samedi 28 mai 2016

LE CERCLE DE CRAIE CAUCASIEN : tourbillon de turbulence






ELLE EST TERRIBLE

LA TENTATION DE LA BONTÉ


Le 12 mai dernier, par l’une de ces autres mémorables soirées de théâtre, Québec rayonnait de tous ses éclats dans la splendeur chaleureuse qui semble l’accompagner depuis la toute première fois où nous nous sommes rencontrées Elle et moi…





Septembre 1978
Photo: A. Langlois

Elle, la même qu’au tout jour premier, celui où est né cet émoi inépuisable du précieux souvenir impérissable de SA conquête… 

Elle, qui me trotte encore dans ma petite tête de jeune badtripeuse décongelée, qui me tricote de la mémoire vive pour l’éternité; qui me dévale à travers ses rues pentues, ses fenêtres à battants et portes cochères; qui me perd, m’avale et me noie; m’accueille avec tous ces exilés qui se nourrissent de sa culture 360 degrés…


Avenue Sainte-Geneviève, Québec
Photo: L.Langlois

Elle, avec qui le 12 mai dernier, je suis à nouveau retombée en amour; Elle qui, ce soir, pour dix piastres seulement, s’est fait allumer les planches d’aplomb par le jeu intense des finissants et finissantes de son « jeune » Conservatoire d’art dramatique...



Mais avant la pièce, A. et moi étions allés nous faire voir du côté de chez BATINSE, cuisine d’icitte. Won tons aux pieds de cochon confits et aux crevettes de Matane, raviolis de cerf, cromesquis de foie gras, et pour terminer ce festin estival, salade de fleurmier chaud aux bleuets sauvages. Que du vrai, que du bon. Le goût d’icitte, c’est franchement délicieux. Et le service d’Isabelle: impeccable. L’endroit, éclairé, coloré et fort original, tout à fait de son temps; avec une balançoire comme fauteuil, des drinks de matantes géants, de la pierre aux murs et une cargaison de beaux sourires accrochés aux lèvres d’une jeunesse bio-locale ;-)…Comme le menu est de saison, il est d’ores et déjà assuré que nous y reviendrons l’automne prochain lors de la prochaine saison du Conservatoire…à moins que ce soit demain...mais revenons à nos finissants...

On a fermé les cahiers un soir
Sur la guerre inachevée
Et comme si rien ne
s’était passé
On a déserté l’histoire
Et tout s’est effacé
Comme s’il y avait un peu de craie
dans l’encrier



LE CERCLE DE CRAIE CAUCASIEN, de Bertold Bretch, écrite en 1945 mais jouée en 1949, est donc une œuvre d’après-guerre mais pourtant encore si actuelle. C’est l’énergique Marie-Hélène Gendreau qui a mis en scène cette ultime production des finissants et finissantes de 2016, et c’en était toute une. 


Aucune espèce de temps mort, que de la vie de tout bord tout côté pour ces garçons et filles qui ont eu l’air de s’en donner à cœur joie devant les spectateurs en éveil, sauf un qui, ma foi, devait avoir eu une bien grosse journée. Non, ce n’est pas toujours facile d’être voisin de tels auditeurs, heureusement, il s’est fait déserteur à l’entracte. Mis à part cette fausse note, tout était parfait, à commencer par les comédiens, dont nous avions fait notre première reconnaissance en décembre dernier lors de leur imminent DÉTAILS DU GRAND PORTRAIT d’Owen McCafferty, « chorégraphie endiablée de corps cognant aux portes de l’enfer ». Pour leur finale, ils avaient donc à « négocier » avec le grand texte d’un autre géant de l’écriture...


