dimanche 9 janvier 2011

LA JUMENT DE LA NUIT: par le nombril du rêve


Photo: L.L.


Quand je n'arrive pas à écrire comme je voudrais, je me laisse sombrer dans la déréliction, comme Antonin Artaud, je fais fumer les jointures des pierres, je fais appel aux mots-stupéfiants, je déchire les membranes proches, j'enténèbre la vie, je deviens une bête mentale et vicieuse.

p.70

On ne revient pas de derrière le miroir, pense encore Abel. On y projette son corps, le verre casse et on reste pris dedans, blessé et ensanglanté, démuni, aussi bien du passé que d'avenir.

p.57


Victor-Lévy Beaulieu
La jument de la nuit
I. Les oncles jumeaux
Éditions Stanké

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3 novembre 1995

Suis allée à la librairie en taxi (le luxe). Vais acheter deux VLB: N'évoque plus que le désenchantement de ta ténèbre, mon si pauvre Abel (aux magnifiques éditions Trois-Pistoles) et son tout nouveau roman: LA JUMENT DE LA NUIT, dont la dédicace à Céline Hallé m'impressionne: " Pour la chaude amitié, comme un petit vent salin venant tout doux de la mer Océane. " Ai également acheté deux Kafka, pour comprendre Abel et...Stephan Bureau.


4 novembre 1995
Je lis La Jument de la nuit; c'est VLB à ses 19 ans avant qu'il commence à vraiment écrire, avant sa crise de poliomyélite. Atroce. Belles images. Dessins!

6 novembre 1995


Je finis La jument de la nuit, excellent. Vraiment Victor-Lévy me détient dans ses écritures. Je suis intoxiquée de lui.

18 novembre 1995

Ai commencé N'évoque plus que le désenchantement de ta ténèbre, mon si pauvre Abel. Admirable ! Je l'adore de plus en plus. Je veux faire un travail sur son oeuvre.


27 novembre 1995

Écris un poème sur La jument de la Nuit...

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La Jument de la Nuit, mon cinquième ouvrage de VLB et non le moindre, est probablement, avec Le carnet de l'écrivain Faust, le roman le plus souligné, le plus annoté que j'aie eu à massacrer. Artaud, Kafka, Gracq, Beckett, Montréal-mort, Judith, Abel, les oncles jumeaux, l'oncle Phil, tout y était, y est et y sera. L'univers du futur grand écrivain, grenade à sa main, exp(l)osé de mots-stupéfiants, des mots avec lesquels on devient assez vite familier; des mots qui vont et viennent à travers toutes sortes d'orifices, issues des mots d'outrance. Des mots qui ont particulièrement été tachés par toutes sortes de liquides: de l'encre au sang, du fiel au sperme, de l'alcool au lait, celui de la Louve fondatrice de Rome...La Jument de la nuit a nourrit, pour ne pas écrire gavé, une grande partie de mon imaginaire. De cette lecture " de rêve " proviendront d'autres mots, les miens, certainement laudatifs mais authentiques. J'aimerai toujours l'aimer autrement...


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