ENTRE
L’EXCÈS ET LE NÉANT
VIVRE
L’IMPOSSIBLE OU MOURIR
Nelly Arcan
PUTAIN
Finalement, Martine m'apprend que le blogue de Nelly Arcan (www.20six.fr/nellyarcan) était un canular de l'écrivain Patrick Brisebois. Et qui me dit que c'est un écrivain qui se cache derrière cette blague devenue blogue ? Ce pourrait très bien être Thierry Ardisson ou le fantôme de Jacques Villeret. Qui croire désormais si même Nelly est factice ?
"Suicidez-vous":
ainsi s’amorce TRÉPANÉS dans sa première édition. Et même si Patrick Brisebois se défend d’avoir voulu provoquer,
dans une scène du roman qui se déroule au Festival international de la poésie
de Trois-Rivières, l’auteur nomme quelques écrivains connus et reconnus, les
met en scène d’une façon peu flatteuse. "À l’époque, j’avais des comptes à
régler avec le milieu poétique. Mes recueils avaient tous été refusés et
j’avais le goût de me venger. Ce que j’ai écrit est blessant, un peu comme un
sketch de RBO qui traite une chanteuse de grosse… Je m’en rends compte
aujourd’hui. Je me cachais dans les salons du livre! Et pour ce qui est de mon
personnage complètement evil qui lance un appel au suicide, j’ai un
ami qui s’est tué, et la mort de Nelly Arcan m’a bouleversé… Dans la dernière
édition, j’ai supprimé ce qui ne servait pas l’histoire."
Vendredi 2
juin 2017
Bonsoir L.
C'était
une soirée très solennelle, triste aussi.
Nous
étions sur nos gardes tout le long.
Les
comédiennes étaient imprégnées de l'âme
de
Nelly, Evelyne de la Chenelière et Christine Beaulieu
d'après
moi étaient plus-que-parfaites.
Et j'ai
découvert en Nelly Arcan une écrivaine, une vraie.
Je n'avais
lu aucun de ces textes. Disons que j'ai été
admirablement
étonnée de tant de beauté féroce
comme
disait VLB. A. a aimé la scénographie (moi aussi)
et la
musique: sublime ! Un ravissement de spleen...
"un petit bout d'orage à l'horizon"
PARADIS, CLEF EN MAIN et PUTAIN ont fait leur entrée dans ma bibliothèque après l’unique représentation de cette prodigieuse mise en scène de Marie Brassard. Chacun des tableaux nous révèle une Nelly Arcan comme elle s’est décrite dans ses publications et c’est tout à l’honneur des sept femmes qui l’ont personnifiée avec grâce, intelligence et stupeur. Les extraits de PUTAIN, FOLLE et L’ENFANT DANS LE MIROIR, judicieusement choisis pour cette rencontre post-mortem d’une auteure qui aura laissé sa marque dans l’espace littéraire d’un Québec qui me donne encore l’impression qu’il se cherche.
LES TABLEAUX
LE CHANT
PERDU, Anne Thériault
LE CHANT DES
MIRAGES, Sophie Cadieux
LE CHANT
OCCULTE, Christine Beaulieu
LE CHANT DE
L’ÉTHER, Julie Le Breton
LE CHANT DU
SANG, Johanne Haberlin
LE CHANT DE
L’OMBRE, Evelyne de la Chenelière
LE CHANT DES
SERPENTS, Larissa Corriveau
Parce que la
vie n’est qu’un infime fragment de ce qui vient après elle. Parce que les
femmes qui la chantent se trouvent cloîtrées dans la même pièce. Parce que
leurs frasques en même temps que leurs peurs ne forment qu’une seule et unique
auteure. Parce qu’il existe de jour comme de nuit dans leurs têtes à queues de
sombres rideaux rouges, de la lumière laide et des lampées de dèche défraîchie.
Parce que le corps s'est dévissé de l’âme. Parce que le lit est toujours défait. Parce
que les pères attendent la fin du monde. Parce que les mères sommeillent au
bois dormant…
DÉSORMAIS ET DEPUIS
Nelly Arcan, juste avant Reinaldo Arenas, maintenant dans ma bibliothèque. Arenas, un autre qui s'est enlevé la vie d'une façon tout aussi dramatique. Comme Marilyn Monroe, décédée elle aussi à l'âge de 36 ans...