Ils ont tout donné pendant les quelques deux heures 45 que dure cette magistrale rencontre. Truffée de rebondissements, cette histoire de folies, d’amour, de cruauté, nous a donné une autre leçon d’humanité. Je ne raconterai pas les six actes, vous les connaissez probablement, mais résumons: 

sur cette terre inondée de soleil et de vents, il y aura toujours des maisons, du pain, des parents, des enfants, des unions, des séparations et des reconstitutions; et comme arrière-plan, sous le règne de l’hypocrisie des rois, la trame douce-amère de la paix et de la guerre. Et de la bonté, celle qui refait toujours surface…à un moment donné…



Merci à vous, jeunes artisans et artisanes de la scène de Québec, de nous avoir autant investis de vos talents indéniables. Vous teniez tous et toutes des premiers et seconds rôles, aussi importants les uns que les autres, les rois comme les valets, les femmes en hommes et les hommes en femmes, du UN POUR TOUS, TOUS POUR UN, une solidarité exemplaire. J’en suis maintenant persuadée à 100 %, ce talent il vous conduira LÀ où vous voulez bien aller l’exploiter et que ce soit au théâtre, au cinéma, à la télévision, en vidéo, derrière, devant ou sur le côté de la scène, vos regards ardents, entremêlés à vos voix tirant le Spectateur à bout portant, nous emmèneront toujours LÀ où vous l’aurez bien voulu…

depuis les berceaux et les tombeaux,
dans les brasiers comme sur les flots,
en-dessous de la peau et des os,
avec vos tréteaux et chapiteaux

elquidam

De haut en bas et de gauche à droite **
(via la page facebook du Conservatoire)

Steven Lee Potvin, Pierre-Luc Désilets, David Mendoza Hélaine, Dayne Simard, Olivier Arteau-Gauthier, David Biron, Joëlle Déry, Nathalie Séguin, Pier-Olivier Cauchon, Ariane Bellavance-Fafard, Magali Delorme, Claudelle Houde-Labrecque, Stéphanie Jolicoeur, Gabrielle Ferron, Jean-Philippe Côté et Lauren Hartley


Les concepteurs ont créé un véritable tourbillon de turbulences *, nous étions en pleine révolution du Caucase et donc en costumes d’époque. Drôles et colorés, ils ont apporté ce complément essentiel à l’œil. Avec la panoplie d’accessoires, perruques et barbes en tout genre, le décor transformable à souhait a servi admirablement l’histoire de l’auteur de L’OPÉRA DE QUAT’SOUS. D’ailleurs, on a pu apercevoir un certain Mackie le surineur, alias Jean-Sébastien Ouellette qui, dans ses temps libres, fait partie du corps professoral du Conservatoire

Pier-Olivier Cauchon: accessoires
Magali Delorme: affiche/éclairages
Claudelle Houde-Labrecque: décor
David Mendoza-Hélaine: costumes









·       













mardi 10 mai 2016

L’ORANGERAIE: l’odeur du pressentiment






Q : Pouvez-vous citer une chose que le théâtre vous a enseignée ?

R : Le collectif. On ne peut pas faire de théâtre tout seul. C’est une équipe. Il faut un texte, oui, mais ça prend des concepteurs, des producteurs, ça prend un lieu et ça prend des spectateurs. C’est un art du collectif et c’est dans le moment présent. Ça se passe là, MAINTENANT.

Geneviève Bouchard et Larry Tremblay
Mardi, 26 avril 2016
LE SOLEIL *





Sur la blessure de tes meilleurs souvenirs.
au cœur du plus grave de tes désastres,
le sang frais d’un jeune miraculé
qui nage entre le feu et l’eau

La foudre sèche,
avec les étoiles et le soleil,
firent que sa nuit se souleva

elquidam






L’ORANGERAIE, un roman primé de Larry Tremblay, que j’ai lu peu après sa sortie en librairie, le 27 novembre 2014 plus précisément, m’avait bouleversée par la poésie alarmante des jeunes sacrifiés, ceux que l’on envoie s’éclater dans les abattoirs nourris de froideurs et d’illusions cruelles.

