nour, le dramaturge, avec qui j'ai eu le plaisir de converser avant la pièce, lui dont j'ai un soir vu la plus surprenante des pièces, Les grenouilles et les parapluies. Le revoir, lui parler, n'a fait qu'ajouter à l'agrément de l'événement. Le hasard fait la plupart du temps bien les choses, et hier soir encore une fois: le jeune libraire m'avait parlé plus tôt de cet atelier théâtral sur la violence qu'il avait vu au cours de l'été, de cette boîte à bijou avec ballerine qui ne cessait de jouer, tellement énervant qu'il aurait aimé se lever de sa chaise pour aller la détruire, le hasard étant que cet atelier fût donner par nul autre que Hanna Abd El Nour * et que je n'en avais jamais entendu parler avant. Où étais-je donc le 18 août ? Dans les limbes, fort probablement...

***
En revenant, il y avait cette nouvelle à propos d'une tuerie aux USA, une autre de plus me dis-je. Le sang de ces soldats tués hier au Texas, sous le même soleil qui brille encore ici ce matin, à la même adresse que nos lendemains de faillite. Rien ne s'arrête. Tout continue.


« Toute œuvre d’art, aussi impersonnelle soit-elle, permet dans une certaine mesure de compenser et de réparer les blessures que le temps inflige au corps et à l’intégrité de l’être. »

Carle Bonafous-Murat
La tour, de W.B. Yeats


Les formes et les choses se manifestent à celui qui n'est pas attaché à son être propre. Dans ses mouvements, il est comme l'eau ; dans son repos il est comme un miroir, et dans ses réponses, il est comme l'écho.

Lao-Tseu
Le Vrai Classique du vide parfait


* Le théâtre d'Hanna Abd El Nour



mardi 3 novembre 2009

Colombus avenue

Columbus Avenue à l'angle de Jack Kerouac : le café Vesuvio.
Au fond, la Transamerica Pyramid

Tous ces auteurs que nous pensons connaître de par leurs écritures et leurs paroles, en qui nous croyons parfois y reconnaître quelqu'un de semblable à nous, lecteurs de passage, eux qui nous offrent un pan de leur vie suspendue aux cordes de leur imaginaire, celui qui leur fait une belle grande tête déposée sur de frêles ou robustes épaules, eux qui ont de la peau noire et blanche par-dessus leurs os légers, souples et solides, qui nous jouent de leur musique infaillible, eux qui comme nous deviendront un jour de modestes ou funestes fantômes...Par admiration pour eux et pour Jacques Poulin, comme à un jeune auteur que je découvrirais enfin, et pour Jack Kerouac, qui n'en finit plus de boire et de mourir de la cirrhose...du coeur, voici un extrait choisi dans le vieux mais si confortable Volkswagen blues, roman québécois dans lequel on y croise certains spectres suspects...

***

Ils se hâtèrent de regagner la Volkswagen. L’homme s’installa au volant. Après avoir jeté un coup d’œil sur un plan de la ville, il décida de rouler un moment dans Bay Street, mais il tourna à droite et prit Columbus lorsqu’il vit un panneau signalant que le quartier de North Beach se trouvait dans cette direction. Le nom de North Beach évoquait pour lui des souvenirs liés aux beatniks et à Jack Kerouac.

On the road était un des livres que la Grande Sauterelle avait " empruntés " au cours du voyage parce qu’il était mentionné dans le dossier de police de Toronto. Elle l’avait trouvé en version française dans une bibliothèque de Kansas City; elle le connaissait déjà mais elle avait eu du plaisir à le relire. " Qui n’a pas relu n’a pas lu ", disait-elle. Pour sa part, l’homme avait préféré garder intact le souvenir de sa première lecture: il se souvenait d’un voyage ayant les allures d’une fête continuelle, qui était raconté dans un style puissant et enchevêtré comme les routes immenses de l’Amérique; alors il s’était contenté de relire la préface, dans laquelle il avait souligné cette phrase:

La route a remplacé l’ancienne " trail " des pionniers de la marche vers l’ouest; elle est le lien mystique qui rattache l’Américain à son continent, à ses compatriotes.

Ils virent tout de suite que North Beach était un quartier très spécial, alors ils abandonnèrent le vieux Volks sur le parking du Safeway, au coin de Chestnut, et ils mirent des chandails de laine pour aller à pied dans l’avenue Colombus. Même s’il avait grandi depuis le début du voyage, le chat noir acceptait encore de se balader dans le capuchon de la Grande Sauterelle; il avait trouvé une nouvelle position: au lieu de dormir en boule au fond du capuchon, il se tenait debout, les pattes et le menton appuyés sur l’épaule de la fille.

