mercredi 23 juin 2010

Des Grenouilles



BOSNIE
L.Langlois 199?


Peut-être pour me faire pardonner de ne pas avoir été de l'assistance chez TERGOS Design ce soir pour voir se dérouler cette première performance consacrée à FAUST; peut-être parce que l'esprit de la fête nationale n'existe plus pour moi; peut-être parce que le temps est venu de passer à autre chose que de se regarder le nombril sécher; peut-être parce qu'il faut maintenant passer aux actes, à commencer par le premier, celui qui engendrera la suite des choses. Probablement pour retracer ce moment sacré, celui du 28 septembre 2006, celui où je vis pour la première fois le Théâtre de l'URD. Mais surtout pour vous, cher Hanna...

Vendredi, 29 septembre 2006
Des Pommes et des Hommes

Aujourd'hui, notre monde manque énormément de courage, d'amour, de poésie et de rêve...

Éternité éphémère (mots de la Troupe)

Le théâtre est toujours un engagement. Histoires pour célébrer le monde et ses mystères. Mots et choses pour ne pas mourir. Verbes pour esquisser pierres, engendrer vies, créer des femmes et des hommes, souffler des dieux, voir défiler des siècles entiers. Le théâtre est toujours intuitions vitales, fouilles archéologiques de rêves, tentations de folies. Le théâtre est toujours labyrinthes de couleurs et de matières, chorégraphie divine, mélodie secrète. Le théâtre est toujours voyages à travers les plis de la lumière. Le théâtre est toujours une éternité éphémère...

***

Se lève la noirceur puis se couche la clarté;
soufflé des cieux, semé de terreur,
mais toujours intrigué...
d'espérer...

Régis Caron *

***

URD

Dans la mythologie nordique Urd (Urðr) est une des trois Nornes. Son nom signifie ce qui est arrivé, et est lié au mot anglais weird et au haut-allemand Wyrd.Voir aussi le puits d'Urd, ce puits sacré supposé abriter la tête de Mimir le géant et source de l'eau pour Yggdrasil.
(wikipedia)



C'était LE JEUDI 28 SEPTEMBRE DE L'AN 2006...

Le Metteur en Scène accueillit lui-même les Spectateurs qui devèrent passer avec lui et La Troupe de L'URD un moment classé éphémère mais à jamais inoubliable...

L'Accueil se fit à l'extérieur des Murs de La maison de la Culture...

Un feu y brûlait déjà; le vent soufflait tiède, aucune apparence de pluie, pourtant nos parapluies se déployèrent dans un silence révolutionnaire...

Le Cortège des Comédiens-Musiciens fit son apparition...

On entendit une Voix nous parler dans une langue inconnue; une Voix Humaine, c'était celle de Sylvio Manuel Arriola...

Intrigués, nous comprenions déjà son Appel...

On longea les murs de brique de la Maison pour monter l'escalier de fer, pour enfin pénétrer dans le Monde souterrain d' Hanna Abd El Nour...

Après le sens de la Vue, s'éveilla celui de l'Odorat: l'encens parfumait le décor de lambeaux de vêtements suspendus; accrochés comme des trésors, on y huma l'Espace du Studio Premier Acte...

(des chaises aux formes diverses, éparpillées ici et là, choisissez donc votre place, O mon jeune Roi...)

Avec toute la courtoisie du sans effroi, on nous offrit, comme premier plat, des bonbons....enveloppés...puis des condoms...pour se protéger...et plus tard, une pomme...que l'on mangea...

Sans surprise on les accepta...et le Spectacle commença....[ le metteur en scène était toujours là ][ nous étions en sécurité avec Hanna...]

Un Musicien passa, c'était Mathieu Campagna; il accordéonisa nos coeurs et nos âmes sous ses doigts...

Transportés momentanément dans un sombre éclat de joie, l'Ouïe puit se mettre à battre depuis nos labyrinthes écarlates...Sylvio-Manuel Arriola et Olivier Normand, masculinisant le Temps, leurs bras nus le décrochant; Maryse Lapierre et Klervi Thienpont, le féminisant, nous le poussant hors du Ventre maternisant...Sous la pluie ou entre les gens, ils étaient tous resplendissants...

Acteurs invités dans la Noirceur de l'Auteur, Spectateurs noyés dans le Rayon X du Broyeur, interactivés par les mots en chaleur, des rives de sueur, bruit des odeurs...le chariot élévateur de nos âmes soeurs fit, sans aucune crainte du Malheur, un détour...dans l'Arène du Bonheur...