Nelly Arcan, juste avant Reinaldo Arenas, maintenant dans ma bibliothèque. Arenas, un autre qui s'est enlevé la vie d'une façon tout aussi dramatique. Comme Marilyn Monroe, décédée elle aussi à l'âge de 36 ans...
FRAGMENTS
Poems, Intimate Notes, Letters
Nelly Arcan
LA FUREUR DE CE QUE JE PENSE
CRÉDITS
Comédiennes: Christine Beaulieu, Sophie Cadieux, Larissa Corriveau,
Evelyne de la Chenelière, Johanne Haberlin, Julie Le Breton, Anne Thériault
Collaboration à l’adaptation et dramaturgie : Daniel Canty
Scénographie et accessoires : Antonin Sorel
Assistance aux accessoires : Alex Hercule Desjardins
Lumières : Mikko Hynninen
Musique : Alexander MacSween
Son : Frédéric Auger
Costumes : Catherine Chagnon
Assistant aux costumes : Éric Poirier
Maquillages : Jacques-Lee Pelletier
Coiffures : Patrick G. Nadeau
Direction de production : Anne McDougall
Direction technique décor : Jean-François Landry
Direction technique : Matéo Thébaudeau
Agent de tournée : Menno Plukker Theatre Agent Inc (menno@mennoplukker.com)
Production : Infrarouge
Coproduction: Théâtre français du Centre national des arts du Canada (Ottawa), Festival TransAmériques (Montréal), PARCO (Tokyo)
Collaboration à l’adaptation et dramaturgie : Daniel Canty
Scénographie et accessoires : Antonin Sorel
Assistance aux accessoires : Alex Hercule Desjardins
Lumières : Mikko Hynninen
Musique : Alexander MacSween
Son : Frédéric Auger
Costumes : Catherine Chagnon
Assistant aux costumes : Éric Poirier
Maquillages : Jacques-Lee Pelletier
Coiffures : Patrick G. Nadeau
Direction de production : Anne McDougall
Direction technique décor : Jean-François Landry
Direction technique : Matéo Thébaudeau
Agent de tournée : Menno Plukker Theatre Agent Inc (menno@mennoplukker.com)
Production : Infrarouge
Coproduction: Théâtre français du Centre national des arts du Canada (Ottawa), Festival TransAmériques (Montréal), PARCO (Tokyo)
LA METTEURE EN SCÈNE
Loving can heal, loving can mend your soul
And it's the only thing that I know, know
And it's the only thing that I know, know
I swear it will get easier,
Remember that with every piece of you
Hm, and it's the only thing we take with us when we die
Extraits de
PUTAIN
entre une
mère qui dort
et un père
qui attend la fin du monde
entre la
race des sorcières aveugles
et des
belles-mères jalouses
MIROIR
MIROIR MIROIR
dis-moi qui
est la plus belle ?
Photo: Guillaume Simoneau
Un petit
bout d’orage à l’horizon
Un gilet
trop jaune
Une
schtroumpfette noyée dans la glace
La misère
des hommes à aimer les femmes
Et le rôle
qu’on joue dans cette misère
Le pommier dans ma cour le 31 mai 2017
Photo: L.Langlois
Je ne veux
pas de cette vie garnie d’horaires, de levers et de couchers entre lesquels on
se répand en gestes répétés, en rendez-vous d’affaires, je ne veux pas de la
vie que tous vivent sans accroc ou presque, une petite crise dans la
quarantaine, un divorce et une hypothèque, les menues contrariétés qui tissent
le quotidien...
La femme de LOTH
À force
d’être une statue de sel à la mémoire d’un dieu qui a depuis longtemps perdu la
mémoire d’elle-même si vous ne voulez pas en
entendre parler, je dévoilerai mes coutures de poupée qu’on a jetée en
bas du lit même si ce n’est pas le moment, je me tuerai devant vous au bout
d’une corde, je ferai de ma mort une affiche qui se multipliera sur les murs,
je mourrai comme on meurt au théâtre, dans le fracas des tollés…
Et si je
veux me pendre c’est pour qu’on me porte, pour ne plus avoir à mettre le pied à
terre et m’abandonner à ma lourdeur de chienne tenue en laisse Jusque dans
le piétinement de la pensée…Il faut
voyez-vous réinventer la vie pour en savoir quelque chose...
