mardi 12 octobre 2010

Ces grands correspondants

De Vilmorin et Cocteau en 1957


Rien de beau sans déchirements, sans explosifs, sans plaies.

Jean Cocteau à Jacques Maritain
9 juillet 1928


Ce n’était pas pour aboutir dans un salon du grand monde quand je franchissais mes distances personnelles, oh! non. Jean Cocteau habitait, place de la Madeleine, un petit hôtel appelé Madeleine Palace Hôtel et c’est dans sa chambre qu’il m’attendait. Il m’accueillit comme si j’eusse été à la fois sa sœur et sa promise; j’étais émue, il paraissait heureux et quand il me prit la main, je sentis mon cœur battre. Il me posa des questions et m’écouta lui répondre avec cette attention qu’inspire un être bien-aimé dont on veut tout savoir, puis il me demanda ce qui me ferait plaisir. "Un café au lait", lui dis-je et, cinq minutes plus tard, assis côte à côte au bord des son lit, nous buvions ce café au lait qui fut notre philtre de Tristan et Iseut. Enfin nous nous étions retrouvés ! Quelle merveille ! Songez donc: rien depuis plus de vingt ans ne nous a séparés. Qu’il soit en voyage ou séjourne loin de chez nous, Jean maintenant vint chaque soir à Verrières et, avant d’entrer, s’arrête à nos fenêtres d’aujourd’hui, comme il s’arrêtait lorsque j’étais jeune fille, à ces mêmes fenêtres qui s’ouvrent à l’Ouest sur le jardin.


Louise de Vilmorin
in Souvenirs de Jean Cocteau


Verrières, le château de Louise de Vilmorin

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