Je suis
encore un oiseau de nuit.
Je dois être
née la nuit.
Mme G
Notre
paradis est BIEN meilleur.
Nous avons une usine d’effeuilleurs/d’effeuilleuses ET
un volcan de bière.
Nous avons une usine d’effeuilleurs/d’effeuilleuses ET
un volcan de bière.
Jeudi 21
avril, 17 heures, il fait plein soleil, c’est la première vraie belle soirée qui ressemble
à l’été qui s’en vient. Sur l’avenue Cartier, les terrasses sont bondées de
bonne humeur et de fébrilité. On descend les marches du RIDEAU ROUGE pour y
apercevoir des ballons multicolores, alors on rebrousse chemin, craignant de se
faire enterrer par les fêtards. On opte plutôt pour la tranquillité du Café Krieghoff, là où nous
aimons bien nous réfugier lorsque le mercure tombe sous zéro...
Y’a pas
grand monde en dedans et le service est lent, mais bof on en profite pour
faire nos mises à jour. Nos plats seront servis vers 19 heures et comme la
pièce est à 20 heures, disons que mon croissant au jambon et la moussaka d'A. se sont
faits avalés style assez fast food...
On a bien sûr parlé de Prince Nelson, qui est mort aujourd'hui à 57 ans, seul dans son palace, probablement d’une overdose de quelque chose d'illicite, ou d'explicite, et de la reine Elisabeth II, qui fêtait ses 90 ans bien sonnés entourée de toute sa famille de princes et de princesses. Mais ce soir, c’était soir de presque pleine lune et nous allions rencontrer une certaine Mme G, reine du quartier Montcalm...
Une clope
pour A. et une palette mr big pour moi, donc un arrêt pressant au dépanneur du coin, celui de Crémazie et
Cartier. Cartier, cette avenue qui fait qu’éclate une capsule de petits bonheurs sous chacun de nos pas précieux qui glissent sur elle. Cartier, l’une des plus typiques de Québec, née dans le
quartier Montcalm, celui dans lequel a navigué contre vents et marées la Grande
Hermine de la mythique Mme G…
Madame Thérèse
alias MME G
alias MME G
Ça faisait
longtemps que je voulais rencontrer cette légende des longues nuits de Québec,
cette femme qui m’a fait beaucoup penser à ma Mémère C., peut-être à cause du piano que
mon père lui avait acheté pour un gros 25 piastres...
Barbara
« touche pas mes théâtres »
« touche pas mes théâtres »
...et pour les cartes à jouer toute la nuit sur la table de sa cuisine en-dessous de la lumière agreste du tube néon, pour la TV 20 pouces noir et blanc dans le coin du salon entre les sofas défoncés et le buffet des années 40, et sûrement pour les innombrables paquets de Peter Jackson qu'elle a fumés jusqu'à ses 80 ans...
fume fume fume
fais de la fumée
sur tout ça
sur tout ça
...et pour la dizaine de caisses de 24 empilées sur sa galerie de planches, pour la vie de garçon dans l’fond d’un flacon, pour les chansons à répondre des mononk chauds, pour les romans feuilletons des filles pas toujours faciles, pour les chiens pas de médailles et les chattes en chaleur, tous et toutes fidèles à cette grande dame qui n’en finira jamais d’habiter les souvenirs marquants de notre jeunesse folle comme des balais...pis d'la marde...
Devant le buffet
(Dans la cuisine de Mémère C.)
Comme l’a
dit Mme G jeudi soir passé, c’était une belle vie, avec ses high et ses down,
avec sa Black ou sa Blue, sans fla-fla ni arrière-pensées, la nuitte à ON, le
jour à OFF, les culs par-dessus têtes, les doigts d’honneur pointés sur le tic-tac des coucous pourvoyeurs de Temps Perdu…
Mémère C. sur sa galerie vide
La bière en
après-midi
Fuck les
REER
Fuck les
CELI
Je t’aime à
la folie
Et vive le
tic tac tic tac
Redonne-moi
une shot de whisky
Je t’aime à
la folie
Et vive le
tic tac tic
Keith Kouna
TIC TAC
« Je ne sais
pas comment elle faisait pour accueillir chez elle des gens super maganés tous
les soirs, complètement saouls tout en restant super gentille, en trouvant le
moyen de jaser avec eux autres puis de les aider aussi. »
Élisabeth Paradis
C’est plutôt
après avoir lu cet article du Devoir que Mme G m’a fait le plus penser à Mémère
C., notre grand-mère maternelle qui nous a vu naître, grandir, louvoyer,
bummer, rire, souffrir, chanter ou ne rien dire. Elle avait le don de juger aucune des bêtises qui aurait pu faire de certains d’entre nous des
handicapés ou même des prisonniers. Elle avait la tolérance greffée à son
immense patience et au contraire de Mme G, elle n’avait pas tellement de
principes, mais elle croyait tout de même à cette Providence qui cognait à tous
les jours dans sa porte moustiquaire. Elle ne manquait jamais de RIEN parce qu’elle
n’a surtout jamais voulu de TOUT...
