samedi 5 juin 2010

TRAGÉDIES ROMAINES: L'armée des mots will won't be


Hans Kesting
Marc-Antoine


Ailleurs
C’est peut-être loin
Ou c’est p’t-être à côté
Ailleurs
C’est p’t-être avec moi
Quelque part entre nous
Faudrait y aller…

Prologue (Jaune)
Jean-Pierre Ferland
1970
 
HALLO

Vendredi, 4 juin 2010, 17:45 heures...Dans l'enceinte de la salle Louis-Fréchette du GTQ, les spectateurs prendront place...en toute liberté, puisque c’est admission générale. Il y a plusieurs comédiens, metteurs en scène, gens de théâtre de Québec, ce n'est pas tous les jours fête...(Frédéric Dubois attend derrière moi pour faire déchirer son billet)...On sent l'excitation, la hâte, la joie d'assister à cet événement. On entre...enfin.

Le dispositif scénique est impressionnant, on se pense dans l’un de ces grands bureaux du gouvernement à tapis gris qu'on aurait transformé en décor de salle des congrès. 24 heures sur 24, le monde est aux aguets d'une nouvelle guerre. Les médias sont installés, les écrans projètent de nous en faire voir de toutes les couleurs...

Les comédiens du Toneelgroep Amsterdam, sous la direction d'Ivo van Hove, ont pris place eux aussi dans l'immense studio. CORIOLAN, la première des trois TRAGÉDIES ROMAINES commence…Comme la langue utilisée est le néerlandais, le surtitrage est de mise; nous lirons donc ces textes immortels de William Shakespeare pendant près de 6 heures. Du temps emprunté à l'Histoire...

La Louve capitoline


GUERRES, TRAHISONS, AMITIÉS, AMOURS…le breuvage divin des mots de Shakespeare, l’alcool des flûtes enchantées, le pourboire pour l'auteur (Eric Sleichim) de cette musique omniprésente (BL!NDMAN [drums]) qui résonnera fort lorsque la guerre fera rage sur les territoires de l'Italie, le stroboscope éclairant la fureur de la nuit sans étoile. La guerre, pour le temps d’une paix…La mort, pour la vie du fils, et celle de la mère. La mort tout court.

(Les pauses sont de 5 minutes, le temps de monter sur scène, changer le décor, prendre un verre au bar, avaler quelques bouchées, placoter avec son voisin, envoyer un petit courriel (ou un gros twit), à ses amis qui sont peut-être en train de prendre une bière sur une terrasse du centre-ville de Montréal Ouest ou encore de passer la tondeuse sur le gazon jaune de leur tranquille banlieue verte... du jamais vu au théâtre).

JULES CÉSAR...S’apercevoir que rien n’a véritablement changé depuis les coups de marqueur rouge sur son célèbre manteau…La plèbe, qui non plus n’a pas tellement changé: toujours aussi bon enfant (ou mauvaise spectatrice), avachie devant ses beaux grands écrans de plasma pour constater les beaux grands dégâts idéobiologiques de ses malencontreux dirigeants…

ANTOINE ET CLÉOPÂTRE... La compagnie des Caïus Marcius Coriolanus, Marcus Junius Brutus, Attius Tullius Aufidius, César, Marc-Antoine, Cléopâtre et autres protagonistes de ces sanglantes morts nous aura déterré l'envie de les connaître davantage…Le Spectateur est convié à monter sur la scène lui aussi, il pourra donc voir de plus près le travail impeccable de ces comédiens investis de je ne sais quel pouvoir magique du comment ressusciter les morts d’entre les vivants…

Et contrairement à l'opinion de M. Éric Moreault du Soleil:

« j'adhère moins, par contre, aux spectateurs comme partie du décor. Je ne trouve pas particulièrement intéressant de voir sur scène acteurs en habit de ville, quidams et journalistes quand on voit un acteur en gros plan. C'est une démocratisation extrême de l'expérience théâtrale. Soit. Mais c'est aussi une désacralisation et une perte de la magie de la représentation. »



Je me suis réjouie d'y avoir participé et ainsi d'avoir pu lire sur les visages des artisans de notre théâtre tout le plaisir qu'ils avaient à côtoyer l'intimité de ces grands acteurs et techniciens venus de l'aut' bord. Ils étaient là pour se nourrir eux aussi...Pour clore ces trois tragédies romaines, une chanson qui ne vieillira jamais, celle d'un vieux rêveur rock'n roller...



