jeudi 24 septembre 2015

LE DIEU DU CARNAGE: festin pour hamsters en liberté



Photo: Hélène Bouffard



Il n’y a pas de quoi rire
Et pourtant…

Que des heures et des heures
dans ce temps qui fuit
Que de l’amour au travers de la peur
et des centaines de jours changés en nuits

Deux enfants qui se tiraillent
Deux dents qui se déracinent
Quatre adultes qui se coltaillent

C’est pas toujours le temps de répondre au téléphone

De blanches tulipes dans un décor glacial
De l’alcool à profusion dans les bouches molles
De la rigueur dans les propos
Du rire jaune à celui plus gras
C'est la vie qui se bat
C'est la vie qui s’avale
C'est la vie qui se rock
C'est la vie qui s'enroule

Un clafoutis aux pommes-poires
Des paroles au goût de miel
Puis un grand seau rempli de fiel
(Burp!)

Des Toutou par ici, 
des Toutou par là
Des toi, toi, toi, 
Des moi, moi, moi…

Puis des coups de mains flatteurs
dans les dos courbés des fatigués

Quelle belle folie que celle des hommes
(Tant qu’elle n’entre pas à l’asile)

elquidam






CARNAGE, de Roman Polanski, adapté de la pièce de Yasmina Reza, que j’ai vu au petit écran un de ce soirs de hasards de pitonnage, m’avait franchement séduite. J’aime bien ces grandes comédies satiriques où les rires jaunes y côtoient la réflexion sur nos relations intimes " entre humains ". C’est presque toujours un cruel plaisir que de se voir et revoir dans ces scènes miroirs qui y (re) (dé) forment les divers travers de nos personnalités si complexes parfois.

Qui de nous n’a jamais côtoyé un Alain, une Annette, un Michel ou une Véronique ? Ils sont là, tout près de nous, ils nous effleurent de leur regard amical d’un bord, condescendant de l’autre. Ils sont là, au resto, à la table d’à côté, écoutant nos sornettes, nos niaiseries, nos vérités et nos mensonges. Ils ne nous regardent peut-être que du coin de l’œil mais ils nous entendent. Alors, faites attention à vos petites oreilles de hamsters perdus dans la nature urbaine, demeurez sur vos gardes, leurs bâtons ne sont jamais bien loin...


Court-métrage d'Eliot Laprise


Deux enfants qui se battent, leurs parents qui se débattent. 
La cour d’école déménagée dans le salon. 
La récréation a tôt bien fait de vite passer. 
Il était temps de rentrer goûter cette nourrissante collation...





Hugues Frenette, Marie-Josée Bastien, Jonathan Gagnon et Véronika Wakdissi-Warren: un quatuor en platine pour l’ouverture de la saison 2015-2016 du Trident. Une distribution de rêve pour nous qui aimons tant les voir en action, et bien sûr pour Michel Nadeau, le metteur en scène et directeur du Théâtre Niveau Parking (un autre qui fête ses 30 ans d'existence), avec qui nous passons toujours de mémorables soirées éclairées d’humanisme. Et ce soir en fût une autre dont nous nous souviendrons encore longtemps.


Photo: Caroline Grégoire, LE SOLEIL


Le décor, épuré accessoirement, avec son éclairage naturellement lumineux, donnaient au texte toute la place qui lui revenait. Avec ses regards de travers, ses percutantes démonstrations du « ne pas savoir vivre » et son intelligence perforée de candeur cruelle, c'est tout un texte que nous avons avalé là. On peut dire que le public qui raffole de ce genre de comédie satirique a été comblé à 100%. À entendre les applaudissements à la fin de la pièce on peut dire que ce fût le cas. Vous pouvez maintenant rallumer vos téléphones...;-)







  
Aujourd’hui, jeudi 24 septembre, un drame humain s’est produit en Arabie Saoudite, à Mina plus précisément, près de la Mecque, là où quelques 700 pèlerins venus jeter des pierres à Satan, ont misérablement péri piétinés. Apparemment, ce carnage serait dû à un choc entre une marée humaine et une foule venue en sens inverse. Je n’ai pu m’empêcher de tisser un lien entre le choc des quatre humains vus hier soir dans la pièce et cette scène d’une cruauté immonde: ça ne prend qu'une étincelle de pas grand chose pour déclencher une toute une tempête dans un verre...de n'importe quoi...