D’avoir pu retrouver AMED et AZIZ ici ce soir, dans la salle  de l’Octave-Crémazie, m’aura, de la même manière que le livre l’a fait, plongée dans ce monde qui vit à l’autre bout du mien, cet univers insoumis qui vit en apnée dans les profondeurs de la vengeance...




Larry Tremblay possède une plume lourde de sens, incisive, un style qui lui est propre. Auteur maintes fois récompensé pour ses publications diversifiées: poésies, essais, romans, théâtres, entre autres son tourbillonnant ABRAHAM LINCOLN VA AU THÉÂTRE **, (également mis en scène par Claude Poissant), le mystérieux et chaotique L’ENFANT-MATIÈRE ***une dynamique de silence au cœur même de la langue, et l’intransigeante CANTATE DE GUERRE, qui plonge encore l'Enfant au cœur de l'histoire, c’est cependant par un roman, LE CHRIST OBÈSE, que j’ai découvert, en 2012, cette écriture de monde souterrain, comme je l'aime tant…




Je devinais la prodigieuse quantité d’énergie nécessaire pour demeurer soi-même, devinais qu’il suffisait d’un moment d’inattention, d’une faiblesse passagère pour glisser entre les fentes d’un autre que soi.

p.89




SING: il était une fois un jour | Un jour comme tous les autres | et ce jour-là je t’enlève à ta famille | Je te vole comme un paquet de viande | Voilà ça te suffit tu es content

Larry Tremblay
L’ENFANT-MATIÈRE


Larry Tremblay a eu le génie d’incruster dans son roman des extraits de CANTATE DE GUERRE ****, pièce de son cru créée à l’automne 2011 au THÉÂTRE D’AUJOURD’HUI, et pour laquelle je m’étais déplacée exceptionnellement hors des murs de Québec afin d'y voir jouer en live un certain bourreau rencontré un jour au Cinéma Cartier dans le superbe INCENDIE de Denis Villeneuve et Wajdi Mouawad. Il s'appelle Abdelghafour Elaaziz




Il a également joué dans BESBOUSS, AUTOPSIE D’UN RÉVOLTÉ, vu en mai 2014 au THÉÂTRE DE QUAT’SOUS. Il est sans contredit un acteur émouvant, franc et juste et l’on comprend aisément qu’il soit souvent choisi pour des pièces aussi dramatiques que CANTATE DE GUERRE et BESBOUSS, mais de le voir évoluer dans un rôle disons plus léger ajouterait certainement une autre corde…à sa harpe…

   



Éclatée par le gel


le temps d'une agression

le temps d'une vision

le temps d'une aversion



L’ORANGERAIE nous emmène dans un pays sans nom mais que nous devinons à l'odeur de son parfum de sang frais. Les personnages, rigides comme des statues de marbre, presque sans vie, émergent d’un océan de peur et d’obéissance suprême.




Depuis les éclairages d’une beauté surnaturelle, la musique les enveloppant, ils le seront jusqu’au bout. Tout en en conservant la nature même du pressentiment, Claude Poissant, le metteur en scène, m’a semblé agrandir le roman de Larry Tremblay. C’est l’art du collectif, comme le mentionne plus haut l’auteur.




AMED et AZIZ, jumeaux de corps et d’esprit, « évoluent » innocemment au milieu de cette famille quelque peu « élargie ». Ils partagent le plaisir d’ÊTRE ensemble et la crainte d’être séparés. Ils ont la mort comme compagnon de jeu imprévisible.




HALIM, un autre fils battu puis sacrifié au nom de cet ennemi innommable et pourtant si visible, dérange le cercle des combattants par son indifférence. KAMAR, son père, enrôlé lui aussi dans la danse des coups durs, peut-être parce que son fils possède un cœur d’artiste, craint SOULAYED, celui-là qui fait régner la terreur, ne comprenant pas ces états d’hommes-là.