Come senators, congressmen Please heed the call Don't stand in the doorway Don't block up the hall For he that gets hurt Will be he who has stalled There's a battle outside ragin'. It'll soon shake your windows And rattle your walls For the times they are a-changin'...


Avec cet exercice théâtral hors du commun, le Carrefour International de Théâtre aura réussi en tout point de vue à exorciser nos démons, mais peut-être est-il préférable de laisser courir les restants d’imaginaire de cette soirée inimaginable pour les prochains sentiers abattus…


La bave qui sort des bouches pleines de rage, ou d'amour, les coups de langues sur le visage des traîtres, les doigts brûlants qui prennent les peaux froides, les yeux croches qui touchent les âmes pures, la Louve Capitoline ressuscitée pour un soir à Québec, ici, entre les sofas, les projecteurs et le son tonitruant des tambours battants des jeunes musiciens...



Je n'ai pu m'empêcher d'avoir une petite pensée pour Christian Lapointe, qui en ce moment séjourne à Amsterdam, j’ai peut-être compris pourquoi il est là-bas, pourquoi il est ailleurs...Les quelques mots échangés avec Martin Genest, brillant et ingénieux metteur en scène qui nous a donné Octobre 70 ce printemps à la Caserne Dahlousie, n'ont fait qu'ajouter du baume à cette soirée de plaies Sir Will.

Et parce qu'il faut bien finir par mettre des noms sur ces beaux visages inconnus, celui de Hans Kesting, qui te regarde en plein dans le soleil de ton oeil alors que tu l'applaudis à tout rompre pour ce spectacle inouï qui vient encore une fois de te flamber la prunelle de ta cervelle. Hans Kesting, incontestablement celui-là qui m'a le plus chavirée ce soir. Quelle beauté d'homme ! comme dirait l'autre...

Et qui croise-t-on au sortir de cette splendide et mémorable soirée ? Nul autre que Jean-Michel Girouard, celui-là même qui était assis aux côtés de A. lundi soir dernier pour voir le CIELS majestueux de Wajdi Mouawad. C'en est maintenant fait: la coupe est presque pleine, ne manque plus que LE SANG DES PROMESSES vendredi soir prochain pour la faire déborder...de joie.

Ici, quelques mots d'adon...

Après la guerre
je rêve de ton corps
diplomatique



Alain Larose
Harikots collection CRiTURes
http://www.moulteditions.com/


La beauté de l'Acteur: ce don qu 'il a de nous faire réfléchir autant que rire...
Découvert sur YouTube ...HALLO...





Bande-annonce:






DANK U


Texte: William Shakespeare
Mise en scène: Ivo van Hove
Interprétation: Roeland Fernhout, Renée Fokker, Fred Goessens, Marieke Heebink, Fedja van Huêt, Chico Kenzari, Hans Kesting, Hugo Koolschijn, Hadewych Minis, Chris Nietvelt, Frieda Pittoors, Alwin Pulinckx, Halina Reijn, Eelco Smits, Karina Smulders
Traduction néerlandaise: Tom Kleijn
Dramaturgie: Bart Van den Eynde, Jan Peter Gerrits, Alexander Schreuder
Costumes: Lies Van Assche
Vidéo: Tal Yarden
Musique: Eric Sleichim
Scénographie / Lumière: Jan Versweyveld
Musiciens: Bl!ndman [drums] Ruben Cooman, Ward De Ketelaere, Yves Goemaere, Hannes Nieuwlaet
Assistance à la mise en scène: Matthias Mooij
Assistance à la scénographie: Ramón Huijbrechts
Assistance à la composition musicale: Ief Spincemaille
Direction technique et production: Götz Schwörer

Merci au CARREFOUR INTERNATIONAL DE THÉÂTRE et plus particulièrement à Madame Marie Gignac qui par ses découvertes flamboyantes nous offre le privilège de goûter à ces brûlants " hors-d'oeuvres théâtraux...


Finalement, le néerlandais, c'est pas si compliqué que ça. ;-)


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