Photo: LE SOLEIL
« Le monde est plein de gens qui méprisent ce qu'ils ne peuvent imaginer. »
Renée, marquise de Sade
1772, nous sommes à l’aube de la Révolution Française. La présence de six femmes pour un homme absent. Une scène vêtue de ses plus somptueux atours. Du noir et du rouge. Des comédiennes cousues sur mesure pour incarner les sentiments doux-amers qui animèrent les longues nuits comme les jours écourtés de leur Donatien Alphonse François, marquis de Sade.
Martine Beaulne résume sa mise en scène de
la façon suivante : « Personnage controversé, le Marquis de Sade, est
l'incarnation de “l'anarchiste absolu” [...]. Au plan politique, il propose
plein de choses intéressantes et fait peur à l'ordre établi. [...] Madame de
Sade vient nous raconter une partie de la vie de son mari emprisonné depuis
plusieurs années. Fidélité, politique, perversité, hypocrisie et amour se
confrontent dans ce grand cérémonial brillamment écrit par Yukio Mishima. [...]
Cette œuvre nous questionne aussi sur le sens de la liberté, sur l’affranchissement
d’un peuple et la situation des femmes. Elle met en lumière tout l’univers
secret de nos fantasmes sexuels [...] tout en projetant subtilement le
déchirement de l’auteur envers l’ouverture du Japon au monde occidental et son
profond attachement [...] au Japon traditionnel. »
15 mars 2012
SADE N’EST PAS FOU
MAIS REND FOU
MAIS REND FOU
C'est sans doute à cause de Yukio Mishima que son MADAME DE SADE m'a ramenée tout droit au CINQ JOURS EN MARS * de Toshiki Okada, jeune auteur/metteur en scène venu lui aussi du Japon. La pièce, jouée entièrement en japonais, avec sous-titres français, m'avait beaucoup plue. (Pas comme le reste de l'assistance). C'était en juin dernier, dans le cadre du Carrefour International de Théâtre.
La jeunesse débridée, désenchantée, branchée, qui se terre et se love dans le quartier de Shibuya. L'éternelle jeunesse, en partie semblable à celle qui s'est vécue au Château Lacoste. Des histoires qui n’ont jamais vraiment
cessé de se répéter à travers les siècles des siècles. Le Japon, pays du soleil levant, avec ses robots et ses love hotels, à des années lumières de nous. La France, pré-révolutionnaire, au coeur du Japon pré-suicidaire de
Mishima. Entre une nuit de longs couteaux bien affûtés
à travers la chair de l’écrivain et une averse de sang pour la vallée de la mort et ses lents sévices: Sade revisité par ses femmes via le plus illustre des
écrivains japonais.
MADAME DE SADE ... une fugue salée dans le repli de la cuisse Justine/Renée, un coup de crème fouettée de la
comtesse de Saint-Fond, une rasade d’écailles de rose cendré au cœur du
châtiment. Du noir, du blanc, du rouge, du sang. De l’écho coupant dans la prison des peaux
hachées. Le rythme lent de l’enfermement. Le début de la Révolution. Le
brûlement des gorges chaudes. Une mouche de moutarde sur la bouche de la
liberté. Une mouche espagnole invitée dans les draps de la sainteté. De la douleur instantanée. De
la fièvre jaune. Du délire dans la vérité. Du dérangement dans la communauté...
La plupart des spectateurs du Trident sont demeurés bien assis sur leurs sièges éjectables,
ils n'étaient vraisemblablement pas préparés à recevoir la fessée de mots que
Mishima avait fait éclore en 1965. Des mots quelque peu crus et juteux, qui ont fait ressurgir le fantôme du
gardien des clefs, le marquis qui, ma foi, n'a encore pris aucune ride...
Il est parfois dommage que les " abonnés " du Trident ne soient pas au rendez-vous avec des productions qui voudraient les faire entrer dans des forêts encore vierges. Dommage pour les artistes qui ont travaillé d'arrache-coeur et qui n'ont pas reçu les applaudissements qu'ils méritaient. Je leur dis à tous et toutes bravo pour leur audace. Et surtout merci à vous mesdames les comédiennes, vous étiez tout simplement superbes dans vos répliques...ainsi que dans vos splendides costumes. Ce fût un plaisir d'être là, en votre si précieuse compagnie.
DONATIEN, C'EST VOUS !
Il faut de la colère !
Il faut de la grandeur !
Il faut de l’efficience !
Mais la soif la plus belle
Est celle de poésie.
Domitien d’Olmansay
in
LE ROSE ENFER DES
ANIMAUX
de Claude Gauvreau
Justine ou les malheurs de la vertu
Yukio Mishima
Une visite au CHÂTEAU LACOSTE
Le portrait
imaginaire
Man Ray (1938)
Man Ray (1938)
Sade meurt en
1814. Quelques années auparavant, il avait demandé dans son testament à être
enterré dans un bois de sa terre de la Malmaison, près d'Épernon :
« ...La fosse une fois
recouverte, il sera semé dessus des glands, afin que par la suite le terrain de
ladite fosse se trouvant regarni, et le taillis se retrouvant fourré comme il
l'était auparavant, les traces de ma tombe disparaissent de dessus la surface
de la terre, comme je me flatte que ma mémoire s'effacera de l'esprit des
hommes. »
Marquis de
Sade
Sa terre de la
Malmaison étant vendue, il est enterré dans le cimetière de la maison de
Charenton. La fosse est recouverte d’une pierre sur laquelle aucun nom n'est
gravé.
* Extrait CINQ JOURS EN MARS
* Extrait CINQ JOURS EN MARS
« DONATIEN, C’EST MOI ! »
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