« QU’EST-CE QU’ON EST ? »


Photo: Reuters



Juste avant que le spectacle ne commence, Anne-Marie Olivier, comme à son accoutumée s'adresse aux Spectateurs; ce soir elle nous a instruits de la victoire de M. Kevin McCoy, qui a remporté le prix des abonnés du Trident 2014-2015. Contente d’apprendre cela car il avait été mon choix. Son NORGE était d’une beauté irréprochable, qui touchait autant le cœur que l’esprit. Il méritait amplement ce prix.





Il faisait tellement beau ce 23 septembre, les arbres encore très verts, les filles qui portaient encore leurs petites robes d’été, les gars en bermudas, les cyclistes et les piétons, comme nous, qui s’en donnaient à cœur joie à marcher et pédaler de toutes leurs forces dont un qui montait avec vigueur la Côte Badelard.

Nous avons profité de ce temps empreint de liberté pour renouveler notre abonnement chez PREMIER ACTE. TROIS NUITS AVEC MADDOX, la première pièce de la saison, sera présentée au bar L’AUTRE ZONE, à Limoilou. Nous y serons le jeudi, 8 octobre, beau temps mauvais temps.


Photo: L.Langlois


Mais quelques ombrages planaient dans les quartiers St-Jean-Baptiste et Montcalm, des ombrages sur le COLISÉE DU LIVRE, avec ses rabais à 100%, et sur SILLONS LE DISQUAIRE, avec des prix de ventes entre 3 et 9 dollars. Leurs fermetures étant prévues pour très bientôt, ça fait un léger pincement au cœur quand on voit s’éteindre la faible lumière de nos petites habitudes. Le vent de la Culture semble prendre une autre direction, il se transforme au gré de ces commerces et institutions qui disparaissent. Leurs bonnes vieilles odeurs de sainteté s’effaceront pour faire place à d’autres, comme celles du café Starbuck et du Chocolats favoris. Une déflagration sans grand tapage, un doux carnage…









Avant de partir, une petite pointe de clafoutis aux pommes et poires ?
Ce n'est pas la recette de la mère de Véronique mais celle d'Hervé. 
Un très bel automne en perspective n'est-ce pas ? ;-) 






jeudi 10 septembre 2015

VINCI: les maîtres lumineux

Photo: Nicola Frank Vachon




ÉTERNITÉ ÉPHÉMÈRE


Le théâtre est toujours un engagement. Histoires pour célébrer le monde et ses mystères. Mots et choses pour ne pas mourir. Verbes pour esquisser pierres, engendrer vies, créer des femmes et des hommes, souffler des dieux, voir défiler des siècles entiers. Le théâtre est toujours intuitions vitales, fouilles archéologiques de rêves, tentations de folies. Le théâtre est toujours labyrinthes de couleurs et de matières, chorégraphie divine, mélodie secrète. Le théâtre est toujours voyages à travers les plis de la lumière. Le théâtre est toujours une éternité éphémère

Urd Théâtre
2006






Sachez vous éloigner car, 
lorsque vous reviendrez au travail, 
votre jugement sera plus sûr.

Leonard de Vinci



Photo: L.Langlois



Il y a trente ans 
...et maintenant...

Un homme dans le miroir
Un homme conçu pour la lumière
Un homme retourné dans l'ombre...

Sommes (re) venus.
L’avons enfin (re) vu.

L.L.





À Québec, ces jours-ci, on peut dire que c’est le temps des grandes et moyennes ouvertures. Après celles, multiples, du Centre Vidéotron, c’était au tour du Théâtre Périscope mardi soir le 8. Le Périscope qui fête cette année ses 30 ans d’existence. Et comme le prodigieux VINCI de Robert Lepage a atteint lui aussi cet âge en plein cœur de sa jeunesse, on l’a recréé au même endroit. Pour la plupart d’entre nous, Spectateurs Ravis, avons enfin eu le bonheur de faire connaissance avec cette divine « transmission ». 


