Gar or chugar
Il y avait et il n’y avait pas
Le 24 avril
1915 est un jour funeste pour les Arméniens. Ce jour-là, à Constantinople, le
coup d'envoi du premier génocide du XXe siècle est donné par une rafle de
l'élite arménienne. En quelques jours, plus de 2000 intellectuels et notables
sont jetés en prison. La majorité d'entre eux sont assassinés. Un plan concerté
d'extermination des Arméniens de l'Empire ottoman est mis en œuvre par le
gouvernement jeune-turc. Bilan: entre 1,2 et 1,5 million de victimes. Les
survivants seront condamnés à l'exil, sans possibilité de retour.
UNE BÊTE SUR LA LUNE, un homme, une femme, et un enfant. Trois jeunes
protagonistes secondés par un vétéran raconteur. Une histoire éclatante d’humanité,
ponctuée d’explosions de silence. Inspirée par la famille rescapée de son
épouse arménienne, Richard Kalinoski, un auteur américain né dans le Wisconsin, dépeint
avec une force tranquille et un réconfortant minimalisme le quotidien d’exilés
venus trouver une certaine paix aux USA. Charles Aznavour, Arménien de renom, chante ici le souvenir de leur douloureuse délivrance...
Amélie Bergeron, qui avait cosigné avec Agnès Zacharie le
sublime PIANO À VOILE (vu l’an dernier dans le stationnement du Périscope), n’a pas
ménagé son talent de metteure en scène, elle a su faire progresser, avec toute
la subtilité exigée, cet ignoble désastre humanitaire qu’ont eu à subir les
millions d’Arméniens et d’Arméniennes. Secondée par des concepteurs tout aussi qualifiés,
on se plaît à espérer une prochaine production dans laquelle on pourrait tous
les retrouver.
Gorges nouées par une émotion éclose de l’exil, Mustapha
Aramis et Ariane Bellavance-Fafard ont réussi
à fixer l’attention du public averti de LA BORDÉE. Leurs Aram et Seta
faisaient partie de ceux qui ont fui le fléau mortel du génocide arménien. Avec
toute la rigueur de l’un et la légèreté de l’autre, ils ont formé avec grâce ce
couple uni malgré quelques embûches et confrontations. Ayant accepté leur sort,
ils avaient l’air si heureux lors du dénouement que l’on aurait voulu leur souhaiter
la meilleure des chances pour l’avenir.
En ce 24 avril 2015, j'aurais aimé pouvoir en
discuter avec mon grand-père Naïm, qui, dès 1921, du fin fond du petit bled
syrien où il s'était réfugié après le génocide, était abonné à La Presse.
J'aurais aimé aussi pouvoir en parler avec ma grand-mère Laurice, morte il y a
deux ans, elle qui, après la mort de mon grand-père, était la gardienne de sa
mémoire et de ses espoirs.
Rima Elkouri, La Presse
Rosalie Daoust a brillé de tous ses feux dans le rôle de
l’autre rescapé, l’enfant de la résilience, le petit Italien abandonné aux rues
de Milwaukee. Son rôle lui vaudra, j’en suis convaincue, d’autres personnages
tout aussi convaincants que son Vincent enfant.
Quant à Jack Robitaille, l’enfant
devenu grand, le narrateur, sa seule présence dans ce spectacle
promettait déjà le succès. Toujours aussi juste et bon, sa voix unique
transporte l’histoire de cette famille reconstituée au-delà de nos espérances.
Et quelle superbe nouvelle avons-nous cette semaine en apprenant qu’il sera le nouveau
DRAGONFLY DE CHICOUTIMI présenté à La Bordée l’automne prochain. De quoi avoir
hâte que l’été finisse !
Photos: L.Langlois
15 mars 2018
"J'apporterais ma mémoire
(et une valise)"
L.L.
Pour terminer cette autre belle soirée de culture, après avoir admiré le hall imprégné d'exilés, A. et moi avons eu le bonheur de croiser Agnès Zacharie et Henri-Louis Chalem, avec qui c’est toujours un grand plaisir de converser de théâtre, d’humanité et de société.
(En espérant n'avoir jamais à faire comme Aram)
Photos: L.Langlois
Enfants fragiles des dinosaures
Enfants frugivores des carnivores
Enfants rois des châteaux-forts
Enfants prisonniers des miradors
Enfants martyrs des sanglantes aurores
Enfants soldats des porte-étendards
Enfants comblés par le Jeu et l’Art
elquidam
Cette histoire d’immigrés aboutis dans l’Amérique des
réfugiés ne pouvait pas être plus d’actualité. Parce qu'avec l’été qui arrive bientôt,
malgré ce printemps de glace qui n’en finit plus, on nous fera voir à nouveau, aux
frontières de notre belle province, le visage inquiet de l’Étranger venu trouver
un quelconque réconfort dans ce pays si abondant, qui soit dit en passant reconnaît le génocide. Et parce que l’accueil ne sera
pas si facile parfois, parce qu'il y aura encore de la véhémence dans les deux sens, et
parce qu’il sera toujours temps de prendre le monde par la main: regardons-les en face, les yeux dans les yeux, juste avant qu’ils ne meurent…
A whole race, genocide
Taken away all of our pride
A whole race, genocide
Taken away
Watch them all fall down
UNE BÊTE SUR LA LUNE
TEXTE: Richard Kalinoski
TRADUCTION: dANIEL lOAYZA
adaptation et mise en scène: Amélie bergeron
assistance à la mise en scène: laurence croteau langevin
décor: véronique bertrand
costumes: julie morel
éclairage: keven dubois
musique: pascal robitaille
PHOTOs du spectacle: NICOLA-FRANK VACHON
REPORTAGE
Avant cette sublime cérémonie théâtrale, avions visité LA
GALERIE DES ARTS VISUELS qui nous présentait A SUITABLE DEN de ce même Greame
Patterson qui nous avait subjugués avec son PLAYER PIANO WALTZ à la GALERIE 3 l’automne
dernier. Encore une fois, il nous aura intrigués avec son ingénieuse
installation dans laquelle s’y promène un raton-laveur aux allures plutôt
bureaucratiques. Allez voir…;-)
Autres objets tous aussi curieux les uns que
les autres, les RAKU PUNK de Jean-François Boulard et Valérie Blaize. Exposés
chez MATERIA, ils nous auront mystifié l’art de la cuisson ! Pour la mémoire...
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