Rodrigue Jean
Photo: ONF
HOMMES À LOUER, réalisé par Rodrigue Jean, (en nomination aux Jutra pour le meilleur documentaire) un autre de ces films documentaires qui secoue les pleumats de l'âme-mère. Ces jeunes hommes qui ont des visages d'anges avec des yeux de chats sauvages, qui se prostituent à cause de la drogue ou/et qui se droguent à cause de la prostitution, m'ont fait penser un instant à Ripley Bogle, ce personnage drop-out du roman du même nom écrit par Robert McLiam Wilson.
Qui sont-ils vraiment ces hommes à louer ? Ils ne le savent pas eux-mêmes, ils sont tout simplement là, en train de se battre, de se débattre, de se défoncer, de se faire sucer, de se demander pourquoi ils font ça. J'ai vu dans la lueur de leur regard quelque chose qui m'a éclairé sur ce qui s'est passé cette semaine à Charlesbourg, alors que L.-P., un jeune homme de 22 ans qui a agressé sa mère au couteau et qui s'est livré à des voies de fait sur son jeune frère âgé de 17 ans, s'est vu arrêté par la police et emmené en prison. L.-P., avec qui j'ai traîné sur les bancs d'école il y a deux ans alors que nous suivions un cours d'immersion anglaise. Pas lui, mais oui, lui, L.-P., qui se droguait et avait un train de vie assez rock'n roll, qui se présentait en classe un jour sur deux, qui justement s'était fait sortir du cours à cause de ça et qui avait menacé l'une des élèves dans la classe en lui disant " je vais te tuer, toé ", parce qu'elle avait manifesté un certain ressentiment à son égard du à son " mauvais " comportement. J'étais assise à un banc de lui quand il lui a dit ça avec des éclairs dans les yeux. Nous avions eu peur qu'il aille plus loin mais il est tout simplement sorti de classe, sans plus. Le lendemain matin il était à nouveau à sa place mais encore passablement amoché, agité et maussade. Sous la pression des élèves troublés le directeur l'a donc mis à la porte du cours, et de l'école. On n'entendit plus jamais parler de lui jusqu'à cette semaine, deux ans plus tard...
Quelle ne fût pas ma stupéfaction lorsque je vis son beau visage dans le carreau de la fenêtre de l'auto de police. De la stupéfaction, oui, c'est sûr, mais pas tant que ça, étant donné ce qui s'était passé dans la classe, mais des interrogations à propos des multiples antécédants judiciaires qu'il a connus lors de ces deux dernières années, pas moins de 14. Alimentés par la violence, la drogue, le manque d'argent et quoi d'autre encore, les risques d'explosions spontanées sont parfois inévitables pour ces jeunes hommes désemparés. J'ai appris que L.-P. avait reçu des verdicts de non-responsabilité parce qu'il souffre de troubles mentaux, il doit d'ailleurs subir un examen psychiatrique afin de déterminer son aptitude à comparaître...
Le film de Rodrigue Jean ne se termine pas, il se poursuit...au coin de Ste-Catherine et de Champlain, là où les doses sont parfois mortelles...
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