Et sur ces
photos de jeunesse on voit bien que ma
mère était jolie. Il faut dire qu’on est toujours plus beau en noir et blanc,
la peau devient claire et lisse, les rougeurs disparaissent et bien davantage,
on y est plus jeune aussi, au moins dix ans de moins…Ces rides
qui auront plus de vie que toutes mes années de jeunesse...On finit
tous par mourir de la discordance de nos amours...Je m’appelle
Cynthia et vous le savez déjà, ce nom n’est pas vrai mais c’est le mien, c’est
mon nom de putain, le nom d’une sœur morte qu’il m’a fallu remplacer...
Et désormais
on sait trop bien ce qui ne nous attend pas, on sait le vide de ce qui manque
et le compromis des choses qui sont...L’écriture
est un principe de mort...Et désormais
il n’y a de vie que dans le microcosme des cafards qui grandissent quelque part
dans la moiteur des murs...Voyez-vous
il faudrait que je soumette le monde à mon désordre pour en savoir quelque
chose...Il faudrait
refuser tout homme qui ne nous aimerait pas d’un même amour...Je pense au
prochain texte à écrire pour mes cours de littérature, à Antonin Artaud qui
souffrant de voir les femmes enceintes, qui mourait de figurer ces enfants à
naître parmi ceux qui sont déjà en trop…
Moi et mes
chaussettes blanches qui montaient jusqu’aux genoux et ma jupe à carreaux les
petits souliers vernis et tout le reste…Et à bien y
penser je suis devenue anorexique le jour où mon sexe est venu à bout de mes
nattes et de mes souliers vernis, des jeux de marelle et des prières du soir…Ce qui me
tue m’attendait bien avant que je naisse…Il y a trop
de dos pour que j’arrive à croire que c’est ça la vie, un long monologue de
pieds qui tambourinent sur ce qui n’a pas été fait...
La science du cœur
est un objet d'abstraction propulsée
Par la volonté qu'ont les gens tristes,
à se laisser toucher
Extraits de PARADIS,
CLEF EN MAIN
Ainsi sont
la plupart des suicidaires, bouffés par l’urgence de s’en aller loin des
autres, de prendre la porte du monde; réduits à leur petite personne détestée,
penchés sur leur grande noirceur. Ainsi sont les suicidaires : incapables
d’esprit d’équipe ni de retenue, d’économie, toujours à la recherche de
l’éclatement physique dans la solitude de leur tourmente...
Rue Saint-Joseph
Photo: L.Langlois
À mon avis,
la femme, en représentation ou non, en chair ou en plâtre, et même s’il s’agit
d’une sainte et que cette sainte-là est la mère de Dieu, n’a pas encore, dans
les organisations cléricales actuelles, le pouvoir politique pour diriger les
troupeaux de brebis égarées…Toutes les
poupées que j’ai eues, et j’en ai eu beaucoup, étaient des cadeaux à mon image
de ma mère qui en faisait collection, et elles n’ont été que des petits
cadavres distrayants, éducatifs, de la viande morte en plastique...
BARBIES DANS LE VINAIGRE
(format de voyage)
1999
Gabriel Lalonde
« Une
fois que la force des autres commence à
prendre de l’expansion, les écrasés commencent du même coup à mourir...Le désir de
mourir, du moins, commence à germer, à fleurir. Jusqu’à tout recouvrir...
(L’oncle
Léon)
LE BOUTON
ROUGE
Le bouclier
de la colère
Le caniche
blanc,
Immaculé et
frisé,
Haïssable
Le caniche
blanc
Le chien de
la mort,
Venait me
visiter une dernière fois
C’était
l’oreille qu’on m’offrait
Pour
entendre mes dernières paroles
La fin du
monde arrive et le citronnier,
ingrat, indifférent dans sa majesté,
se gorge de
citrons
qui se dénombrent par dizaines.
Il se fiche de nous, de la fin,
il
poursuivra son œuvre végétale
en dépit de la disparition
de la main qui le
nourrit..
Citronnier Meyer