Entre la lumière
du jeu et le sofa
au milieu,
des
bouteilles pleines et des verres vides,
et la nuit, qui
ne se reposera donc jamais...
***
Georges et
Martha ivres jusqu’au petit matin,
c’est la nausée
noyée dans leur gris chagrin;
leurs cœurs bittersweet dans la maison hantée
par un fils
qui n’existe que dans leurs pensées
Quelque
chose de malsain se dessine sur le mur
une ombre de
chaire fourrée de solitude
une claque
sur la gueule d’un loup de gouttière
un bouquet
d’éreintements
une douche
de bêtises
une clameur
une hantise
une hantise
Entre les jeunes bras du beau Nick
et le sang
chaud de l’alcool mal-aidant,
le ventre
vide de Honey qui se gonfle
et celui de
Martha qui se déboutonne...
Le cœur viré tout à l’envers,
les yeux rivés
sur le beau noir,
Martha
veille à son grain de folie
un autre
verre à la main,
ses doigts
louchent vers le bar
Et les
heures passent…
Le carillon
résonne
la porte
s’ouvre
le décor
s’enflamme
les jupons
dépassent
Le temps se
découd des fenêtres ouvertes,
le temps fuit
dans le repli des cuisses BB-Q
et dans la braguette d’un pantalon à passants
La jument de
la nuit s’agite avec un paon,
elle le
prend malgré lui pour un étalon;
et s’il
n’est pas vrai que tout est faux,
les petites ailes
cruelles des jeunes oies blanches
n’égaleront
jamais l'appétit sexuel de l’Expérience
L’histoire
finit souvent par où elle commence,
par un début qui n’a pas véritablement de fin.
elquidam
« Et là, mon
petit bébé, ce merveilleux texte qui était dans mes cartons, commence à prendre
vie à travers l’âme, l’émotivité et la créativité de plusieurs artistes. »
Jacques
Leblanc
Programme de la soirée
Hugues
Frenette, LE choix ultime de Jacques Leblanc pour sa dernière fournée en tant que directeur artistique à LA BORDÉE, a mis en scène ce texte puissant
d’Edward Albee. Il a réussi son mandat qui aura été celui de nous immerger complètement
dans ce bain de boue thérapeutique rempli de sarcasmes et d’amertume. Une pure
réjouissance que d’avoir été plongés au cœur de l’Amérique du Mort pendant les quelques deux heures et demies que dure ce morceau d’anthologie du théâtre des années
soixante.
Avec des dialogues à couper le souffle, autant celui des acteurs que des spectateurs, en plus de celui des couteaux qui volent plus
bas que haut, on peut dire qu’il était grand temps que cette tempête de
sensations fortes finisse par venir calmer nos attentes envers ce chef-d’œuvre
toujours d’actualité. Edward Albee, né un 12 mars, tout comme un autre célèbre auteur, Jack Kerouac, pour ne
pas le nommer, sans oublier un certain Mortifer, auteur moins connu
mais tout aussi prolifique, a frappé dans le mille et une nuits avec cette pièce qui a fait sa renommée. Le voici d'ailleurs dans ces années-là, dans son bureau de Greenwich Village...
1963
Je me souviens de cette adaptation cinématographique de Mike Nichols, avec Elizabeth Taylor et Richard Burton que j'ai vue il y a... longtemps...
What a dump !
Lorraine
Côté, qui interprète divinement SA Martha, montait sur scène ce soir pour la
3000 ème fois, c’est elle-même qui nous l’a annoncé à la fin de cette
autre magistrale performance. Elle a sacré, crié, chialé, avec toute la vigueur et la rigueur que ce grand rôle exige; elle s'est déshabillée, autant physiquement que moralement, tout cela avec une telle fluidité qu'on l'enviait presque d'être aussi elle devant lui...
Les applaudissements ont à nouveau retenti dans
une BORDÉE renversée d’émotions de toutes sortes. Ne manquait plus que des fleurs et une flûte de champagne pour cette reine du foyer pas tout à fait comme les autres, mais bon, comme Martha le dit si bien: PARTY !