Olivier Normand, Frédéric Dubois 
et Pierre Philippe Guay
Photo: Daniel Mallard


Sous les conseils artistiques de Pierre Philippe Guay, qui était d’ailleurs acteur et assistant de Robert Lepage en 1985 lors de la création de VINCI, et qui interprétait le guide du musée aveugle ce soir, Frédéric Dubois, a mis en scène cette pièce haute en lumières et miroitante de sobriété; il a rempli cet espace mental qui manquait à ma culture. N’ayant jamais été rejouée depuis sa création, l’anniversaire du Périscope ne pouvait mieux coïncider avec celle de VINCI. Une autre excellente performance d’Olivier Normand qui a fait renaître la lumière unique des tableaux de ces deux grands maîtres que sont Robert Lepage et Léonard de Vinci. Un rendez-vous qu’il ne fallait absolument pas manqué.


Photo: Nicola Frank Vachon


À propos du début de la pièce, que certains ont qualifié de « malaisant » pour les spectateurs, je dirais que j’ai tout d’abord pensé que ces trous blancs de mémoire, transmis en italien par le guide du musée, faisaient tout bonnement partie du texte. Son « désolé » n'a même pas effleuré mon esprit qu'il cherchait son texte. Ce sont des choses qui peuvent arriver, c’était soir de première après tout. Mais absolument rien de ce contretemps n’a transparu par la suite. Ça nous rappelle qu'on est pas devant un écran plat de 55 pouces...


  Photo: Nicola Frank Vachon

Dire que j’ai été de ceux-là un jour. Massés devant Elle, excités comme des enfants avant de faire un tour dans la Grande Roue, la cliquetant de milles et un flash, ne la voyant presque pas, la vitre lui donnant cet air invisible, mais pourtant, elle était bel et bien là, accrochée au mur, nous scrutant avec son regard stigmatique ceint de son sourire énigmatique. Oui, j’ai eu la chance et le privilège de la rencontrer quelques courts instants. C’était en août 2002.




C’est à tort que les hommes se plaignent de la fuite du temps, en l’accusant d’être trop rapide, sans voir qu’il s’écoule à la bonne vitesse.

Léonard de Vinci



« Is the image I'm making is the image I see
When the man in the mirror is talking to me ? »





les miroirs, la buée, le trépas
la bouche, la main, le bras

l’œil de l’interrogation
le secret de l’ami disparu
le dilemme du grand départ,
la rencontre avec le tableau
la vision, le code

la  différence entre l’amour et la mort, la vitesse

parti retrouver les ailes de son désir
parti prendre son élan,
parti planer pour quelques temps

se (sur) prendre à aimer cette envolée

puis repartir à l’envers
pour écrire en spéculaire
pour boire à la source
pour re-naître

elquidam




Cœur: instrument merveilleux, inventé par le Maître suprême. Celui-ci se meurt lui-même et ne s’arrête point, sinon pour toujours. »

Léonard de Vinci


Photo: Nicola Frank Vachon



Un nouvel ami
(mon 97ème)

Philippe, jeune photographe en deuil de Marc, un ami très cher et mentor parti comme ça sans même l’avertir, laissant son travail en plan. Un Philippe comme tant d’autre Philippe, qui se cherche dans l’Art, qui s’interroge sur ses propres exécutions, comme celles de prendre en photos des salles de bains « frett et blanches comme des lavabos », des tâches qui finissent par gruger son énergie, pas toujours renouvelable. 


Photo: Nicola Frank Vachon


Un Philippe qui élabore des plans d’évasion, qui se demande ce qu’il fait maintenant de et avec sa vie, qui décide de prendre un billet ouvert pour l’Europe, qui part à la recherche de son identité dans d’autres pays aux miroirs embués, qui croise le sourire d’une fille-homme à travers le génie illimité de son créateur, qui visite les fortifications antiques d’une civilisation signée Léonard de Vinci. Un fort beau voyage au cœur de l’Humain, du Louvre, de l’Italie, du vin…et du bain…