L'eau giclait du haut des cieux; le riz, la neige, la pluie, le Bleu...rien ne sera jamais plus comme avant, rien ne sera jamais plus comme ce vent...L'Or de l'Oeil du Comédien se fixa dans le mien; ses mains moites effleurèrent notre quotidien...ses sourires à l'Elquidam pleurèrent du crachin, ses chagrins de Dydrame lamentèrent le matin...

On ne peut espérer mieux que ces mots venus de la terre du Liban, interprétés sur celle d'un Québec errant, d'une Mer intérieure... et d'ailleurs...des mots qu'Artaud aurait aimer entendre sur scène, des mots qu'Anouilh aurait aimer pendre...lui-même. Antigone, Créon, Sophocle, ré-installés sur des pierres, dansèrent sur des sons et des lumières, sur des mots de roc en poussières...

Que de la Poésie-mère dans l'Agora des Cités-Bloc...La Tombe, la Bête, l'Arbre et les Étoiles...Le Socle, la Tempête, le Marbre et le Voile...Oui, nous étions bien...nous étions même très bien: on avait des cannes de sirop d'érable, des caméras vidéos...on avait le Câble, pour se pendre avec...on avait aussi des jobs à temps plein et du sable sur nos chemins...des sourires vernis, et des fioles de venin, des vêtement dégriffés signés Calvin CLIN...mais c'était flou...c'était flou et ça le serait toujours...parce qu'on avait pas encore eu à caller l'original, ni non plus à danser un rigodon sur les tapis du rideau-hâle mais on est bien quand même.,.on est bien, et on le sera encore...demain...sur la tonne métrique de nos déchets résiduels...ou sous la tonne empirique de nos peines présidentielles...

Ne nous reste qu'à savoir QUAND sera la prochaine Levée des Grosses Vidanges, celles que l'on déposera dans le Dernier Dépotoir, mais peu importe, nous étions LÀ mon ami, peu importe nous étions LÀ, avec ou sans permis...

***

Je ne sais pas si j'ai bien résumé la pièce Les Grenouilles et les Parapluies Idées, Corps et Voix en quête d'une fête révolutionnaire ANTIGONE COMME SPECTACLE SANS FIN, mais c'est en vrac ce qui m'est resté dans ma mémoire de ce 28 septembre-là, celui de l'an 2006...

***

Pour terminer cette soirée inoubliable, les Spectacteurs furent conviés à rester dans la Maison, afin d'y rencontrer les Comédiens-Musiciens, le Metteur en scène et ses assistants. Ce fût pour la Spectatrice une joie, oui, une vraie fête, comme on se plaît à qualifier les scéances de l'Urd...Encore sous le charme de cette pièce révolutionnaire, je soumis à l'Auteur presque un questionnaire, lui qui est très discret..Hanna Abd El Nour: un homme affable, généreux et respectable, il porte en lui, comme chaque être humain sur cette Terre Mère en porte un, le charme intègre de son propre mystère...Mais je dois apprendre à me taire pour retourner le fer dans la Plaie, celle que le Feu du JEU immolé a laissé en moi et à ceux qui l'ont créée, pour y éveiller ce qui dormait dans le creux et l'extrémité de nos sens endormis...Merci au Théâtre de l'URD et à tous ceux et celles qui rêvent d'un pays libre.

C'était le Jeudi 28 septembre 2006...


publié par Les Jambes Urbaines à 12:21 PM
in THE FLYNG PAPERS
http://theflyingpapers.blogspot.com/



*Régis, ainsi qu'Alain, étaient de l'assistance...ce soir-là.



mardi 22 juin 2010

Une suite pour l'histoire des petits écureuils morts dans la boîte de croissants dehors


Carl et sa écureuille


Dimanche, 3 janvier 2010, je relis un texte datant du 19 mai 2006, je décide de le copier-coller aux Envapements: http://envapements.blogspot.com/2010/01/les-petits-ecureuils-morts-dans-la.html

La beaunté de l'affaire: c'est qu'à cause (ou grâce) à Facebook j'ai pu "récupérer" la fameuse photo qui ne voulait plus se copier, elle était affichée sur la page de Carl. Par ce fait, il est entré en communication avec moi.