ZAHED, le père des jumeaux, sous l’emprise du malhumain, entre dans le jeu du dieu du carnage, au détriment de TAMARA, son épousée, la mère qui tente, tant bien que mal, d’alléger la souffrance maternelle de voir disparaître l’une de ses deux progénitures.




MOUNIR, le grand-père, mort sous l’éclat d’une bombe ennemie, hante les lieux du théâtre de guerre tout le long que dure cette impitoyable histoire de « réparation ». Avec la voix fantôme de SHAHINA, sa tendre moitié pulvérisée en même temps que lui, les ondes de l'horreur percutent nos esprits devant l'immensité de ce mur d'incompréhension.



  
MIKAËL, le jeune professeur de théâtre, qui fait sortir le méchant de la vérité cachée dans la bouche de l’enfant Amed/Aziz par cette pièce dans la pièce, fera en partie que l’orage se calme, nous l'espérons, pour longtemps.




MANI, l’oncle américain, qui détient le secret du mensonge et de la vérité, qui apparaît tel un big brother sur le grand écran, apporte un certain soulagement à toute cette manigance que la violence engendre. Il était UN, et il était temps...qu'on l'entende enfin ! Mani Soleymanlou, si authentique et généreux, que nous irons revoir bientôt aux GROS BECS; il sera QUATRE, en compagnie de trois autres jeunes moineaux dont Jean-Moïse Martin, l'excellent interprète de Soulayed...Tellement hâte de voir ce « numéro-là » !



  
« La pièce se termine sur une note de paix avec une voix qui a sept ans, neuf ans, vingt ans, mille ans…Mais l’avons-nous véritablement bien entendue ? »

Larry Tremblay 
L'ORANGERAIE
la dernière page


-         Et l’enfant dans la pièce, a rétorqué Aziz ?
-         Ne crains rien, Sony ne mourra pas.

Page 138



LES COMÉDIENS, tous aussi éclatés et éclatants les uns que les autres, si intenses et tellement vrais, auront tout donné sur cette scène afin que les mots de l’auteur y prennent vie sous une autre forme que l’écrit. Le profil des cris mêlés au silence des non-dits, ont fait de ce moment de théâtre exceptionnellement enrichissant qu’on puisse nous-mêmes ressortir plus investis de cette paix tant souhaitée. C’est de là, je crois, que naît la toute-puissance affolante et apaisante du théâtre. 





LES COMÉDIENS

Gabriel Cloutier-Tremblay: AMED/AZIZ
Sébastien Tessier: AZIZ
Philippe Durocher: HALIM
Jack Robitaille: MOUNIR
Éva Daigle: TAMARA
Daniel Parent: ZAHED
Ariel Ifergan: KAMAL
Jean-Moïse Martin: SOULAYED
Mani Soleymanlou: MANI
Vincent Guillaume Otis: MIKAËL








L’Art remplace la terreur 

quand elle n’en crée pas…












Les superbes photos du spectacle sont celles de Stéphane Bourgeois






Histoire de se mettre dans le mood oriental de L'ORANGERAIE, nous avions choisi LES DÉLICES D'ARIANA pour ouvrir davantage notre appétit à cette culture afghane qui vit là-bas...et ici...juste à côté de nos cœurs... L'excellente entrée pour deux, complétée par l'assiette kabouli au poulet, a fait de nous d'heureux rassasiés. Merci à toi cher A., inséparable compagnon, d'avoir eu le flair de me le proposer et BONNE FÊTE encore ! On se revoit jeudi pour aller faire un tour dans le Caucase...




Et pour en ajouter dans le coin des énigmatiques et  surprenantes coïncidences, cette magnifique interprétation d’ANOTHER BRICK IN THE WALL par BIZIMKILER 3.0, qu’Abdelghafour avait posté sur sa page facebook le 3 mai, veille de la représentation. Merci pour cette autre belle découverte musicale.





La boucle est maintenant bouclée, mais surtout, n’attachez plus vos ceintures et détachez vos tuques, c'est le printemps...presque partout...



