dimanche 27 mars 2016

FEYDEAU ADULTES & ADULTÈRE : l’art de la rencontre




Feydeau, c’est « ce gars-là » qui a mené une vie assez rock n’ roll à une époque qui n’avait absolument rien à envier à la nôtre. Il se droguait, jouait et trompait sa femme avec une certaine ardeur dit-on, ceci pour stimuler sa fertile imagination. Parce que de la tromperie et de l’ardeur ce n’est pas ce qui manque dans les nombreuses pièces qu’il a créées entre 1869 et 1921. Sa mère a dit qu'il était le fils de Napoléon III, d'autres qu'il serait le fils du demi-frère de l'Empereur. On se pose des questions mais passons. Acteur au talent plus ou moins incertain, il préféra plutôt s’adonner à l’écriture, et s’il faut en croire les rires qui fusaient en ce 17 mars 2016 au Théâtre de LA BORDÉE, et veuillez me croire par écrit, ce fût un excellent choix.


Le beau Georges


Le jeudi 17 mars, jour de fête de la Saint-Patrick, une pleine tablée de gais lurons et luronnes festoient à la brune irlandaise et au fondant smoke meat de CHEZ PHIL. Pour une fois, nous ne serons pas tranquilles. Parce que le Théâtre ne se joue pas que sur les scènes des différents diffuseurs de la ville mais ici, dans la chaleur de cet endroit fort sympathique devenu au phil du temps notre port d’attache avant d’aller voguer sur les flots d’ires et de rires que nous offre depuis bientôt 40 ans l’accueillant Théâtre de La Bordée.





En ce soir de presque printemps, il nous emmenait dans la préquelle du Tout Paris des années folles, celui du prince des jouisseurs, maître incontesté du vaudeville. Quiproquo et Imbroglio, deux de ses personnages préférés, issus de la bourgeoisie populaire passent de la bouffonnerie à la sentimentalité en passant par l’hypocrisie et la grivoiserie. Ne pas trop y réfléchir mais y penser un peu…





Ah! non, non pas ça ! Je suis royaliste, moi ! La Marseillaise, merci ! C'était bon sous l’Empire !...quand j’étais républicain !

OCCUPE-TOI D’AMÉLIE
Georges Feydeau
15 mars 1908

FEYDEAU ADULTES & ADULTÈRES est une série de six pièces (trois longues et trois courtes) mais seulement quatre d’entre elles seront jouées par représentation. La belle surprise: c’est le public qui les choisit en vérifiant en dessous de son siège pour voir s’il n’y aurait pas un papier collé déterminant l’heureux (se) élu(e). En ce soir du 17 mars, ce furent dans l’ordre: AMOUR ET PIANO, C’EST UNE FEMME DU MONDE (entracte), puis UN BAIN DE MÉNAGE et finalement DORMEZ, JE LE VEUX ! 




Quatre super cadeaux surprises de M. Jacques Leblanc, l’énergique metteur en scène de ce bijou du théâtre vaudeville français. Écoutez ce qu’il avait à nous raconter à ce qui...PROPOS:



AMOUR ET PIANO

Comédie en un acte, représenté pour la première fois sur la scène du théâtre l’Athénée, le 28 janvier 1883. Pièce très bien reçue par la critique, elle le fut d’emblée par les spectateurs de La Bordée. Le maestro tant attendu pour la leçon de piano n’est pas toujours celui que l’on croyait être et encore moins la femme aux mœurs légères, mais parfois, se tromper de porte rapporte énormément. Une excellente mise en bouche pour...C’EST UNE FEMME DU MONDE




C’EST UNE FEMME DU MONDE

Comédie en un acte, représentée pour la première fois sur la scène de La Renaissance le 10 mars 1890. Emporte-pièce découpant drôlement bien la bonne pâte riche et feuilletée de la frivolité à même la bourgeoisie qui la composait à la dite Belle Époque...




Les filles de bas étages qui se la jouent haute avec des hommes qui trompent leurs femmes...et les apparences. Un vrai délice que de voir reluire toutes ces répliques qui tombent toujours à pic sous les mirobolantes robes de femmes d’un monde qui avait ma foi aussi soif de bien paraître que celles de 2016. 