Carl Caron 23 juin 2010, à 01:34
Réponse : :)

Ahhh wow, oui bien sur que tu peux utiliser les photos avec l'écureuille. :) Et pour ton information, je l'ai laissée à une petite fille et sa grande soeur qui viennent à mon travail (superC) avec leur père, sauf la grande car elle est plus vieille maintenant. Elles l'ont gardée quelques mois je crois, mais elles l'ont remise dans la nature par après. Un beau lien s'est créé depuis avec moi et elles, et maintenant l'ex-copain à Jessica la plus vieille travaille avec nous! C'est quand même drôle. :)

Il y avait donc une suite à cette belle histoire d'écureuil (le) s, la sienne autant que la mienne. Mais il ne faudrait pas partir de rumeurs...;-) Faut dire que c'est un peu grâce (ou à cause) de Patrick Brisebois et Stéphane Larue si je suis " tombée" sur Carl. Stéphane et Carl qui un jour m'ont illustré deux de leurs grands cygnes avant-coureurs...

en mémoire de ce temps-là
elquidam


mardi 15 juin 2010

LITTORAL-INCENDIES-FORÊTS: Promettre le sang


Jean Alibert LE CHEVALIER GUIROMELAN
photo: Jean-Louis Fernandez


Nous n’appartenons à personne; nous appartenons à notre capacité de mettre en forme la beauté qui nous hante. *

Aller vers l’autre, parfois, c’est comme pénétrer dans une forêt vierge. *

Wajdi Mouawad 

La famille qui ferme les volets sur elle-même devient inhumaine. [ ] La famille peut devenir l’enfermement le plus horrible et la quête généalogique c’est le risque de s’y emprisonner soi-même. *

Jean-Paul Damaggio
Au Carrefour de Wajdi Mouawad
2009

L'infection première est à la détresse ce que l'amour est à la guerre/ désertification de l'esprit qui s'assèche à chaque instant/ et puis quoi ?

Christian Lapointe
Le Souffleur
Les phrases de déreconstruction
2009

***

Extrait de LITTORAL

WILFRID: Je ne pleure pas. C'est la vie qui me brûle les yeux. Regarde-moi, chevalier Guiromelan, regarde-moi; aujourd'hui, plus personne ne m'appellera son fils! Aujourd'hui, il y a une peine en moi que je ne soupçonnais pas. Où j'irai elle ira, où je dormirai elle dormira. Je veux que tu deviennes à jamais invisible pour que je puisse mieux l'affronter. Le rêve que tu es m'aveugle trop de la vie.

Le rideau n’était pas encore tombé qu’il y naissait déjà d’autres mots par rapport à ce onzième Carrefour International de Théâtre de Québec

Second entracte, 19 heures, nous sommes debout à l’extérieur, et nous marchons afin de nous délier les jambes un peu; le temps s'est comme arrêté et il est absolument radieux, un temps de Liban. Le ciel est pratiquement tout dégagé. Nous étions là le 12 juin 2010. Nous étions là en train de créer cet événement: passer 12 heures ensemble, côte à côte, être venus écouter la parole d’un homme…

La trilogie LE SANG DES PROMESSES bouclait formidablement bien la boucle de cette impressionnante saison théâtrale 2009-2010, la mienne en tout cas, une saison que j’ai vécue au milieu de vous, Comédiens, Auteurs, Metteurs en scène, Régisseurs, Administrateurs. Et aujourd'hui, à VOUS, Équipe du Carrefour International de Théâtre, qui savez comment offrir au public de Québec de ces émotions nouvelles et atypiques, je demande de ne jamais craindre d'aller encore plus loin que la limite permise," d’exposer " le travail osé des créateurs d'ici et d'ailleurs, ceux-là qui nous donnent parfois l'impression d'avoir devancé le temps à défaut des sentiments. Ces hommes et ces femmes qui vivent, à peu de mots près, la même époque que leurs Spectateurs.