Normand
Bissonnette, le beau Georges, qui était tout aussi excellent en attaques
verbales que sa chère épouse, a fait mouche encore une fois. Notre plaisir à le
voir autant se faire maltraiter qu’aguicher par sa peste de femme, parce
qu’il en faisait de même envers elle, a donné lieu à quelques répliques
sismiques dignes d’un 9,0.
L’alcool lui permet autant d’exulter que de se
désoler; son couple avec Martha, qui bat de l'aile la nuit, mais qui s'en accommode tant bien que mal le jour, est tout de même assorti. Et cette
tempête dans un verre de scotch, de gin ou de vodka, ne leur fera jamais mettre
de l’eau dans leur vin, à tout le moins ces quelques larmes salées pour leurs
glaçons de frissons garantis...
Martha my dear
you have always been my inspiration
Please
Be good to me Martha my love
Don’T forget me Martha my dear
André
Robillard, le séduisant Nick, comme un jeune matelot qui se fait monter
facilement sur le bateau ivre d’une maîtresse en guerre contre son port
d’attache, qui se sort tout de même assez bien de cette souricière...aux yeux
rouges. Plus la pièce avance et plus on fait le rapprochement entre lui et
George; ils sont l’un et l’autre et l’un dans l’autre, comme une espère de
copié-collé. Peut-être ne sont-ils en fait qu’une seule et même personne, c’est là tout
le mystère et la beauté de cette autre big bad american story. Le constat de son immense talent ne fait qu'augmenter, à le voir aller, on dirait un Hugues Frenette à ses débuts, et c'est tout à son honneur...
Élodie
Grenier, la jeune épouse de Nick, nous fait plus sourire que rager. Au contraire
des trois autres, elle est très naïve, mais l’est-elle vraiment ? Elle essaie d’entrer dans le jeu des grandes personnes et l’on ressent
très bien les différents malaises qui l’assaillent lorsqu'elle déraille elle
aussi devant SA situation. Dans ce jeu perpétuel et obsessionnel du chat et de
la souris, il n’y a pas vraiment de gagnants, que des loosers en répétition « d’insistance
» de divorce ou plutôt « d'absence d'alternative »... et en particulier ces jours-ci...;-)
Hugues
Frenette nous a donné ce soir, par son talent indéniable de metteur en scène, un autre de ces cadeaux inestimables que LA BORDÉE nous offre depuis bientôt quarante
ans. La scénographie, de même que les éclairages, ont joué un rôle important, parce que c'est souvent le simple rayon d'un spot blanc sur un visage pâle en feu, lors d'une scène intense, que s'imprégnera l'âme de la pièce dans votre mémoire pour le restant de vos jours. Merci à Michel Tremblay, le seul et unique, qui a traduit cette
prodigieuse histoire…à ne pas dormir debout dans la Nouvelle Carthage *…
Éventuelle apocalypse
pour cœurs en fusion ?
Reddition partielle jusqu'à la prochaine bataille ?
QUI A PEUR
DU GRAND MÉCHANT LOUP ?
Sûrement pas
Georges et encore moins Martha...
Assis
collés/collants sur leur canapé RELAXONS;
comme deux
enfants épris, main dans la main,
ils se consolent, se désolent, et boivent un coup...
Pour se
souvenir de cette soirée exceptionnelle dans laquelle Lorraine Côté jouait pour la 3000ème fois, voici un extrait via LA FABRIQUE CULTURELLE suivi d'une chanson de Billie Holliday, une autre femme qui sort de l'ordinaire...
http://www.lafabriqueculturelle.tv/capsules/6918/qui-a-peur-de-virginia-woolf-extrait-en-tete-a-tete
Les photos de cette pièce mémorable sont de Nicola Frank Vachon.
ALL OF...HER
UN PETIT CADEAU POUR GEORGES, MARTHA, NICK ET HONEY:
via facebook le 4 mai 2016:
RépondreSupprimerMerci encore une fois Louise pour ce magnifique témoignage. C'est pour vous qu'on travaille si fort. Bon printemps !
Hugues Frenette