Et ces portes ! qui s’ouvrent, se ferment, où on y entre par la mauvaise pour en ressortir par la plus ou moins bonne, qui nous promènent de l’enfer au paradis, où l’on s’y cogne le nez ou que l’on force. Toutes ces portes qui claquent des doigts et grincent des dents, qui nous mènent tout droit vers l’entracte avec des sourires aux lèvres fendus jusqu'aux oreilles, des sourires que l’on souhaiterait éternels, comme des diamants. Et dire que cette pièce fût considérée comme un échec…


ENTRACTE





UN BAIN DE MÉNAGE


Vaudeville en un acte, représenté pour la première fois sur la scène du Théâtre de la Renaissance, le 13 avril 1888. C’est un échec avec seulement 16 représentations. Feydeau en fut le secrétaire avant que n’y soit créé TAILLEUR POUR DAMES, sa première pièce et son premier grand succès.


1909


Encore de la tromperie joyeuse avec une abondance de rebondissements. Et au milieu de la scène « baignée » de lueur bleutée: la divine baignoire, celle par qui toute le chambardement arrive. Un homme revient plus vite que prévu de son rendez-vous galant manqué et voilà le drame pour ces belles et bonnes dames à commencer par la bonne Adélaïde, désopilante Monika Pilon, qui pour rien au monde ne voudrait gaspiller l’invitante eau chaude que sa maîtresse Laurence décide d’abandonner afin d’y détendre son gros ventre de femme enceinte jusqu’aux yeux. Une panoplie de chassés-croisés s'en suivent, astucieusement bien orchestrés, ce qui finira par faire redescendre la vapeur de cette fameuse baignoire. 


  

DORMEZ, JE LE VEUX !

Vaudeville en un acte, représenté pour la première fois à Paris, le 29 avril 1897 sur la scène de l’Eldorado, aujourd’hui le Comédia. Un valet malicieux qui contrôle son maître en l’hypnotisant afin qu’il exécute ses ennuyantes corvées se fera prendre à son petit jeu par un grand expert en mesmérisme. Une performance électromagnétique qui en met plein la vue aux spectateurs ultra branchés du parterre autant qu’à ceux hauts perchés du balcon. Encore une fois, les comédiens, sous la stimulante direction de Jacques Leblanc, ont cohabité en parfaite osmose sur un parquet flottant entre les rires et l’intelligence.




Auguste Lepère



Pour clore ce spectacle drôle et coloré, les filles nous ont enCHANTÉ avec une exquise version de LES NUITS D’UNE DEMOISELLE. Pour se faire encore plaisir, la revoici donc; elle est interprétée par Colette Renard, celle-là même qui l'a rendue populaire en 1963.







LES COMÉDIENS

BERTRAND ALAIN: Valencourt, Hector, Baptiste, Alfred et Follbraguet
SOPHIE DION: Francine, Laurence, Philomène et Marcelle
CHANTAL DUPUIS: Émilienne,Emma, Lucille, Pervenche et Hortense
OLIVIER NORMAND: Justin, Hector, Cocarel, Paturon, Monsiwur Jean et Vildamour
PATRICK OUELLET: Boriquet, Édouard, Catulle, Gogolet et Adrien
MONIKA PILON: Éloi, Emma, Adélaïde, Giboulette, Madame Dingue, la cuisinière et Monsieur Lebouco




Des artistes qui se sont investis à fond la caisse pour nous faire passer une autre de ces soirées libératrices d'actualités plutôt morbides ces jours-ci. Le transport d'une communauté de mots écrits par Feydeau traverse les siècles et fera toujours flèche de tout bois tant qu'il y aura des hommes et des femmes pour les faire voyager jusqu'à nous, Spectateurs avides d'hypnoses en tout genre...;-) Merci de nous avoir enrichis du talent indéniable de cet homme du monde.   



  


Les photos du spectacle sont celles de Nicola-Frank Vachon.

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Annexe

Une belle coïncidence, on présentera à la Salle Albert-Rousseau LE PRINCE DES JOUISSEURS, un comédie biographique de Feydeau mise en scène par Gabriel Sabourin. Un soir seulement, le 10 avril.










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