vendredi 22 février 2013

FRANKENSTEIN: La quête


 
Étienne Pilon, la Créature
Photo: Vincent Champoux

Daniel Bamdad, mannequin
collection Philippe Plein, automne



Le Feu, rage de petite étincelle, observe l'eau des souterrains. Il est agité, il voudrait remonter à la surface, se rouler dans l'herbe, partir en fumée, disparaître. Mais il couve sous terre, il attend la foudre des armes aux côtés de ses racines brûlées. Il faut ou il ne faut pas: le présent c'est toujours aussi embarrassant. Mais un jour, il le faudra. Il le faudra bien. Partir. S'éloigner du soi/moi. Du sous-sol des pauvres rats. Envisager le détournement majeur. Virer boutte pour boutte. Traverser le cul-de-sac des calamités. Fleurir le Néant. Déterrer le Miracle. Aboutir.



Frontispice de l'édition de 1831



Le 31 janvier dernier, dans la salle Octave-Crémazie du GTQ, nous avions rendez-vous avec une époque qui ne nous a pas semblée si lointaine que ça: 1818. Il y aura donc bientôt deux cents ans que la jeune Mary Shelley imagina cette histoire de science-fiction qui n'en finit plus de se métamorphoser au gré des saisons. Une histoire qui s'apparente drôlement à ce que l'humanité actuelle traverse comme évolution scientifique dans un contexte de pessimisme politique rempli de malversations et de corruptions de tout genre. Le FRANKENSTEIN de Nick Dear, qui donne la parole à la Créature, fait réfléchir la plupart de celles que nous sommes devenues.

Entre le bien et le mal, le feu et la glace, l'acier et la forêt, les hommes et les bêtes, nous avons fait connaissance d'un monde peuplé de terrassés/terrassants, dominé par des dominants, instruit par des éduqués, oppressé par des tyrans, soigné par des charlatans, payé pour être mal-entendants, aveuglé par le bleu du firmament. Ce monde fait de faux-semblant, qui remplit de botox les rides du Temps, qui charcute et vide le ventre des petits enfants, qui court après ses tripes au vent, qui illumine les ténèbres, qui embrase la terre, qui couche avec les vers, qui meurt sous la mer...

La mise en scène de Jean Leclerc nous a promenés dans les environs nébuleux de cette race de monde qui n'en finit plus d'exister pour essayer d'être. Certaines scènes éblouissantes, dignes de Broadway, nous en ont mis plein la vue, d'autres plus épurées ont révélé le talent indéniable des interprètes. L'alternance des rôles a fait d'Étienne Pilon qu'il fût notre Créature ce soir-là. Christian Michaud lui donnait donc la réplique en tant que docteur Victor Frankenstein. Un excellent duel d'acteurs. Le reste de la distribution, composé de mesdames Catherine Hugues, Linda Laplante, Éva Saïda, Danièle Belley, Meggie Proulx Lapierre et de messieurs Jean-Jacqui Boutet, Pierre ChagnonPierre Colin, Eliot Laprise et Nicola-Frank Vachon a donné la pleine mesure à ce spectacle que nous ne sommes pas prêts d'oublier.



La co-population dans le ventre des cœurs brisés/la banquise au nord des sentiments/les bras forts autour des doutes de l’amour/les restants de vent étreignant les feux roulants/L’air de rien de la terre sous le blues des nuits sans fin...
FRANKENSTEIN


TEXTE: Nick Dear d'après le roman de Mary Shelley
TRADUCTION: Maryse Warda
MISE EN SCÈNE: Jean Leclerc
SCÉNOGRAPHIE: Michel Gauthier
COSTUMES: Luce Pelletier
ÉCLAIRAGES: Sonoyo Nishikawa
MUSIQUE: Paul Baillargeon et les Frères Grands
CHORÉGRAPHIES: Lydia Wagerer
VIDÉO: David Leclerc
MAQUILLAGES ET EFFETS SPÉCIAUX: Élène Pearson


Photos du spectacle:
http://www.flickr.com/photos/letheatredutrident/sets/72157632553877722/




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