Photo: Nicola Frank Vachon


Olivier Normand, artiste multidisciplinaire, découvert le 28 septembre 2006, dans l'inoubliable DES GRENOUILLES ET DES PARAPLUIES de l’Urd Théâtre, présenté chez PREMIER ACTE. Une souvenance récurrente qui refait souvent surface lorsque nous apercevons les escaliers extérieurs du Centre Culture et Environnement Frédéric Back. Il s’est passé là des moments rares, surprenants, révolutionnaires, empreints de beauté rebelle et d’intelligence extra-sensorielle, indissociables de l’insoumis Hanna Abd El Nour, inventif chef d’orchestre de cette exceptionnelle bande d’artistes remplis du « souffle  des dieux »…PREMIER ACTE, comme un refuge, une oasis, un asile, pour les itinérants assoiffés de paroles et de gestes que nous sommes devenus...avec le temps...
  

Photo: Carl Perreault


Olivier, avec sa voix grave et juste, qui est faite sur mesure pour les grands classiques tels LA NUIT DES ROIS, LE MISANTHROPE, BRITANNICUS, CALIGULA, L’OPÉRA DE QUAT’SOUS, qui sait comment la moduler dans le si renversant TOUT CE QUI TOMBE et la mettre davantage en évidence en l’utilisant comme instrument dans le splendide CHANTE AVEC MOI, fait détonner autant la force que la sensibilité. Mais que dire de ses autres talents de danseur et d’acrobate qui l’ont parfois emmené dans des projets plus ou moins fiévreux et glissants tel ce plus qu’enchanteur PROJET EAU des NUAGES EN PANTALONS. Il nous y a fait vivre une autre sorte d’envolée.  



Illustration: L.Langlois


Extrait de mes impressions:

LE PROJET EAU, présenté au Théâtre Périscope samedi soir dernier, m’est entré dedans comme une lame de fond, déchirant quelques lambeaux d’amitié échoués sur les rives du Vide, énergisant une partie de mes petits neurones miroirs de mon imaginaire. Un spectacle déployé pour et par tous les sens, avec la simplicité audacieuse de son intelligence, en harmonie avec le corps et l’esprit. Des images fluides, de la lumière lucide. Un tout en un…Une belle histoire…d’eau…

30 mars 2012
ENVAPEMENTS




VINCI


Photo: L.Langlois



LES CARNETS



Photo: L.Langlois


Les deux volumes, enserrés depuis 1994 dans leur coffret, un an après ma première rencontre avec celui qui encore aujourd’hui ne cesse de révolutionner l’Art sous toutes ses coutures. LES AIGUILLES ET L'OPIUM, une révélation pour l'amateur que j'étais alors. Un merci particulier à Monsieur Jean Saint-Hilaire qui m'a tant instruite par ses brillantes critiques, de véritables bijoux, qui souvent m'ont fait quitter mon sofa de salon pour un siège de théâtre.     



OMBRES ET LUMIÈRES
Carnets de Léonard de Vinci
Photo: L.Langlois

Photo: Centre Vidéotron


Et ce cadre, dans lequel séjourne MA Mona Lisa depuis près de 30 ans; un fantôme infatigable installé sur le mur sud-est de ma chambre à rêver…


Photo: L.Langlois


Images Google


Étant maintenant des FIDÈLES AU POSTEnous détenons la carte privilège, nous avons donc eu droit au shooter emblématique du jour, et comme l’Italie était à l’honneur ce soir, la grappa l’était également. Ouf! Il faisait assez chaud dans ce hall aux allures de bain turc ;-) Tellement occupée à converser avec Alain et Claude ainsi qu’avec la toujours aussi chaleureuse et distinguée Edwige que j’en ai oublié de prendre le programme. On repassera en récupérer un le 23, avant d’aller voir LE DIEU DU CARNAGE, notre prochaine pièce au Trident.


Photo: L.Langlois


Une autre très belle envolée dans cet espace magique qu’est le PÉRISCOPE. Je pense qu'on a retrouvé nos ailes nous autres aussi. Merci à toute l'équipe qui a fait revenir VINCI en grand vainqueur...


Je crois que le bonheur vient aux hommes qui naissent
là où l’on trouve de bons vins. 

Léonard de Vinci



Mais si le secret était dans la Caramilk ?






NOUS VAINCRONS