C’est ce que
la première pièce de Maxime Beauregard-Martin a suscité en moi comme émotions
aigres-douces; composée telle une sorte d’hymne à l’amour inconditionnel, cette
moyenne évasion dans le présent d’une grande dame de chez nous, qui a contourné
les lignes courbes de son passé garant de l’avenir, a fait naître une nouvelle hybride
pour un parterre qui je le crois n’a pas fini de se faire faire des fleurs par ce brillant auteur...
Maxime Beauregard-Martin
et Maryse Lapierre
Et qu’il interprète ici son propre rôle, soit celui d’un
jeune bachelier en communications, profil journalisme, doublé d’un diplôme en jeu
du Conservatoire d’art dramatique de Québec, ne peut mieux que stimuler son minutieux
travail d’orfèvre qui le fera sans nul doute progresser dans le milieu théâtral...
Son jeu d’acteur, tout aussi lumineux que le sont ses mots, m’a autant fasciné
que celui de TRICK OR TREAT et de MES ENFANTS N’ONT PAS PEUR DU
NOIR. Une vraie bête (noire) de scène…
Cette autre
colorée mise en scène de Maryse Lapierre, avec toutes ces petites lumières de
Noël qui se sont allumées dans ma tête les unes après les autres, un peu à la
manière de son si chaleureux L’HIVER DEDANS, a fait s’agrandir le paysage sonore de la voix de l’auteur...
Elle était d’ailleurs assistée par la magnifique Mary-Lee
Picknell qui, après nous avoir ensorcelés avec sa transcendante Madeleine dans
le fameux QUILLS de Robert Lepage et Jean-Pierre Cloutier en janvier dernier, a
de nouveau exercé son suprême envoûtement sur nous, spectateurs d’un PREMIER
ACTE rempli à ras bord pour cette représentation du jeudi 21 avril...
Marie-Ginette
Guay, qui faisait également partie de cette pièce de Maryse Lapierre, fût comme
toujours: époustouflante, touchante et criante de vérité, sans fausse
note. Valsant le texte de Maxime Beauregard-Martin, fait sur mesure pour elle,
il y avait comme de l'écho de Michel Tremblay là-dedans. La finale,
émotionnellement poignante, comme celle du CARDIGAN DE GLORIA ESTEBAN, nous a
transportés directement sur les planches de Broadway, son NEW-YORK
NEW-YORK à elle, prenant ici toute la saveur sucrée des bonbons acidulés du rêve américain…
Annabelle
Pelletier-Legros, particulièrement captivante dans la scène où elle joue
son propre rôle qui répète celui d’une alcoolo de 70 balais, « cliente » de Mme
G. Avec sa voix ravageuse, drôle à souhait, l’intensité avec laquelle elle
s’investit a de quoi faire divinement imaginer ces vieilles peaux de satin
fripé drapées de fourrures d’hermines qui ont hanté les pièces enfumées des
pianos bars à destins transpercés de rires et de chagrins et celles des clandestins
de demi-sous-sols, soûls terrains de la Ville endormie, parfois un peu trop tôt…
Patrick Ouellet, qui a relevé avec brio Israël Gamache, incarne avec rigueur les personnages de Daniel et Thierry. Daniel, fidèle gardien d’une Gisèle vieillissante, compagnon de travail de nuit, qui la protège de tout envahisseur gênant, qui ne s’en laisse imposer par personne ou quoi que ce soit...
