vendredi 28 janvier 2011

KUKIPIK (DOIKIPU): Comme si...j'aime

Photo: L.L.



« Un « lol » ne vaudra jamais un éclat de rire »

Marc Allard
Le Soleil
25 août 2010


Or, que se passe-t-il aujourd'hui ? La culture dans laquelle nous baignons n'a plus rien de commun. Chacun vit dans sa bulle culturelle, toute personnelle et intime, qu'il nourrit dans l'immensité du Web. Car nous sommes par ailleurs immensément cultivés. Sauf que plus personne ne possède les mêmes repères. Il n'existe plus, ce lieu de rencontres qu'autrefois on appelait la Cité. Chacun fredonne sa gigue dans sa tête, renfrogné dans son coin du bus.

Simon Beaudry
Philippe Jean Poirier
Codirecteurs du collectif Identité québécoise
Tryptique de la décadence identitaire
Le Devoir, 18 décembre 2010


Hier soir, à Québec, chez Premier Acte rue Salaberry, la fin du monde du SOUCIDE COLLECTIF était à 8 heures...Catherine Dorion et Nicola-Frank Vachon, accompagnés des musiciens Mathieu Campagna et Philip Larouche, nous ont plongé dans un univers où il faisait bon sentir les odeurs de la désintégration des communications obsessionnelles. Un texte percutant, ironique, énergisant et déstabilisant par moments, des mots garrochés à l'emporte-pièce, des extraits de chansons POPulaires qui en disent long sur la vacuité de l'humanité; des costumes de lumières, des muscles gonflées à la crème fouettée, des quizz de branle-bas de combat dans le sommier, du jus, beaucoup de jus; et de la sueur, avec des yeux tout le tour de la scène, et de l'haleine et...de l'espoir à boire, à boire messieurs dames...

Nicola-Frank Vachon et Catherine Dorion, les deux seuls clowns survivants d'une post-apocalypse prématurée, nous ont fait comprendre la recherche du bonheur, celle qui probablement est le seul travail à temps plein non rémunéré dans lequel nous investissons une bien trop grande partie de nos petites énergies soleilleuses, celle de qui il vaut sans doute mieux en rire définitivement afin de pas en pleurer éternellement.

À certains moments, plus ou moins tragi-comiques, j'ai pu sentir le mal à l'aise gargouillant du KUKIPIK DOIKIPU dans le ventre bien rempli des quelques 80 personnes présentes. L'appétit du Spectateur étant avant tout comblé par la voracité du texte gargantuesque (écrit par les deux principaux protagonistes), A. et moi avons été remplis du plus nourrissants des tout ou rien. Amplifiés par une mise en scène des plus énergiques, de Marc Doré, (danse, mime, chant) les mots en ont creusé long et large dans cet enchanteur vacuum.

Le risque des relations "ascensionnelles" de la facebookerie, avec le cell à portée de main 24/7, avec le temps-va-tout-s'en-va qu'on prend pour pitonner ce qu'on a sur le coeur, ou dans le KUKIPIK, nous désintégrera dans le fur de nos mesures, avec ou sans la simplicité de nos subites amitiés ou dans celle de la petite complication des grands amours...Le beau grand risque de voir se dissoudre à jamais les sentiments sincères qui animèrent un jour la place de nos coeurs vides en celle de notre petit monde fait d'hommes, d'animaux et de plantes, sur-vivants d'une terre en voie de démolition...

C'est ce soir, depuis le cadre Doré des multiples écrans, qu'on a laissé apparaître sur le mien les traces salées de la sueur des Comédiens, l'éclaboussure de leur sang brûlant, l'eau de leur oeil luisant, le crachat de leur bile douce-amère, le blanc crème de leur semence interne...Là, à gauche de l'extrême-droite, entre le KUKIPIK et le DOIKIPU...le temps de prendre de nos nouvelles...


Mais comme pour la téléphonie cellulaire et ses forfaits attirants, la mise à nu en ligne, le partage de tout, tout de suite, avec tout le monde, en annonçant des lendemains meilleurs, pourrait aussi avoir un prix élevé à payer. Mais c'est en recevant la facture qu'on en prend généralement conscience.

Fabien Deglise
Le Devoir, 2 octobre 2010



N.B.: Je dois avouer que j'ai commis une petite entrave au protocole du programme de la soirée (une simple feuille 8½ X 11): on nous avait demandé de la rechiffonner et de la remettre dans le bac après usage, mais comme je conserve précieusement les programmes de mes soirées théâtrales, je l'ai plutôt remise dans le creux de la poche gauche de mon anorak, entre mes gants et ma tuque.


" La vie, la mort, et la démangeaison entre les deux"...


Production: Le Soucide collectif
Mise en scène: Marc Doré
Texte: Nicola-Frank Vachon, Catherine Dorion
Musique: Philip Larouche, Mathieu Campagna
Conception des costumes: Vanessa Cadrin
Scénographie et accessoires: Virginie Leclerc
Éclairages: Félix Bernier Guimond
Régisseur: Mathieu C. Bernard
Coupe et confection des costumes: Judith Fortin
Système électronique costumes: François Ferland Bilodeau
Communications: Paulette Dufour


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