C’est en entendant quelques réflexions de certains d'entre eux, plus ou moins déçus de certaines pièces justement plus osées, qui m’incite à écrire pour vous encourager à toujours aller de l’avant. Stupéfaction no. 1: parler à l’Une qui voit à peu près tout ce qui se passe ici à Québec en théâtre, lui demander si elle avait vu LIMBES, me faire répondre que non, elle ne croyait pas avoir vue cette pièce, puis me demander: « Est-ce que c’est celle-là où il y avait un poteau et un gars perché dessus ? " Acquiescer sans trop vouloir en rajouter pour ne pas faire monter le petit laid qui commence à frémir. Et Elle, d’ajouter: " Si je me souviens, ça n’avait pas reçu de très bonnes critiques ? " ...Si vous saviez ce que j’en fais des critiques, moi, Madame ! ". Étonnement de ma part: comment fait-on pour ne pas s'être souvenu d'un tel objet semi-non identifié ? Mon idée de certains spectateurs était donc faite: ils vont au théâtre pour voir ce dont ils n'auront pas vraiment peur, voir ce qu'ils connaissent déjà....L’EFFET DE SERGE, ayant eu droit comme critiques de sa part qu'à des commentaires négatifs, je me dis que OUI, il y a des gens pour qui le théâtre ça doit être jamais " trop exigeant ni trop compliqué ". Stupéfaction no. 2: celle de ce voisin de la rangée E, assis à ma droite lors de la Trilogie, qui me demande comme ça: "Avez-vous vu CIELS ? Ce gentil voisin à qui je m'empresse de répondre avec le plus gros des OUI enthousiastes que je connaisse, qui me déconfiture ma mine réjouie avec son gros NON catégorique. J’aurais aprécié poursuivre cette discussion qui "promettait " mais le temps était venu...de se taire...pour entrer enfin dans le LITTORAL…Je me tus et me dis que moi aussi je devrais peut-être enfin tenir ma promesse, celle de parler de ce livre de Jean-Paul Damaggio, que le Train de Nuit m'avait fait parvenir si gentiment cet hiver pour mon anniversaire, et de glisser cette phrase de la page 112:

ET SI LE VERNIS CULTURE N’ÉTAIT RIEN D’AUTRE QU’UN ART D’OUBLIER LA VIE ?

***

Extrait du Carnet VIA
(nuit de samedi à dimanche, 13 juin 2010)

LE SANG DES PROMESSES est maintenant et simplement devenu un objet du passé. Quelle merveilleuse journée entrelacée dans les bras lasso de Wajdi Mouawad. Wajdi qui est venu saluer la foule en liesse de la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec. Une salle bondée à ras bords, une salle respectueuse venue célébrer ce spectacle hors normes, un autre de plus. A. était là, en ma froide compagnie. En fait, n’en déplaise à J., aucune larme n’a inondé le coin de mon petit coq-l’œil, le torrent n’étant probablement pas venu à cause de ce temps sec et chaud que nous avons depuis quelques mois. Mais peut-être une petite brume (sèche), est apparue à un moment donné lorsque les lèvres closes de la bouche édentée de Luce dans FORÊTS se sont ouvertes pour... parler, ou lorsque Nihad, dans INCENDIES pointa son arme d’assaut sur nous; nous, public bien calé dans son fauteuil confortable mais non éjectable. Oui, j'imagine de bien beaux dommages collatéraux...pour mon si petit cerveau...

LITTORAL, que je n’avais malheureusement pas encore vue, est probablement la pièce qui m’a le plus ébleuie …Cette peinture fraîche, étalée le long des corps, comme l'éternelle mouvance de l'Art sur l'Homme. Quelle découverte pour un spectateur qui ne connaissait de l’œuvre de Mouawad que son FORÊTS, son immensément et si percutant FORÊTS.

Tant de beauté. Déchiquetée. Broyée. Ébouillantée.
Tant de vies inoubliables. Tant de morts… viables..
Comment ne pas s’être quelques fois perdu en chemin ?


Tant de mots
Tant de monde


Et les Comédiens, tels de véritable caméléons, qui ont parfaitement illustré l’histoire absolue de ces horreurs d’un passé toujours aussi présent dans les musées éventrés de mon cœur sec. Des musées comme ceux dans lesquels les kamikazes de CIELS sont entrés le soir du 31 mai.

Le bleu de la mer navigateur
Le blanc du sperme géniteur
Le rouge des sangs créateurs


C’est de ce littoral-là que je veux te parler, de ce frère lointain qui attend lui aussi fébrilement que le reste de ses descendants le retrouvent. Dans le drap plissé de la Mort, nos pères et ceux de nos autres demi-frères…L’eau qui asperge le corps moisi, l’eau qui le bénit d’entre tous les poissons…Le souvenir d’une vie faite de routes cahoteuses, de grèves chaudes, d’INCENDIES

L’attelage de nos propres sentiments à celui du corps bandé de l’Homme, son sexe pris entre la peau et la pierre, son sang bouillonnant dans la marmite de la Maternité, le temps d’un viol et/ou d’un accouchement…La dominance des dominés. L’exil de l’expatrié. La mémoire de l’aisance. À défaut de ne pas avoir versé de larmes cette nuit-là, je vois et j’entends celles d’enfants séquestrés dans la forêt Keller, celle d’Edmond le Girafon, celle par où descendra la meute de Loup

FORÊTS, que nous avions vue il doit y avoir quelques quatre ans, qui nous avait jetés en bas de notre siège, qui nous avait emmenés dans le monde Mouawad. Et comme si nous devions nous revoir avant de rentrer à la maison, à nouveau je croisa le visage d’Éric Simard. Ses yeux m’ont paru troublés, fatigués mais comblés, il avait du pleurer…Nous n'avions à ce moment aucun mots pour décrire ce à quoi nous venions d’assister. Comme une seconde naissance. Un appel à la première…Un rappel à la pierre...