Son Thierry, raide comme une barre de
métal, toujours prêt pour la bagarre afin que règne l’ordre dans LA GRANDE HERMINE. Quand il joue du piano, soit pour y installer de l’ambiance de convenance ou
pour simplement y accompagner la merveilleuse voix de la jeune prostituée, nous voyons directement au-delà des FEUILLES MORTES de Montand qui,
miraculeusement, se ramassent encore et toujours à la pelle...
Lucille Dumont
Une autre grande dame,
97 ans et toujours vivante
92 ans là-dessus
Un moment fort émouvant qui a kidnappé l’âme de l’audience. Et parce que le piano de Louise n’est jamais bien loin de celui de Robert…
Et je leur
souris
Pour gagner
ma vie
Ils me font
merci
Continuent
leur bruit
Ou viennent
dans mon dos
Pour taper
sur un Do
Ou baver sur
les notes
Du piano bar
où je joue chaque soir
JOE FINGER LEDOUX
Robert
Charlebois
1968
Nicolas
Gendron, qui avait signé la superbe mise en scène de ET AU PIRE ON SE MARIERA, que nous avions vue
en novembre dernier justement chez PREMIER ACTE, en a jeté avec ses rôles de « clients »
éperdus, dont celui qui se prend un brin pour Baudelaire en personne (délirant) ou encore en simili pimp averti par une Mme G qui ne vaut plus cher la poche après sa petite semonce...
***
LA GRANDE HERMINE
1114 Cartier
Pour une
femme qui ne voulait pas entendre parler de politique, on peut dire que le fait
qu’elle habite sur René-Lévesque est un peu paradoxal. MME G, un docu-théâtre
de Maxime Beauregard-Martin, et éventuellement un documentaire, avec des
secrets inédits...
LE STATIONNEMENT DE MADAME THÉRÈSE
Avec cette
première mise en scène dynamique et franchement bien écrite, on ne peut
souhaiter qu’une chose à Maxime Beauregard-Martin: qu’il n’aille jamais se
coucher avant que le soleil ne se lève…en retard. C’est
seulement après avoir goûté à cette crousti-tendre tranche de vie que j’ai
regretté de ne pas être allée m'asseoir au RIDEAU ROUGE. Pour me retrouver dans le décor sombre un peu louche, pour l’ambiance
de bar, pour la musique en live, pour la vie quoi ! Mais on repassera bien un de
ces quatre…
Photos glanées via Google.
Le superbe blogue d'un photographe
qui semble être de Québec.
MME G
TEXTE:
Maxime Beauregard-Martin
MISE EN SCÈNE:
Maryse Lapierre
ASSISTANCE À
LA MISE EN SCÈNE
ET DIRECTION
MUSICALE: Sarah Villeneuve
DÉCOR ET
COSTUMES: Gabrielle Arseneault
ÉCLAIRAGES:
Maude Groleau
PHOTOS: Cath Langlois
Chez Thérèse
http://www.lapresse.ca/le-soleil/justice-et-faits-divers/201103/18/01-4380745-la-police-ferme-un-bar-clandestin-dirige-par-une-femme-de-83-ans.php
http://www.lapresse.ca/le-soleil/opinions/chroniqueurs/201210/28/01-4587920-dans-la-taniere-de-madame-therese.php
http://www.lapresse.ca/le-soleil/opinions/chroniqueurs/201210/28/01-4587920-dans-la-taniere-de-madame-therese.php
POUR MME G
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerMerci! Merci! Vos mots me vont droit au cœur!
Maryse Lapierre
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerMerci beaucoup!
Marie-Ginette Guay
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerMerci Louise!
Ce sont de très beaux mots.
Content que tu aies apprécié la pièce!
Maxime Beauregard-Martin
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerMerci beaucoup Louise
Je vous ai lue une fois de plus avec grand intérêt
Petite note: Et au pire, on se mariera avait été présenté à Premier Acte, et non au Périscope ;-)
On partagera assurément votre texte sur la page d'On a tué la une!
Nicolas Gendron
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerToutes mes excuses très cher, la mémoire des fois émoticône wink
Je corrige ça tusuite...
Merci
En attendant Sol, salut ;-)
Louise
via facebook le 26 avril 2016:
RépondreSupprimerPas de problème
Au plaisirrrr
Nicolas