Un vrai Don Juan se branle.
J’ai toujours été curieux de voir le visage des mille et trois femmes de Don Juan et de connaître leur mécanique mentale.
Le facile Don Juan.
Louis Scutenaire
Mes inscriptions
(1943-1944)
Ce que je réprouve dans le personnage [le malfaiteur], je le réprouve également dans tous les hommes et toutes les femmes qui lui jettent la pierre. Il faudrait avoir les mains bien pures pour jeter la pierre, mais les mains pures ont ceci de remarquable, qu'elles ne jettent point de pierres.
Julien Green
Journal
Lorsqu'un élément étranger irritant entre dans la coquille de ces mollusques, ceux-ci secrètent également de la nacre couche après couche tout autour afin de s'en protéger, formant ainsi une ou plusieurs perle (s).
(wikipedia)
DOM JUAN
Date de parution 1682
Date de la 1re représentation 15 février 1665
Lieu de la 1re représentation Théâtre du Palais-Royal
LE THÉÂTRE DE LA FOLIE ne peut donc pas être un théâtre de répliques. Le Fou ne communique pas: il est. Et représenter l’être dans un monde qui ne croit qu’au paraître demeure une entreprise prométhéenne. Elle ne peut être possible que lorsque le Spectateur devient et l’Auteur et l’Acteur et le Metteur en scène et le Personnage, c’est-à-dire une luminosité magique --- expression non d’une dissolution mais d’une condensation, une Parole se disant dans le Personnage enfin nu et prodigieux, aussi bien dire Fou et unique dans ses huit milliards d’images.
Victor-Lévy Beaulieu
Le pays théâtral
Février 1977
En pays de re:connaissance, en "pays théâtral ", en ville, entre fleuve et forêt, mots et gestes, parmi les gardes-chasses et les braconniers, toutes ces belles têtes givrées, rivées sur leurs sièges, toutes ces belles jeunes bêtes s’agitant sur les planches du GTQ, jouant pour les amis de Molière. Ces Acteurs qui vous parlent du ciel et de l’enfer, qui grondent en choeur comme des tonnerres, qui flashent fluo comme des éclairs, qui s’éclatent ensemble sous les lumières, lustrés du mouvement scénique " plus important que la parole "… C’était en 1665. C’était aussi avant-hier…
Pour sa mise en scène sobre et efficace, qui cède pratiquement toute la place à la Parole, Jean-Sébastien Ouellette se mérite une note de premier de classe. Jean-Sébastien, inoubliable Monseigneur Charbonneau d’avril dernier, qui a d’ailleurs remporté le prix des amateurs du Trident pour ce rôle de géant, nous a concocté une véritable fournée de mots brûlants, mots qui nous ont retenus collés à notre siège pendant une heure quarante minutes. MAIS...les toux d'hiver, en plein automne (déjà me dis-je), c’est toujours navrant à entendre, la concentration a certes bien meilleur goût lorsque le silence est de rigueur et à l'honneur, mais bon, passons, ne faisons pas davantage de gorges chaudes, nous sommes tout de même qu’en début de saison…
Molière, en SA divine comédie, qui est venu pour la je ne sais plus combientième fois faire son petit tour au GTQ afin de vérifier si tout se jouait bien " comme en son temps ". Fidèle au poste, et à ses bonnes mauvaise habitudes, comme son éternel Dom Juan, maître ès hypocrisie, il a magnifiquement fait interpréter ce cher Hugues Frenette, qui encore une fois nous donne tout ce qu'il a "dans le corps ", un autre de ses PGRA, petits gestes de résistance à l'abrutissement. Une remarque: le rouge enfer des spots sur sa chemise…rouge, illuminant le doute de ce " porteur de lumière " qui " tel Prométhée, se libérant par la mort, entre dans la (dé)mesure triomphante "…
Le supportant tout le long de cette heure et quarante, Sganarelle, sidekick pétillant/pétulant, valet brillamment interprété par Jean-Michel Déry; Sganarelle, son corps et son âme livrés pour nous comme des cadeaux d’un ciel bonbon dur au centre mou, un peu hypocrite sur les bords lui aussi mais moins tranchant et irrévérencieux que son maître. Du faire-valoir à son meilleur. Véronique Côté, en Done Elvire, toujours aussi gracieuse, la beauté envoûtante de sa voix d'épouse abandonjuanée la faisant résonner entre les lustres du haut faux plafond. Jean-Pierre Cloutier, qui de plus en plus s’assure une place de choix sur les différentes scènes de Québec, qui encore une fois a électrocuté l’assistance de son regard intense. Etre assis dans la rangée F cette année, au lieu de la K de l'an dernier, donne accès au bleu privilège du regard franc de l’Acteur. Les costumes, de facture classique, lui seyaient tout comme un gant…blanc. Simplement majestueux, tout comme l’étaient les Jean-René Moisan, Nicolas Létourneau et Jack Robitaille. Nicolas Létourneau (Pierrot), Krystel Descary (Charlotte) et Cynthia Trudel (Mathurine) nous ont donné des dialogues tout simplement hilarants avec l’objet vivant qu’est leur langue " locale "…
À la fin, après les applaudissements bien nourris d'un public conquis, j’ai eu une pensée éclair pour Paul Hébert*, lui qui rêve de voir naître un jour (d’été) un événement annuel à la mémoire de Molière…
Un fait à noter: le nom de celui qui tenait le rôle de la Statue du Commandeur n’apparaissant pas dans le programme, je me demande qui se cachait sous Elle, peut-être était-ce le metteur en scène ou Molière lui-même ?
DISTRIBUTION
Jean-Pierre Cloutier Dom Alonse, La Ramée et La Violette
Véronique Côté Done Elvire
Jean-Michel Déry Sganarelle
Krystel Descary Charlotte
Hugues Frenette Dom Juan
Nicolas Létourneau Pierrot et M. Dimanche
Jean-René Moisan Dom Carlos, Gusman et Ragotin
Jack Robitaille Dom Louis et le pauvre
Cynthia Trudel Mathurine
POUR les Comédiens qui, soir après soir, jouent dans les larges dos de leur public serré à l'étroit, et qui recueillent de la France des bouquets de lumières scintillant directement du 17ème, je leur dis MERCI pour cette soirée d'enfer...
Texte Molière
Mise en scène Jean-Sébastien Ouellette
Scénographie Bernard White
Costumes Maude Audet
Éclairages Sonoyo Nishikawa
Musique Stéphane Caron
Assistance à la mise en scène Caroline Martin
* http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/arts-et-spectacles/theatre/200912/13/01-930702-paul-hebert-insatiable-reveur.php
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