Moi qui un jour de sentiments mêlés croyais avoir inventé le mot amouritié, quelle ne fut pas ma surprise de l’entendre prononcer dans LITTORAL, alors que le père de Wilfrid fait ses aveux à Jeanne, future mère de Wilfrid, morte en lui donnant la vie. Amouritié, un mot qui a et aura toujours sa place dans mon humble vocabulaire.

Ne plus être capable d’écrire après ÇA. Ne plus aller au théâtre. Prendre un gros break. Et rire un peu plus...Mais, parce qu'il faut toujours un mais...recevoir une faust invitation inattendue de la part de Hanna Abd El Nour, du théâtre de l'URD, pour assister " en personne "à une performance théâtrale sur la rue des Commissaires...Une autre belle sortie audacieuse en perspective... sous d'autres cieux...

***

Pendant qu' INCENDIES tournait sur scène, des images du CIELS me sont descendues dans la tête, qui n'était pas encore tout à fait pleine. Nommez-moi quelqu’un ici, dans l’Assistance, qui n’ait jamais pensé qu’un tel carnage finira par arriver un de ces jours de grande canicule crépusculaire ? Faire sauter huit kamikazes en même temps dans huit des plus grands musées de grandes villes ? Le 8, celui-là qui est inversé, c'est pas le symbole de l’Infini ? Et si ces musées c’était nous ? Ces musées que l'on fait exploser à coups de pinceaux sur nos corps en morceaux...Ces musées remplis à ras bords de NOS histoires de famille...ces toiles et tissus(déchirés), ces sculptures et bijoux (astiqués), beaux objets qui dorment près de nos sépultures, mais qui sont-ils sinon nous, ou cette part de nous-mêmes qui s'en empare et s'en pare ? Cet éclat du réel dans le virtuel, cet os planté dans la tête d'une femme morte...ces armes blanches qui dépècent des corps d'enfants choisis au hasard...ces œuvres de chair à canons aspergées par le chimique de nos eaux bues, ces œuvres théâtrales qui ne craindront pas les contagions, ces rêves qui ne résisteront plus aux cauchemars prochains de notre extinction...

MAIS LE THÉÂTRE N’ENTRE PAS DANS AUCUN MUSÉE, ON NE PEUT S’EN SAISIR COMME UNE PROPRIÉTÉ, CAR COMME L’AGRICULTURE, IL EST CONDITIONNÉ PAR LA VIE ET NON PAR LA MACHINE. 

J.P. Damaggio




Mon coup de cœur va droit à JEAN ALIBERT, pour son interprétation tout en finesse du Chevalier Guiromelan dans LITTORAL ainsi que pour son seul et unique Edmond le Girafon dans FORÊTS. C'était là l'un des plus beaux moments de ce Carrefour International, un pur ravissement pour mon oreille droite, la gauche étant pratiquement devenue sourde, le temps d'une explosion de cire dans son tympan...

WAJDI N’A QU’UN SOUCI: RENCONTRER LE PUBLIC ET POUR ÇA, S’IL LE FALLAIT, IL UTILISERAIT LA PIROGUE POUR PÉNÉTRER PAR LES VOIES IMPOSSIBLES CONDUISANT AU PLUS PRÈS DES VIVANTS !



Se nourrir ensuite des applaudissements authentiques, de l'amour du public, voilà le secret de l’origine de son succès. Il ne cherche jamais à être grand par la grandeur de ceux qui le regardent, et ce simple fait saute aux yeux de Spectateur comme un ballon au milieu de la figure.

Jean-Paul Damaggio
(p.78)

***

STANISLAS NORDEY PARLANT DE WAJDI



WAJDI MOUAWAD SUR LE SANG DES PROMESSES




ET +




 
« CRÉER C’EST CRIER »
............................