L'envie de prier 
n'a rien à voir avec la foi

Cioran


lundi 2 mai 2016

QUI A PEUR DE VIRGINIA WOOLF ? : la mer à boire






Entre la lumière du jeu et le sofa au milieu,
des bouteilles pleines et des verres vides,
et la nuit, qui ne se reposera donc jamais...


***

Georges et Martha ivres jusqu’au petit matin,
c’est la nausée noyée dans leur gris chagrin;
leurs cœurs bittersweet dans la maison hantée
par un fils qui n’existe que dans leurs pensées

Quelque chose de malsain se dessine sur le mur
une ombre de chaire fourrée de solitude
une claque sur la gueule d’un loup de gouttière
un bouquet d’éreintements
une douche de bêtises
une clameur
une hantise

Entre les jeunes bras du beau Nick
et le sang chaud de l’alcool mal-aidant,
le ventre vide de Honey qui se gonfle
et celui de Martha qui se déboutonne...

Le cœur viré tout à l’envers,
les yeux rivés sur le beau noir,
Martha veille à son grain de folie
un autre verre à la main,
ses doigts louchent vers le bar

Et les heures passent…

Le carillon résonne
la porte s’ouvre
le décor s’enflamme
les jupons dépassent

Le temps se découd des fenêtres ouvertes,
le temps fuit dans le repli des cuisses BB-Q
et dans la braguette d’un pantalon à passants  

La jument de la nuit s’agite avec un paon,
elle le prend malgré lui pour un étalon;
et s’il n’est pas vrai que tout est faux,
les petites ailes cruelles des jeunes oies blanches
n’égaleront jamais l'appétit sexuel de l’Expérience

L’histoire finit souvent par où elle commence,
par un début qui n’a pas véritablement de fin.

elquidam





« Et là, mon petit bébé, ce merveilleux texte qui était dans mes cartons, commence à prendre vie à travers l’âme, l’émotivité et la créativité de plusieurs artistes. »

Jacques Leblanc
Programme de la soirée



Hugues Frenette, LE choix ultime de Jacques Leblanc pour sa dernière fournée en tant que directeur artistique à LA BORDÉE, a mis en scène ce texte puissant d’Edward Albee. Il a réussi son mandat qui aura été celui de nous immerger complètement dans ce bain de boue thérapeutique rempli de sarcasmes et d’amertume. Une pure réjouissance que d’avoir été plongés au cœur de l’Amérique du Mort pendant les quelques deux heures et demies que dure ce morceau d’anthologie du théâtre des années soixante. 




Avec des dialogues à couper le souffle, autant celui des acteurs que des spectateurs, en plus de celui des couteaux qui volent plus bas que haut, on peut dire qu’il était grand temps que cette tempête de sensations fortes finisse par venir calmer nos attentes envers ce chef-d’œuvre toujours d’actualité. Edward Albeené un 12 mars, tout comme un autre célèbre auteur, Jack Kerouac, pour ne pas le nommer, sans oublier un certain Mortifer, auteur moins connu mais tout aussi prolifique, a frappé dans le mille et une nuits avec cette pièce qui a fait sa renommée. Le voici d'ailleurs dans ces années-là, dans son bureau de Greenwich Village... 


1963


Je me souviens de cette adaptation cinématographique de Mike Nichols, avec Elizabeth Taylor et Richard Burton que j'ai vue il y a... longtemps...


What a dump !





Lorraine Côté, qui interprète divinement SA Martha, montait sur scène ce soir pour la 3000 ème fois, c’est elle-même qui nous l’a annoncé à la fin de cette autre magistrale performance. Elle a sacré, crié, chialé, avec toute la vigueur et la rigueur que ce grand rôle exige; elle s'est déshabillée, autant physiquement que moralement, tout cela avec une telle fluidité qu'on l'enviait presque d'être aussi elle devant lui... 