Ils passèrent devant un immeuble en briques rouges qui abritait la bibliothèque du quartier. Un peu plus loin, sur la gauche, il y avait un parc appelé Washington Square.
--- Ah oui, dit l’homme, Kerouac venait souvent par ici.

Il parlait comme si Jack Kerouac était une vieille connaissance; à la vérité, il n’avait lu que deux de ses livres et quelques articles sur lui dans des revues.

--- Une fois, il avait acheté un gallon de vin blanc, dit-il. Le vin qu’il préférait à cette époque était du tokay, une marque bon marché. Alors il s’est amené dans le parc avec sa petite cruche de tokay et il s’est mis à boire. Il s’est assis au pied d’un arbre et il a bu jusqu’à ce qu’il ne reste plus une goutte de vin, et ensuite il était complètement soûl et il s’est endormi dans l’herbe.


Washington Square était un parc ordinaire, un carré de verdure avec des arbres, des bancs, quelques monuments et un coin pour les enfants, mais tout à coup, avec la présence de Kerouac, tout était transformé. Des formes suspectes étaient allongées dans l’herbe. À cause du brouillard, l’herbe était certainement mouillée, et pourtant il y avait des vieux et des bums qui étaient étendus et dormaient, enveloppés dans des journaux ou des couvertures de toile. Le parc était envahi par les fantômes du passé.

La Grande Sauterelle réfléchissait.
Jacques Poulin
Extrait de Volkswagen blues

dimanche 1 novembre 2009

Le Ti-Jean de Lévis

Jack et Burroughs, 1953


Parce que Kérouac est toujours aussi omniprésent pour les uns comme pour les autres, quelques extraits de JACK KÉROUAC, un essai-poulet, de M. Victor-Lévy Beaulieu, publié aux éditions Trois-Pistoles.

*** 

S’il n’est jamais devenu un vrai beatnik, c’est à cause de sa Mère vers qui il revient toujours après ses voyages fabuleux " dans la folle nuit d’Amérique " --- il écrit: " Je rentrais chez moi en octobre. Tout le monde rentre chez soi en octobre "--- [81]

Tous ces paragraphes qu’un romancier met dans un livre pour tuer son temps littéraire, façon de marquer le pas et de préparer la substantifique moelle qui constituera enfin les moments forts du livre --- Le bon écrivain est celui qui est capable des plus audacieux rebondissements et qui, par cela même, ne craint pas de décevoir son lecteur --- Jack pratique cette méthode à l’occasion --- ON NE PISSE PAS AUTANT DE LIVRES SANS SACRIFIER QUELQUE PEU À LA VÉRITÉ DE CE QU’ON DIT. --- [95]

Je suis devenu Bouddha, écrit Jack, ce qui signifie qu’il s’est transformé en Gérard, qu’il vit de tous les morts, celle de son père, celle de ses oncles décédés, ce qu’il appelle la vérité qui se matérialise dans les os des morts, au-delà de l’arbre de Bouddha et de la croix de Jésus. --- Il y a, dans ce genre d’écrits de Jack, une espèce de haute-voltige (Jack voudrait que les mots le libèrent de ce qu’il est, le transmutent par l’intérieur, ce qui est bien une lubie d’écrivain hibernant dans la chaleur de ses illusions). [103]

Kérouac était un écrivain, c’est-à-dire, qu’il écrivait. De tous ceux qui se prétendent écrivains et qui ont leurs noms imprimés il y a très peu d’écrivains et ils n’écrivent pas, et ceci réside dans ce fait, un toréador se bat avec un taureau, un matador à la con fait des véroniques sans taureau. L’écrivain est passé par, il ne peut en être autrement.

( Wiliam Burroughs, à la mort de Jack) [105]

( Ne rature pas, me dit Jack, dans la vie il n’y a pas de rature possible, tout coule et fuit et meurt et renaît --- Simagrées de la danse spectrale) --- Et comment la lumière du matin ne pourrait-elle pas m’induire en tentation d’inspiration ? ……………………………..
…………………… [107]

( Allen Ginsberg: devenir la souffrance et le Mal, hurler les mots de Howl en guise d’exorcisme, s’enfoncer dans les jungles mexicaines ou filer sur les Autoroutes de la Folie ou homosexualiser sa vie au grand dam de Mémère craignant pour son Ti-Jean --- Fonction du visionnaire de la Beat: s’approprier le monde dans l’exigence de la Révolte. Que ton esprit se retourne à l’envers pour mieux t’envoûter --- [109]


Pourtant Jack, après la publication de On the road ( en 1957, je le rappelle) est demeuré bien peinard chez sa Mère, à écrire ses aventures. Il sera étonné de voir jusqu’à quel point on s’est trompé sur lui, ses intentions, ses ambitions et sa personnalité. Et lorsqu’il reprend la route, aux environs de l’année 1960, il est catastrophé par l’ampleur de ce qui s’est passé à cause de lui (si naïf était Jack qu’il n’avait pas songé que le mot est la plus subtile corde à laquelle on peut se pendre). [131]