Merci encore une fois à Marie Gignac et à sa dynamique équipe de nous avoir procuré de ces instants inoubliables. Merci également à l'équipe dévouée et chaleureuse des bénévoles sans qui nous n'aurions pu bénéficier de leurs sourires attentionnés. Le prochain Carrefour sera présenté du 25 mai au 11 juin 2011, ce n'est donc que partie remise. CIAO ! Et peut-être que Jean-Michel Girouard sera sur scène ce coup-là, lui avec qui nous avons encore une fois croisé le faire...et le dire !



lundi 14 juin 2010

Les corps célestes (2)


Wajdi Mouawad

En attendant les impressions du SANG DES PROMESSES, voici les membres de sa tribu, des comédiens et des comédiennes de feu, comme il en faut pour entreprendre de ces odyssées hors père...



Mireille Naggar

Jean Alibert

Marie-France Marcotte

Yannick Jaulin

Véronique Côté

Tewfik Jallab

Richard Thériault


Patrick Le Mauff



Marie-Ève Perron


Linda Laplante


Lahcen Razzougui


Jocelyn Lagarrigue


Isabelle Roy


Isabelle Leblanc


Guillaume Sévérac-Schmitz


Ginette Morin


Gérald Gagnon


Emmanuel Schwartz


Catherine Larochelle

Bernard Meney


Annick Bergeron



Valeriy Pankov




mardi 8 juin 2010

Les corps célestes

Hugo Koolschijn

Fedja van Huêt

Chico Kenzari

Roeland Fernhout

Renée Fokker

Fred Goessens

Marieke Heebink

Hans Kesting

Hadewych Minis

Chris Nietvelt


Frieda Pittoors

Alwin Pulinckx

Halina Reijn

Eelco Smits

Karina Smulders

Ivo van Hove

Parce qu'il fallait garder le souvenir impérissable de ces prodigieux comédiens, mettre des visages sur leurs noms un peu compliqué à prononcer. Depuis vendredi dernier, envahie par ce spectacle hors normes, en avoir parlé à tous les pierrejeanjacques que je rencontre sur mon chemin. Et surtout, ne pas essayer de toujours vouloir tout leur faire comprendre. Laisser aller leur imaginaire dans le mien. Puis laisser faire le reste. Avoir " assisté " les Comédiens. Leur avoir passé le bon bistouri pour qu’ils continuent d'opérer. Avoir apprivoisé la scène comme un objet dérobé et bien identifié. Vouloir maintenant me faire prescrire d’autres pièces fleuve de ce genre. C’est ce que le Toneelgroap Amsterdam nous a donné vendredi soir dernier au Grand Théâtre de Québec. Jamais je n’oublierai ces moments haut de gamme. Jamais je n’oublierai le son de guerre des tambours du Bl!ndman [drums]. Jamais. En espérant que cette troupe des plus vivantes revienne nous voir un de ces soirs de juin.

Elquidam

samedi 5 juin 2010

TRAGÉDIES ROMAINES: L'armée des mots will won't be


Hans Kesting
Marc-Antoine


Ailleurs
C’est peut-être loin
Ou c’est p’t-être à côté
Ailleurs
C’est p’t-être avec moi
Quelque part entre nous
Faudrait y aller…

Prologue (Jaune)
Jean-Pierre Ferland
1970
 
HALLO

Vendredi, 4 juin 2010, 17:45 heures...Dans l'enceinte de la salle Louis-Fréchette du GTQ, les spectateurs prendront place...en toute liberté, puisque c’est admission générale. Il y a plusieurs comédiens, metteurs en scène, gens de théâtre de Québec, ce n'est pas tous les jours fête...(Frédéric Dubois attend derrière moi pour faire déchirer son billet)...On sent l'excitation, la hâte, la joie d'assister à cet événement. On entre...enfin.

Le dispositif scénique est impressionnant, on se pense dans l’un de ces grands bureaux du gouvernement à tapis gris qu'on aurait transformé en décor de salle des congrès. 24 heures sur 24, le monde est aux aguets d'une nouvelle guerre. Les médias sont installés, les écrans projètent de nous en faire voir de toutes les couleurs...

Les comédiens du Toneelgroep Amsterdam, sous la direction d'Ivo van Hove, ont pris place eux aussi dans l'immense studio. CORIOLAN, la première des trois TRAGÉDIES ROMAINES commence…Comme la langue utilisée est le néerlandais, le surtitrage est de mise; nous lirons donc ces textes immortels de William Shakespeare pendant près de 6 heures. Du temps emprunté à l'Histoire...

La Louve capitoline


GUERRES, TRAHISONS, AMITIÉS, AMOURS…le breuvage divin des mots de Shakespeare, l’alcool des flûtes enchantées, le pourboire pour l'auteur (Eric Sleichim) de cette musique omniprésente (BL!NDMAN [drums]) qui résonnera fort lorsque la guerre fera rage sur les territoires de l'Italie, le stroboscope éclairant la fureur de la nuit sans étoile. La guerre, pour le temps d’une paix…La mort, pour la vie du fils, et celle de la mère. La mort tout court.

(Les pauses sont de 5 minutes, le temps de monter sur scène, changer le décor, prendre un verre au bar, avaler quelques bouchées, placoter avec son voisin, envoyer un petit courriel (ou un gros twit), à ses amis qui sont peut-être en train de prendre une bière sur une terrasse du centre-ville de Montréal Ouest ou encore de passer la tondeuse sur le gazon jaune de leur tranquille banlieue verte... du jamais vu au théâtre).

JULES CÉSAR...S’apercevoir que rien n’a véritablement changé depuis les coups de marqueur rouge sur son célèbre manteau…La plèbe, qui non plus n’a pas tellement changé: toujours aussi bon enfant (ou mauvaise spectatrice), avachie devant ses beaux grands écrans de plasma pour constater les beaux grands dégâts idéobiologiques de ses malencontreux dirigeants…

ANTOINE ET CLÉOPÂTRE... La compagnie des Caïus Marcius Coriolanus, Marcus Junius Brutus, Attius Tullius Aufidius, César, Marc-Antoine, Cléopâtre et autres protagonistes de ces sanglantes morts nous aura déterré l'envie de les connaître davantage…Le Spectateur est convié à monter sur la scène lui aussi, il pourra donc voir de plus près le travail impeccable de ces comédiens investis de je ne sais quel pouvoir magique du comment ressusciter les morts d’entre les vivants…

Et contrairement à l'opinion de M. Éric Moreault du Soleil:

« j'adhère moins, par contre, aux spectateurs comme partie du décor. Je ne trouve pas particulièrement intéressant de voir sur scène acteurs en habit de ville, quidams et journalistes quand on voit un acteur en gros plan. C'est une démocratisation extrême de l'expérience théâtrale. Soit. Mais c'est aussi une désacralisation et une perte de la magie de la représentation. »



Je me suis réjouie d'y avoir participé et ainsi d'avoir pu lire sur les visages des artisans de notre théâtre tout le plaisir qu'ils avaient à côtoyer l'intimité de ces grands acteurs et techniciens venus de l'aut' bord. Ils étaient là pour se nourrir eux aussi...Pour clore ces trois tragédies romaines, une chanson qui ne vieillira jamais, celle d'un vieux rêveur rock'n roller...



Come senators, congressmen Please heed the call Don't stand in the doorway Don't block up the hall For he that gets hurt Will be he who has stalled There's a battle outside ragin'. It'll soon shake your windows And rattle your walls For the times they are a-changin'...


Avec cet exercice théâtral hors du commun, le Carrefour International de Théâtre aura réussi en tout point de vue à exorciser nos démons, mais peut-être est-il préférable de laisser courir les restants d’imaginaire de cette soirée inimaginable pour les prochains sentiers abattus…


La bave qui sort des bouches pleines de rage, ou d'amour, les coups de langues sur le visage des traîtres, les doigts brûlants qui prennent les peaux froides, les yeux croches qui touchent les âmes pures, la Louve Capitoline ressuscitée pour un soir à Québec, ici, entre les sofas, les projecteurs et le son tonitruant des tambours battants des jeunes musiciens...



Je n'ai pu m'empêcher d'avoir une petite pensée pour Christian Lapointe, qui en ce moment séjourne à Amsterdam, j’ai peut-être compris pourquoi il est là-bas, pourquoi il est ailleurs...Les quelques mots échangés avec Martin Genest, brillant et ingénieux metteur en scène qui nous a donné Octobre 70 ce printemps à la Caserne Dahlousie, n'ont fait qu'ajouter du baume à cette soirée de plaies Sir Will.

Et parce qu'il faut bien finir par mettre des noms sur ces beaux visages inconnus, celui de Hans Kesting, qui te regarde en plein dans le soleil de ton oeil alors que tu l'applaudis à tout rompre pour ce spectacle inouï qui vient encore une fois de te flamber la prunelle de ta cervelle. Hans Kesting, incontestablement celui-là qui m'a le plus chavirée ce soir. Quelle beauté d'homme ! comme dirait l'autre...

