samedi 14 avril 2018

UNE BÊTE SUR LA LUNE : d’un continent à l’autre



Gar or chugar
Il y avait et il n’y avait pas

Le 24 avril 1915 est un jour funeste pour les Arméniens. Ce jour-là, à Constantinople, le coup d'envoi du premier génocide du XXe siècle est donné par une rafle de l'élite arménienne. En quelques jours, plus de 2000 intellectuels et notables sont jetés en prison. La majorité d'entre eux sont assassinés. Un plan concerté d'extermination des Arméniens de l'Empire ottoman est mis en œuvre par le gouvernement jeune-turc. Bilan: entre 1,2 et 1,5 million de victimes. Les survivants seront condamnés à l'exil, sans possibilité de retour.



UNE BÊTE SUR LA LUNE, un homme, une femme, et un enfant. Trois jeunes protagonistes secondés par un vétéran raconteur. Une histoire éclatante d’humanité, ponctuée d’explosions de silence. Inspirée par la famille rescapée de son épouse arménienne, Richard Kalinoski, un auteur américain né dans le Wisconsin, dépeint avec une force tranquille et un réconfortant minimalisme le quotidien d’exilés venus trouver une certaine paix aux USA. Charles Aznavour, Arménien de renom, chante ici le souvenir de leur douloureuse délivrance... 



Amélie Bergeron, qui avait cosigné avec Agnès Zacharie le sublime PIANO À VOILE (vu l’an dernier dans le stationnement du Périscope), n’a pas ménagé son talent de metteure en scène, elle a su faire progresser, avec toute la subtilité exigée, cet ignoble désastre humanitaire qu’ont eu à subir les millions d’Arméniens et d’Arméniennes. Secondée par des concepteurs tout aussi qualifiés, on se plaît à espérer une prochaine production dans laquelle on pourrait tous les retrouver.


Gorges nouées par une émotion éclose de l’exil, Mustapha Aramis et Ariane Bellavance-Fafard ont réussi  à fixer l’attention du public averti de LA BORDÉE. Leurs Aram et Seta faisaient partie de ceux qui ont fui le fléau mortel du génocide arménien. Avec toute la rigueur de l’un et la légèreté de l’autre, ils ont formé avec grâce ce couple uni malgré quelques embûches et confrontations. Ayant accepté leur sort, ils avaient l’air si heureux lors du dénouement que l’on aurait voulu leur souhaiter la meilleure des chances pour l’avenir.


En ce 24 avril 2015, j'aurais aimé pouvoir en discuter avec mon grand-père Naïm, qui, dès 1921, du fin fond du petit bled syrien où il s'était réfugié après le génocide, était abonné à La Presse. J'aurais aimé aussi pouvoir en parler avec ma grand-mère Laurice, morte il y a deux ans, elle qui, après la mort de mon grand-père, était la gardienne de sa mémoire et de ses espoirs.

Rima Elkouri, La Presse


Rosalie Daoust a brillé de tous ses feux dans le rôle de l’autre rescapé, l’enfant de la résilience, le petit Italien abandonné aux rues de Milwaukee. Son rôle lui vaudra, j’en suis convaincue, d’autres personnages tout aussi convaincants que son Vincent enfant. 


Quant à Jack Robitaille, l’enfant devenu grand, le narrateur, sa seule présence dans ce spectacle promettait déjà le succès. Toujours aussi juste et bon, sa voix unique transporte l’histoire de cette famille reconstituée au-delà de nos espérances. Et quelle superbe nouvelle avons-nous cette semaine en apprenant qu’il sera le nouveau DRAGONFLY DE CHICOUTIMI présenté à La Bordée l’automne prochain. De quoi avoir hâte que l’été finisse ! 

Photos: L.Langlois
15 mars 2018
"J'apporterais ma mémoire
(et une valise)"
L.L.


Pour terminer cette autre belle soirée de culture, après avoir admiré le hall imprégné d'exilés, A. et moi avons eu le bonheur de croiser Agnès Zacharie et Henri-Louis Chalem, avec qui c’est toujours un grand plaisir de converser de théâtre, d’humanité et de société.

(En espérant n'avoir jamais à faire comme Aram)
Photos: L.Langlois

Enfants fragiles des dinosaures
Enfants frugivores des carnivores
Enfants rois des châteaux-forts
Enfants prisonniers des miradors
Enfants martyrs des sanglantes aurores
Enfants soldats des porte-étendards
Enfants comblés par le Jeu et l’Art

elquidam


Cette histoire d’immigrés aboutis dans l’Amérique des réfugiés ne pouvait pas être plus d’actualité. Parce qu'avec l’été qui arrive bientôt, malgré ce printemps de glace qui n’en finit plus, on nous fera voir à nouveau, aux frontières de notre belle province, le visage inquiet de l’Étranger venu trouver un quelconque réconfort dans ce pays si abondant, qui soit dit en passant reconnaît le génocide. Et parce que l’accueil ne sera pas si facile parfois, parce qu'il y aura encore de la véhémence dans les deux sens, et parce qu’il sera toujours temps de prendre le monde par la main: regardons-les en face, les yeux dans les yeux, juste avant qu’ils ne meurent…


A whole race, genocide
Taken away all of our pride

A whole race, genocide

Taken away

Watch them all fall down




UNE BÊTE SUR LA LUNE

TEXTE: Richard Kalinoski
TRADUCTION: dANIEL lOAYZA
adaptation et mise en scène: Amélie bergeron
assistance à la mise en scène: laurence croteau langevin
décor: véronique bertrand
costumes: julie morel
éclairage: keven dubois
musique: pascal robitaille
PHOTOs du spectacle: NICOLA-FRANK VACHON


REPORTAGE






Avant cette sublime cérémonie théâtrale, avions visité LA GALERIE DES ARTS VISUELS qui nous présentait A SUITABLE DEN de ce même Greame Patterson qui nous avait subjugués avec son PLAYER PIANO WALTZ à la GALERIE 3 l’automne dernier. Encore une fois, il nous aura intrigués avec son ingénieuse installation dans laquelle s’y promène un raton-laveur aux allures plutôt bureaucratiques. Allez voir…;-) 


Autres objets tous aussi curieux les uns que les autres, les RAKU PUNK de Jean-François Boulard et Valérie Blaize. Exposés chez MATERIA, ils nous auront mystifié l’art de la cuisson ! Pour la mémoire...










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