Car le sexe pour Jack est synonyme de procréation, ce qui est l’envers de l’enseignement fondamental de Bouddha et l’impossibilité de faire arrêter la Roue de la naissance et de la mort, de sorte que " chaque adorable petit bout d’homme sur lequel une mère se penche en fredonnant est une viande pourrie que les vers détruisent à petit feu dans les sépulcres de la terre " . --- Jack ira même plus loin et dira de la naissance: " Quelque chose dont on était fier au temps des seigneurs, mais dont aujourd’hui la pensée nous donne envie de vomir, les portes électroniques qui s’ouvrent toutes seules dans les supermarchés devant les femmes enceintes afin qu’elles puissent acheter la nourriture pour nourrir d’autres morts. Qu’on coupe ce passage, agence U.P.I." --- [155]

(J’aime bien toutefois ce que Jack écrit du cœur qu’il compare à un tube battant, très subtilement vulnérable, avec des brimborions d’artères et de veines, des alvéoles qui se ferment et " finalement quelqu’un le mange avec un couteau et la fourchette de la méchanceté " ) [159]

Quarante ans pour comprendre que la Béatitude ne dure pas et qu’à la fin on ne se retrouve toujours qu’en sa propre compagnie pourrissante --- (Flash de vie, étincelle sans temps et sans espace) Heureusement que Mémère était là et qu’en elle Jack a sublimé toutes les femmes. --- La Mère, seul amour de Jack) [161]

Et le fils et la Mère passaient la saison dure ensemble, bien au chaud dans leur affection, heureux de se retrouver et de s’aimer dans leur pauvreté (quelle fête ce fut à la maison quand Jack, avec son premier chèque de droits d’auteur, acheta à Mémère un frigidaire et une télévision Motorola !) [168]



Pourquoi faire de la peine aux gens qu’on aime, en ne leur donnant à lire que le mauvais sorti de soi, cette tire-écriture dans laquelle le lecteur risque de rester collé, estomaqué par un mot, une phrase, une scène disgracieuse ? Jack était meilleur que tous ses livres et Mémère savait cela. [170]

Vivre la totalité de ses démesures et faire des réussites en tous lieux et en tous temps, tel était Hugo l’olympien de Guernesey --- Mais Jack, rien d’autre qu’un clown, malade d’écœurement --- Bouffon canadien-français et nombriliste, capable de donner la chienne à tout Québécois le lisant --- Homme hypothéqué, dépossédé, petit et dérisoirement sublime, comme seul on sait l’être entre Canadiens français --- pas démesuré était Jack mais plutôt sans mesures parce que se connaissant trop bien et ne croyant pas à la fiction ---- Les livres de Jack sont des manuels ---- (Savoir jusqu’où on peut aller dans le rapetissement de sa lamentation) --- Les livres de Jack
sont ce que le Québécois a fait de plus douloureux contre lui-même --- Peau de chagrin canuck ---- " Laisse-moi être baroque ") [180]

( Et n’oubliez pas ceci: il y a des auteurs qu’on épouse, exactement comme on fait avec les femmes --- Pendant un temps, on vit la même vie, on est comme une sangsue buvant le sang chaud de l’autre --- Et l’autre est aussi une sangsue qui boit également le sang chaud de tes veines ( principe des vases communicants tel qu’imaginé par André breton --- ces millions de mots noirs s’étirant paresseusement sur le papier ou bondissant follement entre les lignes, écriture avalanche, ou écrite plane, ou écriture tout en lacets de montagnes --- " Tout le monde boit dans des verres tulipes " ) [184]



Et je m’obstine, et je piochote, et je sue, et j’ai ma grosse tête des mauvais jours car essai-poulet court toujours et je n’arrive jamais au bout de ma peine: il est trois heures du matin et je n’avance à rien et je suis dans le sublime de mon écoeurement, Melville me tirant par les cheveux, Bibi me chatouillant la plante des pieds, le docteur Ferron m’auscultant le cœur, Trudeau me donnant mal à l’estomac et Jack, silencieux devant moi, buvant bière après bière, hautain et morne comme les canadiens français de sa longue enfance lowellienne --- Et cette pitoyable envie d’écrire de nouveau l'une des premières phrases de ce livre: " Kérouac, mais c'est la cerise sur le sundae franco-américain ", c’est-à-dire la fin de quelque chose, la fin du Québec-de-par-en-Bas --- [187]

Car le vieux mythe de l’Amérique est un serpent bien lové en soi, inexpugnable --- [187]


Victor-Lévy Beaulieu
Montréal - Lorraine
Septembre 1971 --- Juillet 1972