Et qui croise-t-on au sortir de cette splendide et mémorable soirée ? Nul autre que Jean-Michel Girouard, celui-là même qui était assis aux côtés de A. lundi soir dernier pour voir le CIELS majestueux de Wajdi Mouawad. C'en est maintenant fait: la coupe est presque pleine, ne manque plus que LE SANG DES PROMESSES vendredi soir prochain pour la faire déborder...de joie.

Ici, quelques mots d'adon...

Après la guerre
je rêve de ton corps
diplomatique



Alain Larose
Harikots collection CRiTURes
http://www.moulteditions.com/


La beauté de l'Acteur: ce don qu 'il a de nous faire réfléchir autant que rire...
Découvert sur YouTube ...HALLO...





Bande-annonce:






DANK U


Texte: William Shakespeare
Mise en scène: Ivo van Hove
Interprétation: Roeland Fernhout, Renée Fokker, Fred Goessens, Marieke Heebink, Fedja van Huêt, Chico Kenzari, Hans Kesting, Hugo Koolschijn, Hadewych Minis, Chris Nietvelt, Frieda Pittoors, Alwin Pulinckx, Halina Reijn, Eelco Smits, Karina Smulders
Traduction néerlandaise: Tom Kleijn
Dramaturgie: Bart Van den Eynde, Jan Peter Gerrits, Alexander Schreuder
Costumes: Lies Van Assche
Vidéo: Tal Yarden
Musique: Eric Sleichim
Scénographie / Lumière: Jan Versweyveld
Musiciens: Bl!ndman [drums] Ruben Cooman, Ward De Ketelaere, Yves Goemaere, Hannes Nieuwlaet
Assistance à la mise en scène: Matthias Mooij
Assistance à la scénographie: Ramón Huijbrechts
Assistance à la composition musicale: Ief Spincemaille
Direction technique et production: Götz Schwörer

Merci au CARREFOUR INTERNATIONAL DE THÉÂTRE et plus particulièrement à Madame Marie Gignac qui par ses découvertes flamboyantes nous offre le privilège de goûter à ces brûlants " hors-d'oeuvres théâtraux...


Finalement, le néerlandais, c'est pas si compliqué que ça. ;-)


mardi 1 juin 2010

Les marteaux


André Mathieu
(18 février 1929 à Montréal - 2 juin 1968)


Concerto # 4






André Mathieu est le fils du pianiste et compositeur Rodolphe Mathieu et de la violoncelliste Wilhelmine « Mimi » Gagnon. Il compose ses premières pièces pour piano à l'âge de quatre ans (Les Gros chars; Trois études). À 5 ans, il donne son premier concert en public à Montréal en interprétant son Concertino no 1 avec orchestre.

(wikipedia)

Rien de plus beau que la Musique, la grande, la vraie, l'inévitable, la sensationnelle, et pourtant, on en retrouve parfois...dans une vitrine, ou dans une poubelle...

André Mathieu, L'ENFANT PRODIGE, l'abeille piquante dans la ruche, celui qui avait tout le talent mais pas vraiment tout son temps...Le film de Luc Dionne relate en deux partie la vie de ce compositeur mort prématurément à l'âge de 39 ans. Les moments forts de cette émouvante histoire sont ceux où la musique, la sienne, devient le rôle principale. Une scène entre autres qui a frappé nos marteaux un peu plus fort que les autres, celle où l'on entre dans son piano pour y voir vibrer les cordes...sous les marteaux.


Guillaume LeBon et Patrick Drolet interprètent avec brio les deux André Mathieu. Macha Grenon et Marc Labrèche, dans le rôle des parents tourmentés, livrent une performance comme on pouvait s'y en attendre, c'est-à-dire, juste et bonne...À leurs côtés, Benoit Brière en Wilfrid Pelletier, que l'on aurait le goût d'étriper, Marc Béland en Arthur Honneger, un passage furtif mais intense et Lothaire Bluteau, qui faisait plaisir à revoir.

Merci à Alain Lefèvre de nous avoir révéler ce petit homme plus grand que nature, c'est un legs important qu'il offre aux mélomanes d'ici et d'ailleurs. Pour en savoir un peu plus sur la vie mouvementée du pianiste oublié, une biographie de Georges Nicholson, publiée chez Québec Amérique.




Demain c'est le 2 juin, il y aura donc 42 ans qu'André Mathieu aura disparu de notre pays sage, trop sage, et trop carré...