Les applaudissements ont à nouveau retenti dans une BORDÉE renversée d’émotions de toutes sortes. Ne manquait plus que des fleurs et une flûte de champagne pour cette reine du foyer pas tout à fait comme les autres, mais bon, comme Martha le dit si bien: PARTY ! 





Normand Bissonnette, le beau Georges, qui était tout aussi excellent en attaques verbales que sa chère épouse, a fait mouche encore une fois. Notre plaisir à le voir autant se faire maltraiter qu’aguicher par sa peste de femme, parce qu’il en faisait de même envers elle, a donné lieu à quelques répliques sismiques dignes d’un 9,0.




L’alcool lui permet autant d’exulter que de se désoler; son couple avec Martha, qui bat de l'aile la nuit, mais qui s'en accommode tant bien que mal le jour, est tout de même assorti. Et cette tempête dans un verre de scotch, de gin ou de vodka, ne leur fera jamais mettre de l’eau dans leur vin, à tout le moins ces quelques larmes salées pour leurs glaçons de frissons garantis...


Martha my dear 
you have always been my inspiration
Please
Be good to me Martha my love
Don’T forget me Martha my dear



André Robillard, le séduisant Nick, comme un jeune matelot qui se fait monter facilement sur le bateau ivre d’une maîtresse en guerre contre son port d’attache, qui se sort tout de même assez bien de cette souricière...aux yeux rouges. Plus la pièce avance et plus on fait le rapprochement entre lui et George; ils sont l’un et l’autre et l’un dans l’autre, comme une espère de copié-collé. Peut-être ne sont-ils en fait qu’une seule et même personne, c’est là tout le mystère et la beauté de cette autre big bad american story. Le constat de son immense talent ne fait qu'augmenter, à le voir aller, on dirait un Hugues Frenette à ses débuts, et c'est tout à son honneur...




Élodie Grenier, la jeune épouse de Nick, nous fait plus sourire que rager. Au contraire des trois autres, elle est très naïve, mais l’est-elle vraiment ? Elle essaie d’entrer dans le jeu des grandes personnes et l’on ressent très bien les différents malaises qui l’assaillent lorsqu'elle déraille elle aussi devant SA situation. Dans ce jeu perpétuel et obsessionnel du chat et de la souris, il n’y a pas vraiment de gagnants, que des loosers en répétition « d’insistance » de divorce ou plutôt « d'absence d'alternative »... et en particulier ces jours-ci...;-)




Hugues Frenette nous a donné ce soir, par son talent indéniable de metteur en scène, un autre de ces cadeaux inestimables que LA BORDÉE nous offre depuis bientôt quarante ans. La scénographie, de même que les éclairages, ont joué un rôle important, parce que c'est souvent le simple rayon d'un spot blanc sur un visage pâle en feu, lors d'une scène intense, que s'imprégnera l'âme de la pièce dans votre mémoire pour le restant de vos jours. Merci à Michel Tremblay, le seul et unique, qui a traduit cette prodigieuse histoire…à ne pas dormir debout dans la Nouvelle Carthage *






Éventuelle apocalypse pour cœurs en fusion ?
Reddition partielle jusqu'à la prochaine bataille ?
QUI A PEUR DU GRAND MÉCHANT LOUP ?
Sûrement pas Georges et encore moins Martha...

Assis collés/collants sur leur canapé RELAXONS;
comme deux enfants épris, main dans la main,
ils se consolent, se désolent, et boivent un coup...





Pour se souvenir de cette soirée exceptionnelle dans laquelle Lorraine Côté jouait pour la 3000ème fois, voici un extrait via LA FABRIQUE CULTURELLE suivi d'une chanson de Billie Holliday, une autre femme qui sort de l'ordinaire...




Les photos de cette pièce mémorable sont de Nicola Frank Vachon.


 ALL OF...HER










UN PETIT CADEAU POUR GEORGES, MARTHA, NICK ET HONEY: