Le 18
octobre dernier, au théâtre de La Bordée, j’ai eu le marquant privilège
d’assister à la pièce ORPHELINS du Britannique Dennis Kelly. Traduite par Fanny Britt et mise en scène par Maxime Denommée, que j’avais vu en
avril dernier, le 15 plus précisément, à la salle Albert-Rousseau dans LES MUSES ORPHELINES, ce n’est que quelques jours après l'avoir vue
que j’ai fait le parallèle entre ces deux histoires de familles « bombes à
retardement ». Deux histoires qui traitent des liens parfois chaotiques entre
frères et sœurs, qui les unissent, ou les désunissent, pour le meilleur et/ou pour le pire. Comme dans une cérémonie officielle, il y avait des fleurs, de la musique et de l'angoisse (cosmique) pour
célébrer l'une de nos plus belles dramaturgies québécoises, de celles qui nous rappellent à l’ordre…
ORPHELINS, une peinture qui tourne autour de la peau d'un frère, d'une sœur et de son mari. Étienne Pilon, Liam le frère, est tout simplement explosif dans le rôle du gars floué/fluant au T-Shirt ensanglanté. Changeant comme l’air du temps, constructeur/destructeur de sentiments allant de la violence à la dépendance, fatiguant autant qu’attachant, semant le doute dans la tête de Danny, son gentil beau-frère, interprété magistralement par l'électrisant Steve Laplante, un homme qui est peut-être encore plus révolté que lui. Liam dérange Helen, jouée ici par la superbe Evelyne Rompré. Il dérange, oui c’est ça, il dérange, comme ceux-là qu’on voit retentir en plein milieu d’un souper qui s’annonçait romantique, un vrai casseux de party comme on dit par ici…
En attendant
le drame, on rit, mais pas tant que ça, surtout lorsqu'il s’agit de l’Étranger,
qui au début apparaît en traître à la patrie et qui finalement ne s’avoue être qu’un pauvre
quidam qui passait sur le trottoir des immigrés, un encabané qui essayait tant
bien que mal de se déprendre des mains méchantes d'un illuminé. On se brasse la cage, on déterre nos propres morts, on crie au loup pour ne pas se
faire abattre par le triste chasseur qu’est le chagrin des opprimés. On en
prend plein la gueule de cette pulsion de vie et de mort.
ORPHELINS, de père ou de mère, ou des deux, comme de l’humanité
toute entière, le trio disloqué nous en apprend encore plus sur un mal qui se répand à la vitesse grand V dans les mégapoles
des surpeuplés comme dans les bleds des éparpillés: le cœur de la
virtualité qui passe par le corps de la réalité. On attend que la révolution arrive mais
elle est bien souvent très en retard pour ses grands rendez-vous.
L’auto ou le
métro ? Le téléphone ou le texto ? Le farniente ou le boulot ? Le poème ou le
brûlot ? L’ordre ou le désordre ? La
paix ou le chaos ? C’est à l’auteur de décider. Pas aux acteurs. Dennis Kelly sonne l’alarme générale avec ses répliques sismiques
qui crevassent les ruelles désertes des cœurs de pierre précieux et fait tomber le masque de la douleur des catcheurs de rêve...
Masque de catch el Santo
ORPHELINS
PRODUCTION : LA
MANUFACTURE
TEXTE : DENNIS KELLY
TRADUCTION : FANNY
BRITT
MISE EN SCÈNE : MAXIME
DENOMMÉE
ASSISTANCE À LA MISE EN
SCÈNE : MARIE-HÉLÈNE DUFORT
DÉCOR : OLIVIER
LANDREVILLE
COSTUMES : STÉPHANIE
CLÉROUX
ÉCLAIRAGES : ANDRÉ
RIOUX
MUSIQUE : ÉRIC FORGET
ACCESSOIRES : PATRICIA
RUEL
DIRECTION ARTISTIQUE :
JEAN-DENIS LEDUC
DISTRIBUTION
STEVE LAPLANTE
EVELYNE ROMPRÉ
ÉTIENNE PILOn
*****
« Y’A PERSONNE DE NORMAL
DANS FAMILLE
PIS VA FALLOIR VIVRE AVEC ÇA »
photo: Le théâtre jean-duceppe
« Prenez
garde de vous casser la margoulette dans les montagnes.
Rapportez-nous vos
personnes en bon état. »
Gustave Flaubert Correspondances
Gustave Flaubert Correspondances
LES MUSES ORPHELINES, de Michel Marc Bouchard, créée en 1988, raconte l’histoire d’une
famille du Lac St-Jean tricotée serrée, une maille à l’endroit une maille à
l’envers. Abandonnée par une mère voyage il y a plusieurs années, elle attend nerveusement son (im) probable
retour. Trois sœurs, un frère, occupent l'air pesant d'une maison bien isolée par la
chicane, l’amour et…les secrets.
Maxime Denommée, qui interprète le rôle du frère, comme
à son habitude, nous a livré une performance sans faille; Léane Labrèche Dor, quelle agréable découverte, nous a pris les
tripes avec ses répliques à l’emporte-pièce; Macha Limonchik, un peu plus effacée, a cependant accoté fermement une Nathalie Mallette spirituelle à
souhait.
On soulève
avec les comédiens le poids lourd de leur secret familial : leur mère toujours vivante
à qui l’on a caché l’existence à la cadette des trois sœurs, Isabelle, exquise Léane
Labrèche Dor, fille d'un certaine Marc et petite-fille d'un certain Georges. L’angoisse de la lumière crue que ce secret procure aux personnages colorés de ce
décor gris latté favorise une mise en scène ravageuse, ravageuse dans le bon sens de la
définition. De la parole aux actes, LES MUSES ORPHELINES, c'est comme un fin crochet de gauche
sur la margoulette, une grosse vague de critique culturelle dans le clos des
renfermés habituels.
Le chant d’adieu
des Paloma
la jupe
espagnole d'un frère fripé
le fantôme errant des amants
une corrida
de sentiments mal usés
une
définition du mot dictionnaire
Un dictionnaire est un ouvrage de référence contenant l’ensemble
des mots d’une langue ou d’un domaine d’activités généralement présentés par
ordre alphabétique et fournissant pour chacun une définition, une explication
ou une correspondance.
LES MUSES ORPHELINES
Mise en scène : Martine Beaulnes
Assistance
à la mise en scène : Manon
Bouchard
Décor
: Richard Lacroix
Costumes : Daniel Fortin
Éclairages : Claude Cournoyer
Musique : Ludovic Bonnier
Accessoires : Normand Blais
Costumes : Daniel Fortin
Éclairages : Claude Cournoyer
Musique : Ludovic Bonnier
Accessoires : Normand Blais
Photo: François Brunelle
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