dimanche 29 janvier 2012

LOIN: Transbordement dans un théâtre près de chez vous


 A STRANGER IN A TRAIN


(Samedi ce 28 janvier 2012, être revenue de LOIN…)
Cette semaine, à Québec, ce fût un véritable carrefour « national » de théâtre; débuté mardi soir au Périscope avec la grande et émouvante ANNETTE, puis jeudi avec les PIERRETTE, THÉRÈSE, SIMONE et cie pour se conclure hier après-midi avec ALFRED, MATTHIAS et DAVID. Ma semaine fût plutôt chargée d'émotions de toutes sortes mais jamais de celles de la satiété...





LOIN…vu de près.
Dans la 2ème rangée de chez PREMIER ACTE, la tête prête pour écouter une autre de ces nouvelles histoires des pays d'en haut. Seule et avec d’autres, face à face de nos vies à vies, j'ai assisté à quelque chose d’ « étrange », d’énorme et de fatalement bon: une production du THÉÂTRE DU HARENG ROUGE. À tour de rôles, les huit comédiens qui ont campé les caractères bouillants et froids de cette trilogie hitchcokienne, m'ont attentivement plongée au cœur d’une intrigue digne du maître du suspens et de deux de ses disciples...some of them...




ALFRED HITCHCOCK, locomotive à vapeurs, qui traîne ses points de suspension dans les wagons de la Création. Son omniprésence dans les trois pièces était indéniable. La blondeur des sentiments féminins, la lumière rouge des regards anxieux, le noir et blanc des épreuves…tout était inclus dans le prix du passage.
Une mise en scène resserrée autour des corps et âmes des plus ou moins gros drames. Du cran, de l’audace, du vertige. Une scénographie fort bien réussie avec tout le nécessaire, celui qui ajuste la parole aux gestes. Tout ce qu’il faut pour ne pas trop en faire. Avec le silence comme narrateur, la tapisserie de la tendresse...
LOIN, pour créer à partir d'un seul mot, celui qui fait se re-dé-composer une histoire accaparante du début jusqu’à la toute fin. C'était là un défi colossal pour les Auteurs, mais ô combien payant pour les Spectateurs qui prirent le temps d'assister à cette oeuvre en trois mouvements; oeuvre pour laquelle trois rappels bien nourris furent la récompense ultime faite aux créateurs.

La distribution en était une de grande qualité; les hommes et les femmes qui firent partie de ce périple devront toujours se souvenir qu'ils voyagèrent en première classe avec la singulière compagnie que sont les imaginaires nourriciers de Thomas Gionet-Lavigne et Hugo Lamarre.

JONATHAN GAGNON, en Alfred touchant à la corde de la sensibilité; sa scène de colère contre le réalisateur, pour défendre son Alma (mater), était tout simplement renversante. C'est toujours un grand plaisir pour le cœur que de voir jouer ce comédien d'ici. JEAN-NICOLAS MARQUIS, en Alfred oncle propriétaire d'usine d'avions de future guerre et mari trompé, probablement ma révélation de cette trilogie. Tout semblait passer par son regard; tant sa douceur que sa rage, sa tristesse que sa colère, mais surtout sa sincérité. Rien ne nous a échappé dans sa façon d’être. LUCIEN RATIO, comme une bonne tasse de café (avec ou sans soucoupe); drôle et léger, son présentateur a déridé l’assistance sans toutefois dépasser la limite permise. Un vrai " complice ". ÉLIOT LAPRISE, alias Matthias Müller *, véritable bête de scène, énergique et transportant, buvant à même le goulot le champagne brut des riches, ou celui des pauvres, petite bière " flat " des vendredis soirs plates; couchant son corps à corps dans les draps froissés des nuits froides de l'aurore. THOMAS GIONET-LAVIGNE, co-auteur de ce projet hors norme, brillant comme un diamant, affûté comme un poignard; il provoque en douceur, alimente l’histoire de ces petits détails qui cognent sur les gros, fait circuler librement sa poésie à travers les dédales d’un quotidien souvent morne. Un semeur de paroles, un moulin à sentiments. Un géant. Un comte aux pieds nus...




THOMAS GIONET-LAVIGNE

Et les femmes, ces oubliées d'un cinéma toujours plutôt mâle dans sa peau... VÉRONIQUE DAUDELIN, somptueuse en mère inquiète de son fils « pas comme les autres »; la grâce sauvage avec laquelle elle enfile ses alibis, le bain de champagne moussant l’âme sèche, la beauté versatile et espérée d’une femme condamnée. JEANNE GIONET-LAVIGNE, la fraîcheur de la finesse d’esprit, douce et forte en Alma d’Alfred, fleur vivace dans l’œuvre de l’homme. MARY-LEE PICKNELL, la transe lucide de la blonde parfaite, un papillon sur la chair blessée de David, un espoir pour la continuité…

Il y aurait encore beaucoup à écrire sur ces quelques quatre heures que durèrent LOIN, pièce fleuve provenue d'un ru; je préfère garder le silence des non-dit pour tenter d'imaginer ce qu'il sera toujours temps de faire pour remonter à bord de ce train...étranger…


***
À l’arrêt de bus, au coin de Cartier et René-Lévesque: une Bénévole, un Metteur en scène et une Spectatrice; trois de ceux qui formèrent le public plus ou moins élargi de LOIN…À quelques minutes de là, sur des Plaines enneigées, la Grande Roue et des feux d’artifices... pour une foule qui était venue célébrer l’ouverture du Carnaval. Puis, à l'issue de ce spectacle mémorable pour moi mais inconnu pour la plupart des autres, cette pensée " éclair " pour les hauts fonctionnaires: 13.75 $, pour quatre heures de théâtre, dans MA langue, ça fait pas tellement cher la poche....de mots ! 




P.S. : Pour célébrer le grand retour d’Alfred dans la Capitale, là où il avait tourné en 1952 son I CONFESS, le Cinéma Cartier présente un festival de ses films du 10 au 16 février.


*MATTHIAS MÜLLER, réalisateur. Pour apprécier son travail.

http://vimeo.com/user624589








3 commentaires:

  1. Thomas Gionet via facebook

    30 janvier

    MERCI D'ÊTRE VENUE et de soutenir le théâtre... Merci pour les beaux compliments et de prendre la peine de m'écrire... Vraiment... ça me touche beaucoup... Il faut faire ça et avoir le courage de le faire, et non pas penser que ca fait têteux... Merci de m'encourager j'en ai terriblement besoin, si vous saviez... Je vais faire une exeption et lire votre critique... (mais prometez moi qu'il n'y a rien de négatif, je le prends souvent mal)THOMAS

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  2. Jonathan Gagnon via facebook

    29 janvier

    Merci à vous. Que ça fait du bien de lire des lignes aussi chargées d'émotion. Votre plume est touchante. Ce fût un grand bonheur pour moi d'incarner ce personnage. Espérons qu'il y aura une suite! Au plaisir!

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  3. Jean-Nicolas Marquis via facebook

    20 février

    Merci beaucoup !

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